Mardi 24 avril, débutait à Bruxelles la deuxième conférence de donateurs pour l’avenir de la Syrie. Organisé par l’Union européenne et les Nations Unies, cet événement visait à mobiliser une aide humanitaire pour les Syriens qui se trouvent dans le pays, mais aussi pour ceux réfugiés dans les États voisins.
Alors que le conflit syrien entre dans sa huitième année, plus de 13 millions de personnes ont aujourd’hui besoin d’aide humanitaire et plus de 5 millions de réfugiés sont déplacés à l’extérieur du pays. Outre l’assistance humanitaire se pose une autre question cruciale : quelles mesures pourraient être prises pour mieux assurer la protection des civils en Syrie ?
Durant cette conférence, Dominik Stillhart, directeur des opérations du CICR, a pris la parole au nom du CICR et n’a pas hésité à rappeler que « les humanitaires peuvent soigner le patient, mais seuls les Etats peuvent le guérir » :
« Excellences, Mesdames et Messieurs,
Je vous remercie de donner l’occasion au Comité international de la Croix-Rouge de prendre la parole devant vous aujourd’hui.
Comme vous le savez, le CICR est présent en Syrie depuis le début du conflit ; chaque jour, il est témoin de l’effondrement d’un pays, de toutes ces vies détruites.
Je ne vais pas vous rappeler ici les faits et les chiffres qui se cachent derrière cette tragédie. Nous ne les connaissons que trop bien.
Ce qu’il faut savoir, c’est que la population est à bout. Les habitants sont usés par cette guerre qui n’en finit pas. Une guerre qui ne semble pas avoir de limites.
Le conflit syrien est un conflit complexe, dans lequel de nombreux acteurs sont impliqués : des États, des groupes armés, des milices, des forces d’autodéfense – mais aussi ceux qui les conseillent ou qui agissent pour leur compte.
Cette multitude d’acteurs conduit à une diffusion de la responsabilité qui, en fin de compte, ne permet plus de distinguer le vrai du faux, la vérité du mensonge.
Il est d’une importance cruciale que les États – ainsi que les autres acteurs impliqués – usent de leur influence pour apaiser la situation au plus vite.
Autrement dit, les États qui soutiennent les parties au conflit syrien doivent :
– Premièrement, clarifier les responsabilités : qui est responsable de quoi et pour le compte de qui ? L’ambiguïté ne fait qu’accroître le risque de violations du droit international humanitaire.
– Deuxièmement, renforcer la redevabilité. Les États doivent mettre en œuvre des procédures claires permettant de consigner les cas de violations présumés et ensuite enquêter sur ces cas.
– Troisièmement, encadrer plus rigoureusement les transferts d’armes aux parties suspectées de commettre des violations du droit international humanitaire.
Ce ne sont là que trois des dix recommandations que le CICR a adressées aux parties au conflit et aux États influents.
En clair, aucun soutien ne doit être accordé aux belligérants qui ne respectent pas les lois de la guerre. Sans respect, pas de soutien. Cette règle simple a le pouvoir de sauver des vies.
Les États qui soutiennent les parties au conflit – au même titre que les États influents – ont la responsabilité morale et juridique de protéger les personnes vulnérables, les blessés, les déplacés et les détenus.
Mesdames et Messieurs,
À seulement quatre heures et demie de vol d’ici, des dizaines de milliers de personnes vivent dans la peur et dans l’incertitude.
Certaines survivent dans des abris de fortune ou dans leurs maisons à moitié détruites. D’autres croupissent dans des centres de détention. D’autres encore dorment dehors.
C’est l’avenir de toute une génération que l’on est en train de sacrifier. Avec des enfants qui grandissent en ne connaissant que la peur et l’incertitude, les bombes et les balles.
Rappelons qu’en Syrie, les civils sont les premiers à être pris pour cible alors qu’ils devraient être les premiers à être protégés.
Devant une telle tragédie, peut-on se prévaloir d’une quelconque autorité morale tout en restant les bras croisés ?
Non. Bien sûr que non. Les États ont une part de responsabilité, nous avons tous une part de responsabilité. Chacun à sa façon, chacun à son niveau.
Les humanitaires peuvent soigner le patient, mais seuls les États peuvent le guérir.
Mesdames et Messieurs,
Cette guerre n’est pas terminée. Les souffrances perdurent. Elles ont même empiré ces derniers mois.
Au nom de la morale et de la civilisation, il est plus que temps d’agir.
Ce que demande le CICR est simple :
– Plus de protection pour les personnes vulnérables.
– Plus de respect du droit international humanitaire à travers des actions concrètes. Rappelez-vous : pas de respect, pas de soutien.
– Plus de courage politique pour sortir la Syrie de l’impasse et redonner à tous les Syriens l’espoir auquel ils aspirent et dont ils ont besoin.
Je vous remercie. »
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