Je vais avoir un peu de mal à parler de ce livre, car j’ai passé les 3/4 de ma lecture à me demander si j’appréciais ce que je lisais, tant la frontière semblait floue dans les lignes de ce roman entre la réalité et l’onirisme…. et que j’ai parfois du mal avec le fantastique et l’onirisme en littérature. Et je vais avoir encore du mal à vous expliquer pourquoi, au final, ce roman m’a laissé tremblante et conquise, à la fin, sans rien vous dévoiler de l’intrigue et des ressorts mis en place par Diane Peylin. Bref, un billet pas facile facile à écrire… merci Diane Peylin pour le challenge !! Mais reprenons au début… J’ai acheté ce roman au Printemps du livre de Montaigu, sur la foi de chroniques élogieuses vues furtivement sur internet. Et puis j’aime bien, lors de ce salon, faire au moins un achat impulsif. J’avais vu également que Diane Peylin devait dédicacer son livre chez Les Fringales littéraires, ce qui me semblait aussi de bon augure. Dans les premières pages du roman, nous rencontrons Emma. Nous sommes à l’été 1986. La jeune fille a dix-neuf ans et est négligée depuis l’enfance par ses parents. Elle rencontre un beau soir, près de la Grande roue, Marc, de dix ans son aîné. Marc l’appelle sa poupée, et la jeune femme se love dans cet amour tout chaud qui l’enveloppe. En parallèle, nous faisons connaissance avec Tess, jeune femme sans mémoire qui erre dans les rues d’une ville inconnue, de David l’homme à tout faire qui ne sait plus qui il est, et de Nathan, ce jeune homme convoqué régulièrement par Field, ce flic tenace qui cherche toujours la mère du garçon disparue. En tant que lectrice, j’ai eu de l’empathie très vite pour le personnage d’Emma, qui se laisse peu à peu enfermer dans un amour à la fois réconfortant et inquiétant, puis pour David, cet homme en manque de repères qui se prend d’affection pour la famille pour laquelle il travaille comme saisonnier. Puis rapidement, quelque chose dans l’errance de Tess, dans les questionnements de Nathan et Field déstabilisent… J’ai pensé au roman L’emploi du temps de Michel Butor, et à l’impression qu’il m’avait fait étudiante. Voilà donc où nous en étions… Diane Peylin nous demandait de perdre nos repères… et j’ai mieux compris tout à coup sa dédicace… Bienvenue dans ce labyrinthe où les jours obscurcissent les nuits… Mais cette perte de repères, le flou dans lequel elle nous entraîne, ne nous empêche pas de basculer brutalement dans une froide réalité, lorsque la première violence a lieu. Voilà donc où nous en étions… Je ne vous en dirai pas plus mais j’ai terminé ce roman tremblante, et impressionnée. Je me suis faite la remarque intime de combien le manque d’amour pouvait mettre en danger les enfants délaissés. Et je suis heureuse de cette découverte littéraire qui me donne à penser que la littérature n’est pas morte, que certains auteurs et éditeurs osent dépasser les marges et la facilité. Bravo pour ça à Diane Peylin et aux Escales !
Editions Les Escales – janvier 2018 –
J’ai aimé ce livre, un peu, beaucoup…
Publicités« Elle est émerveillée. Qu’un homme comme Marc ait pu s’intéresser à elle, c’était inespéré. Elle, la discrète qu’on ne remarquait pas, qui servait d’amie ou d’alibi pour arranger les copines, dont les professeurs oubliaient souvent le prénom, que les garçons voulaient approcher seulement pour vérifier la couleur de son pubis de rousse, que ses parents fuyaient lorsqu’elle prenait trop de place. Elle est émerveillée que cet homme de dix ans son aîné puisse l’aimer. Elle est sa poupée et il s’occupe d’elle, l’habille, la nourrit, la guide. Elle voulait travailler, pour elle aussi ramener de l’argent, mais il lui a dit que ce n’était pas la peine, qu’il préférait la savoir à la maison, qu’elle n’avait pas à s’inquiéter, qu’il gagnait bien sa vie et qu’il s’occuperait de tout. Il s’occupe de tout. Emma sourit. »