Les sœurs de Fall River de Sarah Schmidt 3.75/5 (22-03-2018 )
Les soeurs de Fall River (360 pages) est disponible dpeuis le 7 mars 2018 aux Editions Rivages (traduction : Bach)
L'histoire (éditeur) :
D'un crime réel très célèbre en Amérique, Sarah Schmidt a fait un roman passionnant, best-seller en Australie et en Angleterre. A la fin du XIXe siècle, à Fall River (Massachussets), un couple sans histoires est retrouvé massacré à la hache dans sa propre maison. Rapidement, les soupçons se portent sur l'une des filles des Borden, Lizzie. Tour à tour, chaque protagoniste du drame prend la parole : la bonne, un témoin inconnu, Lizzie, sa sœur... Le roman devient alors une fascinante plongée dans les profondeurs de l'âme humaine et dans les secrets d'une famille.
Mon avis :
Voilà une bien troublante lecture…
Sarah Schmidt nous plonge (littéralement) au cœur de la famille Borden. Une famille très particulière, à l’histoire très chargée (une tante qui a noyé ses enfants dans une bassine avant de se trancher la gorge), aux comportements déviants (une belle-mère qui se lève aux aurores pour se mettre des coups de poings dans l’estomac pour se faire violence), aux rancœurs profondes (celle d’une femme face aux constat d’une vie gâchée)… Bref, une famille dysfonctionnelle dans laquelle gravitent Andrew, le père grand comme un arbre, brutal et autoritaire, son épouse Abby (mariée à 36 ans, peu de temps après le décès de la première femme d’Andrew), deux grandes filles Lizzie et Emma (respectivement 32 et 41 ans) dont la benjamine se révèle particulièrement irritante par son besoin constant et excessif d’affection, sa jalousie maladive et enfin, Bridget, la bonne qui a quitté l’Irlande il y a 7 ans et qui ne souhaite désormais plus que la retrouvée (mais qui se retrouve prisonnières des besoins des Borden qu’elle supporte de moins en moins).
Le 4 août 1982, Lizzie découvre le corps de son père, défiguré, massacré à coups de hache. Son épouse est très rapidement retrouvée à l’étage, morte elle aussi dans d’atroces conditions. Si Lizzie, entre témoignages et comportements troublants, est très vite considérée car suspecte et même accusée du meurtre à coups de hache de son père et sa belle-mère (pour être finalement acquittée), l’affaire ne sera jamais clairement résolue.
L’auteure a choisi de ne pas résoudre ce fait divers, elle préfère, par le biais du roman choral, nous livrer les faits comme elle les entend (tout en restant très fidèle à la réalité) et de ne pas vraiment se positionner (même si certaines voix font entendre une certaine vérité).
Toutefois, même si l’histoire ne livre pas le responsable, c’est un vrai plaisir de s’embarquer aux cotés de ces protagoniste et/ou narrateur un peu barrés (y compris celui de l’oncle et de Ben, engagé quelques jours avant le drame afin de « secouer » un peu Andrew), de s’introduire dans leur esprit tourmenté et de traverser le temps de la lecture cette maison très vite étouffante et poissant. La compassion pour les uns, l’incrédulité quant aux réaction de d’autres, l’agacement (voire même l’aversion) pour d’autres nous accompagnent de bout en bout.
On ne peut imaginer une jeune femme (qui m’a davantage fait penser à une fillette qu’une femme) massacrant de telle sorte sa famille et pourtant le doute est de mise. Elle ou un autre ? difficile de vraiment se positionner. En plus de cette sensation de malaise face à cette famille dysfonctionnelle, c’est un sentiment de frustration qui nous habite arrivé au dénouement. Ah comme on aimerait savoir le fin mot de l’histoire, avec des certitudes.
La narration de Sarah Schmidt m’a beaucoup plus. Elle réussit, sans surenchère, à rendre l’ambiance et les faits de manière très réalistes. Elle nous entraine à merveille dans cette histoire en jouant avec des descriptions, des sensations, avec nos doutes bien évidement. Troublant et énigmatique, les sœurs de Fall River est un premier roman captivant qui plonge bien au-delà du fait divers. Impossible de ne pas s’aventurer sur le net pour en savoir plus après cette lecture !
Emma et Lizzie