L'année dernière a été marquée par un excellent environnement économique :
la croissance mondiale a accéléré et l'inflation est restée plus modérée qu’attendu. Cet environnement a permis aux entreprises de dégager de solides bénéfices, tout en incitant les banques centrales à rester accommodantes. Ces facteurs, associés à une faible volatilité, ont permis de créer un cercle vertueux pour les investisseurs.
Ce cercle vertueux semble néanmoins terminé. En effet, la dynamique économique s’est dégradée depuis le début de l’année, entre perspectives de ralentissement de la croissance et hausse de l'inflation. Cette dernière pourrait accélérer à court terme, tandis que certains facteurs fondamentaux limitent sa progression à long terme. Parallèlement, la croissance mondiale qui montre des signes de ralentissement, pourrait être impactée par le resserrement monétaire. Les marchés pourraient donc être doublement pénalisés par la baisse de la croissance et la hausse des taux, associées à une volatilité plus forte et des rendements ajustés du risque plus faibles. Les risques de correction demeurent élevés et la plupart des actifs sont chers. Les alternatives liquides offrant une faible corrélation à l'ensemble des marchés devraient donc être privilégiées au cours des prochains trimestres. Si les baisses d'impôts de l’administration américaine pourraient aboutir à une hausse de l’emploi, les pressions sur les salaires devraient quant à elles amener la Fed à resserrer davantage sa politique monétaire, au risque de provoquer l’entrée dans une période de stagflation.
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La récente correction des marchés ne doit pas être perçue comme le début d’une tendance baissière, mais plutôt comme une phase de consolidation. Les fins de cycles s’accompagnent généralement d’une baisse des spreads de crédit et d’une inversion de la courbe des taux ; puis d’un pic des actions avant de se terminer en récession. Les marchés ont semble-t-il franchi la première étape. Tout en ne montrant aucun signe de panique, le marché des obligations d’entreprises a sous-performé au premier trimestre. Les spreads semblent au plus bas et les défauts sur le segment « high yield » devraient augmenter au fur et à mesure que le cycle du crédit se retourne. La deuxième étape pourrait être franchie dans le courant de l’année.
Un nouvel aplatissement et une inversion de la courbe des taux américains au second semestre sont envisageables. Bien que les signaux de fin de cycle soient passés à l’orange, les investisseurs restent focalisés sur la bonne tenue du contexte économique. Sur les actions américaines, les PER corrigés des variations de cycle sont au plus haut depuis la bulle Internet et n’avaient jamais été aussi élevés auparavant. Le graphique ci-dessous illustre l’importance de ce facteur : en associant niveaux de valorisation avec la courbe de taux américaine, la probabilité d'une récession aux États-Unis n’est pas négligeable. Les actions vont probablement atteindre un sommet cette année, car les étapes évoquées précédemment semblent déjà en partie éprouvées ou proches de l’être.
Quels éléments permettraient toutefois de prolonger le cycle actuel ? Tout d’abord, une baisse de l'inflation, liée à une plus faible dynamique salariale ou à une hausse de la productivité, atténuerait les risques décrits ci-dessus en incitant les banques centrales à maintenir des taux bas. Deuxièmement, une nouvelle baisse du dollar permettrait d’assouplir les conditions de financement d’une économie mondiale déjà très endettée, rendant le resserrement monétaire de la Fed plus facile à digérer. Dans le cas contraire, les investisseurs pourraient jouer la carte de la sécurité en préparant leurs portefeuilles à un scénario plus défavorable. Savoir limiter les risques de corrélation et de liquidité devient essentiel lorsque les marchés approchent de leur pic.
A propos de l'auteur : Witold Bahrke est stratégiste chez Nordea Asset Management.