Conscience de l'ignorance plus que certitude de savoir.

Publié le 14 mai 2018 par Valabregue

Nassim Nicholas Taleb est un admirateur de Montaigne, ( et aussi de Sextus Empiricus et Sénèque) , ensuite il a compris qu’une civilisation s’effondrait si personne ne risquait sa peau. (Ce qu’a fort bien exprimé Jared Diamond).

Il a vécu au Liban, au début de la guerre. Il n’oublie pas qu’avant Athènes, Rome Constantinople, il y a eu les phéniciens et ce peuple hors normes de navigateurs. Il sait que Europe est la fille du roi de Tyr enlevé par Zeus jusqu’en Crète.I

ll fait bien la différence entre Erasmus et Montaigne, entre le savoir livresque et le savoir de terrain qui manque tant à nos énarques qui nous gouvernent

Il a écrit ce fort livre « le Cygne Noir » qui est une charge contre ceux qui croient connaitre ( en particulier les banquiers). Son expérience de trader a déterminé sa vision de la décision sous incertitude. Pour lui, il y a deux façons de connaître le monde. La première par l’épistémologie et la statistique. Modéliser ce qu’on sait. La seconde savoir voir ce qu’on ne comprend pas, en tenant compte de l’incertitude et du hasard, (tout en se bordant d’assurances stats). Pour lui, mieux avoir la conscience de l’ignorance que la certitude du savoir.Ce qu'il a retenu chez Sénèque, qui était commerçant, c’est que le risque consécutif à la perte doit y toujours être inférieur au risque du gain. C’est une forme d’asymétrie conceptuelle. Asymétrie théorisée par Thalès. On n‘a pas besoin de connaître, si on a très peu à perdre !

Il a ainsi bâti le concept d’antifragilité qui est bien plus intéressant que celui de résilience ( qui revient au mieux à revenir à l’état antérieur, et concept qui me fait penser à celui d’homéostasie positive de Damasio). L’antifragile ne s’adapte pas, il se bonifie avec les chocs. L’antifragle s’appuie sur une vision convexe du monde pas concave comme les fragiles (il met dans la catégorie fragile les bureaucrates, les hauts fonctionnaires, les banquiers, les intellectuels, ça daignerait à être étayé, tout dépend de l’échelle de temps, mais c’est plaisant de considérer un bureaucrate comme fragile !!!).

En tout cas ce sont les fragiles qui nourrissent la fragilité. Et nourrissent les rentes de situation.Suivant Aristote, il n’y a pas de contradiction entre courage et prudence.Pour remettre de l’éthique dans le juridique il faut favoriser le contrat plus que la loi. Les puissants passant leurs temps à faire changer les lois à leur profit.

C’est par le Tort law (le droit de la responsabilité) qu’on rétablit l’équité. Il y a besoin d’un contrat qui engage une responsabilité juridique et non pas d’un code Justienien dont est issue la Common Law fondée sur la jurisprudence ou d’un code napoléonien.En fait dès le code d’Hammourabi fait à Babylone qui disait qu’une maison qui s’effondre et tue son propriétaire conduit à mettre à mort le maçon est plus efficace que la morale kantienne. Il reproche à Kant une chose très juste : le contrat universel entre Nation et individu est une pure abstraction qui fait fi de l’effet fractal. On peut conclure des contrats symétriques entre entre un invidividu et son village, entre des villages entre eux, entre des contés, des pays mais pas entre un individu et une Nation. Il marque avec amusement que plus les gens sont universalistes plus ils sont agressifs avec le garçon de café ! L’universalisme moral ignore que le comportement d’un groupe n’est pas celui de la somme des individus Donc, il faut bâtir à partir du local et non du global, suivre le modèle Suisse et l’éthique Juive. La formation de l’éthique ne se fait pas par l’universel mais peut se faire par des minorités. ( on retrouve, petite pb les préoccupations de notre livre « Réinvestir l’humain , qui a été une intense bataille pour sortir du concept insuffisant développé par Viveret de transformation perso/ transformation sociale en faisant l’impasse sur les transformations collectives, instances essentielles de médiation, bref dirais-je, d’un binaire local global qui nous pollue depuis le club de Rome !!)

Il manque à Taleb le concept de transversal, mais c’est tout, comme s'il l’utilisait sans le nommer.

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