Guillaume Hebert
De la vie moderne et l’art ancien
Guillaume Hebert, festival Circulation(s), Prix, Lauréat, photographie | Publié par Thierry Grizard le 29 mai 2018 pour artefields.net
Guillaume Hebert entre nostalgie et critique
Guillaume Hebert, artiste visuel né en 1969, pratique la photographie comme un moyen critique sur notre époque.
Plutôt que de livrer un travail documentaire classique le photographe français reprend les principes de la « Staged Photography » américaine, dont le tenant le plus reconnu est Jeff Wall. Ce dernier construit des « tableaux photographiques », qu’il expose dans des boites lumineuses, lesquels citent les maîtres anciens de la peinture pour dresser un constat acerbe du désenchantement de la vie moderne.
Guillaume Hebert, quant à lui, ne reconstruit pas, il confronte, apporte la contradiction. En effet, l’artiste photographe français procède à de subtils photomontages qui insèrent des premiers plans photographiques dans des tableaux élégiaques de la période classique ou romantique. Il emprunte donc à William Turner, Delacroix ou Fragonard des lointains picturaux idylliques où la Nature était déjà, dans l’esprit de ces artistes ,davantage une figure uchronique de l’Eden qu’une représentation fidèle ou perceptuelle et subjective comme plus tard chez les impressionnistes. Quant aux premiers plans ils n’ont rien de l’idéal, il s’agit pour l’essentiel de décharges, lieux pollués ou abandonnés à la négligence des hommes. Le plasticien néanmoins utilise un étalonnage subtil des couleurs afin qu’une vision superficielle laisse une impression étrange d’homogénéité. Ce n’est qu’au second regard, une fois interpellé, que le subterfuge saute aux yeux. Le constat est alors sans appel. La rupture de l’union entre les hommes et leur environnement, on ne dit plus la Nature, est profonde et inquiétante.
Les niveaux de lecture sont donc assez nombreux : la nature transfigurée et irréelle de la peinture classique ou romantique ; le conflit proprement moderne entre un mode de vie insoucieux du futur et l’environnement dont nous avons oublié qu’il n’est pas un théâtre, un décor, un fond mais notre habitat ; la nostalgie d’une nature qui est davantage une représentation culturelle que réelle ; et enfin, le trouble, tout à fait contemporain, propre à toute image photographique dont la prétention à l’objectivité est d’emblée compromise.
Guillaume Hebert a obtenu avec cette série : « Updated Landscape » (une lecture dichotomique de paysage), le Prix du Public 2018 du Festival Circulations(s).
© Guillaume Hebert.
© Guillaume Hebert.
© Guillaume Hebert.
© Guillaume Hebert.
A voir aussi
1 octobre 2017/par Thierry Grizard
Jeff Wall la photographie mise en scène
Jeff Wall est un des photographes plasticiens les plus célèbres de notre époque, il a introduit dans la photographie l'histoire de l'art pour lui donner une dimension documentaire et critique à travers une étonnante démarche de reconstruction fictionnelle et narrative inspirée du cinéma.2 juillet 2015/par Thierry Grizard
Thomas Ruff L’image photographique n’est-elle qu’un simulacre ?
Thomas Ruff depuis le début de sa carrière se concentre sur le médium photographique. Il analyse méticuleusement dans une esthétique propre à la Photographie Objective affiliée à l'Ecole de Düsseldorf la nature essentielle. Il en résulte un travail fascinant de déconstruction et de reconstruction à travers les grands usages de la photographie, notamment le portrait.15 décembre 2017/par Thierry Grizard
Thomas Struth ou la photographie de la banalité
Thomas Struth est une des figures majeures de la Photographie Objective allemande, il se caractérise par une photographie presque sans qualité susceptible de créer des décalages révélateurs.25 mars 2018/par Thierry Grizard
Thomas Demand, de l’architecture des images
Thomas Demand est une sorte d'architecte plasticien qui réalise des maquettes à partir d’images d’archives pour les réduire à leur seule géométrie abstraite pour finalement les reproduire à nouveau sous forme d’images photographiques dépouillées de tout contexte signifiant. Les surcouches interprétatives apparaissent alors en pleine lumière.Guillaume Hebert : œuvres
Partager cet article
- Partager sur Facebook
- Partager sur Twitter
- Partager sur Google+
- Partager sur Tumblr
- Partager par Mail
L’article Guillaume Hebert, paysages et « Updated Landscape » est apparu en premier sur ARTEFIELDS.