Quatrième de Couverture
Cet automne 1942, le domaine de Montillac a bien changé. La vie est dure. Le bonheur a fait place aux deuils, l'insouciance aux privations. Au plus noir de l'Occupation, Léa Delmas va découvrir la délation, la lâcheté, la collaboration. Ses proches vont subir les tortures, d'autres trahir. Elle va choisir farouchement le camp de la liberté : La Résistance.
Au mépris de tout danger, dans le Paris des faux plaisirs et des vraies horreurs, elle va s'opposer à l'occupant et tenter de sauver ceux qu'elle aime... Seuls, son appétit de vivre, sa jeunesse, sa fougueuse sensualité lui permettront de tenir tête... On suit ses personnages avec passion et elle sait nous faire vivre ces années d'Occupation, chez les résistants comme chez les collabos, dans les vignes bordelaises comme dans les rues de Paris, avec une étonnante puissance d'évocation.
Mon avis
Léa a vingt ans et c’est à travers la défaite de la France et l’Occupation allemande qu’elle s’est frayée un chemin jusqu’à l’âge adulte. Ce ne sont ni l’honneur ni la morale qui dictent ses choix mais son essence même, ce qu’elle est au plus profond d’elle-même. La mort, elle l’a croisée, la haine, elle l’a mesurée, l’horreur, elle la croise tous les jours. Et c’est en étant fidèle à elle-même qu’elle s’engage corps et âme dans la Résistance, qu’elle impose son aide à ceux qui la pense trop faible ou frivole parce qu’elle est une femme. Aux côtés de ses amis, de sa famille, elle fonce tête baissée et partage sa vie entre peur, faim, plaisirs et lutte.
L’intrigue ne connaît aucun essoufflement, les événements s’enchaînent, qu’ils soient historiquement vrais ou liés à l’histoire fictive de Léa : l’ensemble se marie avec une harmonie qui donne l’impression que Léa Delmas a réellement exister. Régine Deforges nous offre un second tome haletant, ne laissant aucun répit à son lectorat entre horreur et plaisir, haine et amour. La richesse de l’intrigue nous tient en haleine du début à la fin, nous tient éveillés, nous fait pénétrer dans l’histoire.
Tout l’intérêt de suivre les aventures de Léa tient dans le fait qu’elle possède encore sa part d’enfant, qu’elle découvre chaque jour un peu plus la réalité de la vie : nous découvrons à travers ses yeux la réalité de cette guerre. Léa navigue entre le monde de la Résistance à travers ses engagements mais aussi le monde de la Collaboration, active ou passive, en étant en contact avec François Tavernier dont le rôle reste flou. Si on sait au fond de nous que François est du côté de la Résistance, Léa, elle, doute et c’est ainsi que nous pouvons la suivre dans cette danse macabre, cette course à l’information, aux secrets, aux gens à démasquer. Et, surtout, nous la suivons à travers la compréhension complexe d’une France occupée où tout n’est pas noir ou blanc, où la survie prend facilement le dessus sur le choix d’un camp ou d’un autre. Le cas de Raphaël Malh, notamment, cet écrivain égoïste qui vend ses ennemis comme ses amis est l’incarnation de cette survie, du « moi » avant « le peuple ». Léa nous aide à comprendre chaque aspect de la guerre à mesure qu’elle intègre ce qu’il se passe autour d’elle.
Et suivre Léa est d’autant plus exaltant que c’est une figure passionnée. Au-delà de son caractère de petite fille égocentrique, elle ressemble à chacun par son côté vivant, par ces moments où elle dévore la vie comme les victuailles. Par son attachement à la terre qui l’a vue naître. Ce n’est pas son caractère auquel nous nous identifions mais à ce qui a façonné l’ensemble de son être : nous venons tous de quelque part et nous sommes tous dotés de réflexes vitaux, nous mangeons, nous buvons, nous nous gorgeons du contact d’autrui, qu’il soit charnel ou autre. Nous sommes humains avant d’être des êtres intégrés dans une société.
Très sombre, ce second tome va encore plus loin dans la description du panel de choix faits par les Français sous l’occupation et de la façon dont ont été traités les gens au fil des épisodes historiques. De l’occupation où les résistants étaient parfois vendus par leurs voisins jaloux à la libération de Paris où ces mêmes voisins se sont empressés de vendre les femmes à tondre. Ce tome met en relief toute l’horreur de la guerre, non pas à travers le sang et les morts mais à travers la nature humaine qui se plait à regarder l’autre souffrir, qui se plait à dénoncer l’autre pour ne pas attirer l’attention la prochaine fois qu’il faudra désigner un coupable, ou encore à travers ceux qui abandonnent et perdent la foi.
Mais ce tome met aussi en avant l’humanité, l’entraide, la solidarité. Il met en avant l’espoir qui persiste malgré les échecs, les morts qui se succèdent.
Régine Deforges m’a transportée dans ce tome et a su me faire vibrer. Elle a su me faire frémir, sourire, espérer. Son travail de documentation est encore une fois remarquable et m’a à nouveau donné envie d’aller plus loin, de fouiller au cœur de la guerre pour comprendre, apprendre et transmettre.
Les avis des Accros & Mordus de Lecture