Les institutions financières, comme les entreprises d'autres secteurs, se déclarent toutes engagées dans leur transformation « digitale ». Pourtant quand Forrester interroge leurs décideurs, le constat est beaucoup plus nuancé et les initiatives en cours paraissent plus tenir de l'évolution cosmétique que d'un changement en profondeur.
Le principal résultat de l'enquête menée auprès de 1 600 responsables métier et informatiques de sociétés nord-américaines et européennes est l'état des lieux de la transformation dans ces structures. À un bout du spectre, 22% d'entre elles n'ont encore rien entamé, tandis que de l'autre côté, presque autant (21%) considèrent en avoir terminé. Cette dernière affirmation fait bondir l'analyste Ted Schadler qui estime que le propre de l'ère « digitale » est qu'elle induit un état de remise en question permanente.
Par ailleurs, il exprime de sérieux doutes vis-à-vis des 56% restant, qui affirment donc être actuellement en plein chantier. Le fait que, notamment, seulement un tiers des banques et compagnies d'assurances faisant partie de l'échantillon aient pris la peine d'inclure la transformation du marketing dans leurs plans lui semble révélateur de démarches de modernisation aux ambitions trop limitées pour répondre aux vrais enjeux. L'idée qu'il faut remanier l'entreprise de fond en comble n'est pas encore passée.
Ces conclusions rejoignent ce qu'on peut observer autour de soi en tant que consommateur. Certes, les outils numériques se développent – applications mobiles, signature électronique, ouverture de compte à distance… – et rendent les opérations plus faciles. Mais qu'ont fait les acteurs de la banque et de l'assurance pour mieux prendre en compte les attentes du client « digital » ? Où est, par exemple, le conseil personnalisé, délivré au bon moment, prêt à être mis en œuvre d'un geste, sur n'importe quel canal ?
Le problème de fond, que j'abordais déjà hier sous un angle différent, tient au manque de lucidité des dirigeants face aux mutations qui affectent l'environnement dans lequel évoluent leurs entreprises, surtout dans le secteur financier. La faible culture technologique de la plupart d'entre eux – quand il ne s'agit pas d'une aversion pure et simple à l'informatique – les empêche de prendre conscience de la capacité de l'innovation technologique à permettre d'envisager leur métier d'une toute autre manière… qui, incidemment, est celle que leurs clients demandent ou demanderont bientôt.