Voici un album qu’il m’aura fallu apprivoiser, mais le jeu en valait la chandelle ! Et pourtant, les chansons durent toutes en moyenne deux ou trois minutes. D’où cette carapace provient-elle alors ?
Les Young Fathers – trio écossais composé de Alloysious Massaquoi, Graham Hastings et Kayus Bankole – distillent leur univers depuis leur premier album DEAD, acclamé en 2014 et succédé l’année suivante du tout aussi savoureux White Men Are Black Men Too.
J’avais personnellement un peu contourné leur parcours, alors même que je me suis retrouvé devant leur collaboration « Voodoo in my blood » sur l’EP Ritual Spirit de Massive Attack, sorti début 2016. Il y eut également la bande originale de T2 Trainspotting. J’étais malheureusement resté sur ma faim et n’avais pas persévéré…
Ainsi arrive le troisième album studio du groupe, le premier auquel je m’attache complètement. Les différents singles publiés en amont de sa sortie ont chacun dévoilé une facette de cette nouvelle œuvre. D’abord, « Lord » m’a permis de rompre avec l’image que je m’étais faite de la musique du groupe, et c’est un morceau qui touche de suite.
« In my view » m’a ensuite redescendu de mon petit nuage mais c’était sans compter sur le troisième extrait « Toy », lequel m’a immédiatement raccroché au nouveau Young Fathers. Dès lors, je savais que Cocoa Sugar allait me plaire, surtout avec ce visuel détonnant, presque dérangeant même tant ce visage est a-normal, résultat du travail conjoint de la photographe Julia Noni et du directeur de création Tom Hingston.
Dès les deux premiers titres « See how » et « Fee fi », les voix du trio sont un mélange de cacophonie, de tribalité, de masse vivante et vivifiante, sur une musique aussi recherchée que primaire dans sa conception. Il ne s’agit résolument pas de séduire l’auditeur, si non de l’envoûter. Cette tâche est bien plus ardue, et risquée même. Mais pour celui ou celle qui essaie de percer la carapace, le résultat est somptueux ! Rythmes, mélodies, voix : tout a son importance, tour à tour, ou ensemble. Écoutez par exemple le magique « Tremolo ».
Qui, en 2018, peut proposer un tel univers ? S’agit-il de hip-hop, d’électronique, de black music ? Ne cherchez pas, la réponse est certes complexe et mystérieuse mais elle se trouve à Édimbourg et résonne fort heureusement bien au-delà de l’île de Grande-Bretagne.
Cocoa Sugar est exactement la même chose que la photo de couverture : la voyez-vous atroce et effrayante ? Ou alors magnifique et inclassable ?
(in heepro.wordpress.com, le 19/04/2018)
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