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je me sens encore à côté de la track
et je trouve que ma transformation est
vraiment longue et douloureuse
mais même si
hier j'ai eu le temps de faire deux fois mon quizz
relire mes réponses et partir trente minutes avant la fin
sinon je trucidais la surveillante
même si
je voulais raccrocher la ligne au nez
des prestataires qui me tapaient s'es nerfs
même si
j'évitais de croiser un collègue
que j'ai envie de vomir
à cause de son excès de sollicitude
même si
je me suis endormie devant ma formation web
en après-midi et que j'ai eu envie de crisser mon camp
même si
j'ai failli rester dans le wagon
de nombreuses autres stations pour finir mon sudoku
même si
j'ai utilisé les escaliers roulants
pour monter dans le métro
même si
je suis restée à la station les yeux rivés
sur mon bout de journal
à côté des quêteux et des distributeurs de journaux
pour ne pas rentrer à la maison
même si
j'ai failli boycotter un souper entre amis hier soir
il reste que
après une bonne nuit de sommeil
et une bonne dose d'amour
mon cerveau voit assez clair pour comprendre
que je suis sur le bord du burn out
et que je doive me remettre en question
encore une cinquante millième fois
en juin deux mil treize
proche de la maison de margo à dennys
cape cod
virginie me demandait si je voulais vraiment être pharmacienne
si j'avais vraiment envie de ce quotidien
alors que j'envisageais à cette époque
quitter un poste prometteur
au sein de la septième banque du pays
elle me forçait à m'imaginer ce futur
parce que le chemin allait être long et douloureux
et il fallait qu'il en vaille la peine
un an plus tard
j'entreprenais des études en comptabilité
parce que le chemin allait être moins long
mais je n'avais pas envisagé le futur
c'est le propre de l'être humain
de s'emmerder avec le futur
depuis qu'on travaille les champs du matin au soir
on doit penser aux saisons aux récoltes
au climat aux intempéries
aux périodes de bombance et celles de vache maigre
moi
je ne pense à rien
je pense à bien manger à bien boire
à m'habiller à me parfumer
à lire et à contempler l'art
donc non
je n'avais pas pensé à mon avenir
mais je savais que le présent n'était plus le bon
je ne pouvais plus m'astreindre
aux contraintes corporatives
elles me pesaient trop lourd
mais j'ai eu un autre poste
dans une autre corporation
et j'ai continué
relevant à nouveau un autre défi
m'y investissant entièrement
sans penser
jusqu'à ce que ce soit clair
que ce n'était plus mon monde
qu'il fallait que je me transforme
il me fallait de la liberté
mais à quel prix
j'ai choisi le chemin de la comptabilité
j'aurais pu choisir le petit pain
le petit gagne-pain
le facile
mais mon orgueil m'en a empêché
leçon de vie
l'orgueil est un péché capital
et non un coach de vie
j'ai choisi un long et douloureux chemin
qui jour après jour depuis quatre ans
me pèse me diminue
la croix est trop lourde à porter
je ne sais pas pourquoi j'ai besoin
de traverser ces épreuves
parce que ma vie a été trop facile avant
je ne sais vraiment pas ce que ça change à l'humanité
de faire ce que je fais
c'est un diplôme dur à obtenir
en travaillant à temps plein
d'ailleurs pourquoi me suis-je retrouvée
à travailler à temps plein
moi qui ne voulais plus de cela
je n'ai pas assez de prédateur
je suis en train de m'autodétruire
à force de vivre dans l'abondance
manger boire chier
dormir me lever travailler
non
j'ai juste envie de m'enfuir
tu as raison virginie
il faut que ça en vaille la peine
je repars réfléchir
et à défaut de trouver rapidement la réponse
je retourne travailler
et faire de mon mieux
dans mon quotidien
celui qui m'est alloué
pour me retrouver.