Aujourd'hui, la vieille technique d’augmentation des impôts indirects, utilisée pour compenser la faiblesse des rentrées fiscales issues de l'impôt sur le revenu (IR) ou de l'impôt sur les sociétés (IS) a fait de la France l’un des pays les plus inégalitaires d’Europe…
Après la suppression de Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les personnes les plus riches (6 milliards € de recettes fiscales en moins), la mise en place d’une taxe allégée sur les revenus financiers (4 milliards € de recettes fiscales en moins) puis la suppression de l'exit taxe qui était destinée à dissuader les Français d'installer leur foyer fiscal à l'étranger (800 millions d'euros offerts aux ultra-riches), le gouvernement d'Emmanuel Macron est contraint non seulement de réduire les budgets sociaux mais d'augmenter aussi les impôts indirects qui sont censés être plus indolores.Dans le cadre de l'évaluation des recettes perçues par l'Etat en 2018 (art. 57 de la loi de finances initiale pour 2018), sur près de 287 milliards d’euros de recettes, 154 le sont au titre de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA), 13 milliards au titre de la Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE, ex TIPP), l’impôt sur le revenu (IR) participant seulement à hauteur de 72 milliards et l’impôt sur les sociétés (IS) à hauteur de 25 milliards, 20 milliards étant référencés aux rubriques « autres recettes fiscales ». Ces impôts indirects sont très injustes car ils touchent sans distinction tous les foyers, y compris ceux qui, à cause de la faiblesse de leurs revenus, ne sont pas assujettis à l'IR (plus de 50% des foyers). Conséquence : ils deviennent de moins en moins lourds au fur et à mesure que le contribuable est plus aisé.
- Au premier rang d'entre eux figure la TVA (53,9% des recettes budgétaires) qui rapporte 2 fois plus que l’IR (25,3%). Si l’on y ajoute la TICPE (4,7%), ce sont près de 60% des recettes fiscales qui proviennent d’impôts indirects touchant uniquement les consommateurs. Le consommateur est ainsi taxé par rapport à sa consommation et non par rapport à son revenu.
- A cela s'ajoute la fiscalité locale devenue de plus en plus importante au fil des années et qui ne dépend pratiquement pas du revenu des contribuables, sauf dans quelques cas d'exonération partielle ou totale. De plus, les bases d'imposition sur la valeur locative sont totalement archaïques car elles datent de 1961 (taxe foncière) et de 1970 (taxe d’habitation). Résultat : un habitant de banlieue peut payer plus cher qu'un contribuable aisé résidant dans un immeuble des beaux quartiers parisiens ! Emmanuel Macron entend bien supprimer la taxe d'habitation mais ce faisant il la supprime aussi pour les personnes les plus riches, la maintient pour les résidences secondaires et ne dit rien sur sa compensation auprès des collectivités locales qui vont être tentées d'augmenter la taxe foncière qui est aussi injuste que la taxe immobilière.
- Autre phénomène grave est celui de l'érosion continue des remboursements de l'Assurance maladie : forfait journalier hospitalier, retenues forfaitaires pour chaque visite médicale et chaque boîte de médicament, dépassements généralisés des honoraires, médicaments déremboursés partiellement ou totalement sans oublier le ticket modérateur qui reste à la charge des assurés sociaux qui n'ont pas les moyens financiers de s’offrir une mutuelle.
- enfin, le développement d'une multitude de taxes de toute sorte qui passent le plus souvent inaperçues.
Une réduction éventuelle de la fiscalité indirecte découle d'abord d'un choix politique
L'article 14 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 nous rappelle que chaque citoyen doit participer à la mutualisation des moyens financiers de l'Etat. Mais selon une étude de l’OCDE, la France est loin derrière certains pays qui donnent la priorité à l’IR en matière de recettes fiscales. Le pourcentage est de 53% au Danemark, 32% en Belgique, Suède et Finlande, 29% au Royaume-Uni. Le Danemark s’honore en dépassant le seuil de 50% des recettes de l’Etat, acquises par le seul IR.Une vraie réforme consistant à réduire la fiscalité indirecte passerait par une vraie réforme de l'IR car Il existe bien une singularité française par rapport à d'autres pays qui parviennent mieux à réduire les inégalités sociales.Il conviendrait notamment de :
- augmenter le nombre de tranches de l’IR qui souffre toujours d'un manque cruel de progressivité avec seulement 5 tranches d’imposition : 0% (0 à 9 807 €), 14% (9 807 € à 27 086 €), 30% (27 086 € à 72 617 €), 41% (72 617 € à 153 783 €) et 45% (au-delà de 153 783 €).
- réduire drastiquement le nombre de niches fiscales qui pèsent plus de 70 milliards €, pratiquement autant de ce que rapporte l'IR !
- remanier la fiscalité du patrimoine qui doit être plus progressive et mieux contrôlée pour empêcher l’accumulation héréditaire du pouvoir économique et du politique qui en découle.
- lutter réellement contre la fraude et l’évasion fiscale qui sont d'une telle ampleur qu’elles posent un problème autant démocratique qu’économique. Selon le syndicat des finances publiques Solidaires, entre 60 et 80 milliards € de recettes fiscales sont perdues chaque année, du seul fait de la fraude fiscale, et 40 à 60 milliards € du fait de l'optimisation fiscale. Ce sont essentiellement les grosses entreprises et les riches particuliers qui en bénéficient car ils peuvent faire de gros investissements déductibles de l’Impôt ou user de l’existence des paradis fiscaux.
- prendre en compte le revenu dans l’assiette des taxes foncière et immobilière afin de tenir compte davantage de la capacité contributive de chacun.
- baisser la TVA sur les produits de première nécessité
- réduire la TICPE qui a encore augmentée en 2018 : 0,682 € par litre d'essence sans plomb !
- adopter pour toute la France le régime d'Assurance maladie d'Alsace-Moselle. Le taux de couverture base de la sécurité sociale alsacienne-mosellane est de 90 % (80 % pour les médicaments remboursés à 35 % ailleurs en France) et de 100 % pour l'hospitalisation (pas de forfait journalier).
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