Partager la publication "[Critique] JURASSIC WORLD : FALLEN KINGDOM"
Titre original : Jurassic World : Fallen Kingdom
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Juan Antonio Bayona
Distribution : Chris Pratt, Bryce Dallas Howard, Rafe Spall, Daniella Pineda, James Cromwell, Toby Jones, Justice Smith, Isabella Sermon, Geraldine Chaplin…
Genre : Aventure/Action/Fantastique/Suite/Saga
Date de sortie : 6 juin 2018
Le Pitch :
3 années se sont écoulées depuis la destruction du parc Jurassic World par les dinosaures. Laissée à l’abandon, l’île est désormais menacée par l’éruption d’un volcan, qui condamne les créatures à l’extinction. Une opération de sauvetage est alors organisée. Dépêchés pour faciliter l’évacuation, Claire et Owen reviennent à Jurassic World mais rien ne va se passer comme prévu…
La Critique de Jurassic World : Fallen Kingdom :
Carton planétaire, le premier Jurassic World avait prouvé que le public était encore en demande pour tout ce qui touchait aux dinosaures. Une suite à la trilogie Jurassic Park, de Steven Spielberg, en forme de remake maladroitement déguisé de l’illustre premier volet, qui se terminait dans le chaos (comme le premier Jurassic Park donc), laissant bien sûr la porte ouverte à une suite. Une suite que voilà, pilotée, non plus par Colin Trevorrow, ici producteur, mais par Juan Antonio Bayona, le prodige déjà responsable de L’Orphelinat, The Impossible et du magnifique et tragique Quelques Minutes Après Minuit… Un auteur, un vrai, doté d’une patte certaine et d’un savoir-faire indéniable, qui se retrouve pour la première fois aux commandes d’un blockbuster à plusieurs centaines de millions de dollars…
Le Monde à nouveau perdu
Comment un réalisateur habitué à avoir les pleins pouvoirs et par contre pas habitué du tout à manipuler une grosse machine comme celle-là (avec toute la pression que cela sous-entend) allait-il se débrouiller ? Le risque était bien sûr de le voir s’effacer devant la toute puissance du studio comme tant d’autres avant lui. Bonne nouvelle : ce n’est pas ce qui s’est passé ici. Enfin, pas complètement… Juan Antonio Bayona est parvenu à s’imposer au prix d’un sacrifice de taille : le scénario. Pas du tout maître de l’histoire qu’il est chargé d’illustrer, le cinéaste s’est ainsi efforcé de livrer un spectacle à la hauteur des attentes, probablement conscient que le récit n’était qu’une sorte de version hyper bancale du Monde Perdu, le deuxième volet de Jurassic Park, réalisé en 1997 par Spielberg. Au final, Jurassic World : Fallen Kingdom ne raconte rien de bien palpitant (ce qui est loin d’être sa seule tare à ce niveau comme nous le verrons plus tard) mais il fait largement le job d’un point de vue strictement visuel, Bayona réussissant à faire parler la poudre, exploitant avec maestria l’énorme budget mis à sa disposition et casant ici ou là quelques morceaux de bravoure franchement spectaculaires. Bayona dont l’une des principales et plus louables prouesses et de distiller une sorte de poésie, alors qu’au départ, il faut bien le reconnaître, Jurassic World 2 avait toutes les chances d’en être parfaitement dénué.
On pense notamment à cette superbe et très émouvante scène durant laquelle un dinosaure est avalé par un nuage de cendres ou encore à la dernière demi-heure, très efficace car parcourue de plans super inventifs et plutôt audacieux pour ce genre de production balisée.
Le raptor se mord la queue
Jurassic World 2 fait montre d’une bravoure certaine quand il assume pleinement son statut de rollercoaster. La première heure remplit complètement le contrat passé avec le spectateur. Les promesses sont tenues. Les paysages sont magnifiques, les dinosaures sublimes, les effets-spéciaux mêlent habilement images de synthèse et animatronics comme au bon vieux temps de Jurassic Park et les scènes d’action sont ultra spectaculaires comme prévu. Ensuite ça se gâte. Ça se gâte car le film choisit de réduire son champ d’action en s’enfermant dans un espace très limité, se frottant ainsi aux scènes les plus claustrophobiques et angoissantes des premiers volets réalisés par Spielberg mais échouant donc à chaque fois pour la simple et bonne raison que le film oublie de raconter une histoire qui se tienne. Quand il est simplement question de se pointer sur l’île pour sauver les dinosaures, passe encore, car c’est du pur show XXL. Les enjeux sont limités mais au moins ils sont là. C’est simple et efficace. Ensuite, quand on tente de nous vendre des méchants aux motivations prévisibles, le long-métrage fonce tête baissée dans un mur qu’il se paye sans autre forme de procès, fonçant encore et toujours dans l’espoir de le traverser mais se retrouvant au tapis en moins de deux, incapable de se relever. Au fond, ce que fait Jurassic World 2, c’est essayer de capitaliser encore et toujours sur les mêmes ressorts. Des bad guys veulent s’approprier les dinosaures, les gentils cherchent à empêcher le pire de se produire, c’est cousu de fil blanc, on voit venir la fin à des kilomètres et c’est bien dommage.
Le pire, c’est qu’aucun personnage n’est vraiment travaillé. Les anciens, incarnés par Chris Pratt et Bryce Dallas Howard, ne bougent pas d’un iota et les nouveaux se contentent de rentrer dans des cases bien confortables, n’apportant pas suffisamment à l’histoire pour lui permettre de s’extraire d’un marasme parfois gênant de clichés tenaces. Jurassic World 2 ne fait même pas semblant de vouloir essayer. Il table juste sur tout ce qui a été fait précédemment, sans flamboyance. Un constat par ailleurs également valable pour la musique, anecdotique quand elle s’éloigne du magnifique thème de John Williams.
Ici, la flamboyance vient de Juan Antonio Bayona. Un réalisateur qui livre en toute logique son film le plus impersonnel mais dont la puissance de la mise en scène et la vision permettent néanmoins à Jurassic World : Fallen Kingdom de se poser comme une attraction divertissante sur le moment, à défaut d’être mémorable.
En Bref…
Pas original pour deux sous, tablant sur une somme assez embarrassante de clichés et ne racontant rien de vraiment audacieux, Jurassic World 2 ne vaut finalement que pour les morceaux de bravoure visuels que Juan Antonio Bayona est parvenu à emballer, envers et contre un scénario téléphoné et parfois assez crétin. Malgré un discours écolo bienveillant. Une belle coquille vide en somme. Une partition assez vaine, néanmoins traversée d’instants de grâce ou de pure fureur, assez révélateurs du film auquel nous aurions pu avoir droit si Bayona avait eu un contrôle total…
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Universal Pictures International France