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Paul François, président de l'association Phyto-victimes qui regroupe plusieurs centaines de victimes des pesticides, est en colère. Handicapé et incapable de poursuivre son activité après une intoxication aigue par un produit de Monsanto, Paul François sait de quoi il parle. Il est en procès depuis 10 ans contre la firme. Dix ans de lutte et 50 000 euros de frais de procédure pour obtenir une réparation légitime. Monsanto a été condamné en 2012 à l'indemniser mais a fait appel de cette décision puis s'est pourvu en cassation. La Cour de cassation a annulé les jugements en faveur de l'agriculteur. Autre exemple : celui de Dominique Marchal, atteint d'un syndrome myéloprolifératif, qui a été le premier exploitant agricole dont l'état de santé a été reconnu en maladie professionnelle en 2006 mais qui n'a pu se retourner contre les responsables en raison du nombre de pesticides potentiellement en cause.
A l'issue d'un long travail d'information des parlementaires, l'association Phyto-victimes a réussi à faire adopter par le sénat en février 2018 une proposition de loi prévoyant la création d'un fonds d'indemnisation des victimes des pesticides, financé par une taxe sur ces produits. Les sénateurs ont adopté ce texte à l'unanimité malgré l'opposition du ministre de la Santé, Agnès Buzyn.
Un rapport officiel soutient la création de ce fonds
Un rapport de trois inspections d'Etat a soutenu leur démarche. Ce dernier préconise la création de ce fonds d'indemnisation pour plusieurs raisons : les maladies liées aux pesticides sont sous déclarées et lorsqu'elles sont déclarées, elles ne sont presque jamais reconnues comme telles. D'autre part, les responsabilités des différents produits utilisés en agriculture sont difficiles à établir et la plupart des actions intentées par les victimes n'aboutissent pas. Enfin, les dispositifs d'accès à l'indemnisation sont très limités en France.
Le texte créant le fonds d'indemnisation doit à présent être examiné par l'Assemblée nationale mais l'association Phyto-victimes redoute l'opposition du gouvernement. Ce dernier tente de remplacer le fonds par des propositions alternatives telles la poursuite des recherches scientifiques et une amélioration de l'indemnisation mais Phyto-victimes les juge très insuffisantes et souligne qu'il existe déjà de très nombreuses publications scientifiques sur le sujet, suffisantes à justifier une action politique.
" Le fonds d'indemnisation est la seule voie de réparation possible pour des centaines de victimes et permettra de briser l'invisibilité des personnes ayant subi les conséquences de l'utilisation des produits phytosanitaires ", écrit l'association. Et elle s'interroge devant l'attitude du gouvernement : " Allons-nous refaire les mêmes erreurs qu'avec l'amiante ? ".
Anne-Françoise Roger