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Chômage et précarité de l'emploi en France

Publié le 10 avril 2018 par Raphael57
Chômage et précarité de l'emploi en France

Après avoir analysé la réalité de la situation économique au sein de la zone euro, je souhaiterais aujourd'hui vous présenter la situation sur le front de l'emploi en France. Ce d'autant plus qu'il s'agit d'un prolongement de mon billet sur la situation financière des ménages français. Chômage, précarité, faibles compétences, croissance en berne... Tout un programme, que vous pouvez aussi retrouver dans mon nouveau livre, Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l'économie ! (Ellipses, 2018).

La situation actuelle sur le front du chômage en France

En France, selon l'INSEE, le taux de chômage au 4e trimestre 2017 s'élevait à 8,9 % de la population active, son plus bas niveau depuis début 2009 :

Chômage et précarité de l'emploi en France

[ Source : INSEE ]

Mais le taux de chômage ne dit rien des personnes inactives au sens du BIT mais qui souhaitent travailler, le halo de chômage. Ce dernier s'élevait tout de même à près de 1,5 million de personnes !

Chômage et précarité de l'emploi en France

[ Source : INSEE ]

En ce qui concerne le taux d'emploi, on note une légère amélioration :

Chômage et précarité de l'emploi en France

[ Source : INSEE ]

Quant aux personnes de plus de 50 ans à la recherche d'un emploi, leur situation est tout simplement désespérante (désespérée ?), mais ce sujet n'attire guère la lumière des grands médias :

Chômage et précarité de l'emploi en France

[ Source : INSEE ]

Mais évoquer le chômage uniquement sous l'angle de son taux est une pure vision de techniciens (technocrates ?), puisque l'on occulte de la sorte toutes les questions de qualité de l'emploi et de déclassement professionnel... Pourtant, chacun sait bien qu'avoir un emploi pour lequel on est surqualifié n'est pas une bonne nouvelle ni pour son titulaire ni pour l'économie dans son ensemble. De plus je fais une différence entre travail et emploi, le premier n'étant que la déclinaison moderne du tripalium dont il est issu... et que l'on cherche à généraliser comme en témoignent les multiples attaques victorieuses contre le Code du travail !

Le CDD contrat (massif) d'embauche

Certes, le CDI est encore la norme si l'on regarde le stock de contrats de travail :

Chômage et précarité de l'emploi en France

[ Source : INSEE – Enquêtes Emploi 2016 ]

Mais en termes de flux, c'est le CDD qui s'impose par KO :

Chômage et précarité de l'emploi en France

[ Source : ACOSS et DARES ]

D'aucuns y voient le signe d'une peur de faire un mauvais recrutement et préconisent alors de dépouiller le CDI de ses dernières garanties, bref de précariser encore plus le contrat de travail. On peut alors se demander à quoi servent les sommes colossales englouties par les cabinets de recrutement - censés repérer mieux que l'entreprise les entreprises elles-mêmes les bons profils...

Le pire est certainement que la part des contrats en CDD de moins d'un mois a beaucoup augmenté depuis le début des années 2000 :

Chômage et précarité de l'emploi en France

[ Source : ACOSS et DARES ]

L’économie tirée vers le bas

Bien entendu, personne ne nie les  nombreuses difficultés sur le marché du travail en France, qui vont être aggravées par l'ubérisation, la robotisation et la disparition des emplois intermédiaires. Mais la piste de la flexisécurité est une chimère, car le fonctionnement du marché du travail en France ne sera jamais identique à celui du Danemark (référence en matière de flexisécurité), ne serait-ce qu'en raison du faible taux de syndicalisation en France contre près de 70 % au Danemark. De plus, le construit social n'est pas le même (vous savez notre histoire que tant de gouvernants oublient à dessein pour que la mondialisation soit heureuse...), puisqu'au Danemark c'est le consensus qui est recherché notamment en matière d'emploi.

Or, faut-il rappeler qu'avec un contrat précaire, les chances pour un salarié de pouvoir emprunter auprès d'une banque pour financer l'acquisition d'un logement sont pratiquement nulles ? Et on ne parle même pas de toutes les autoentreprises, qui servent souvent de palliatifs à ceux qui ne trouvent plus d'emplois salariés. Ainsi, après avoir rendu évanescent les rêves de stabilité financière des salariés, voilà que l'on rend caduc leurs ambitions de stabilité sociales. Il est vrai que Laurence Parisot y voyait simplement une loi de la nature, lorsqu'elle déclarait que "la vie la santé, l'amour sont précaires, pourquoi le travail échapperait-il à cette loi ?"

Parmi les problèmes que connaît la population active en France, il y a d'abord un manque de connaissances, au sens le plus noble de ce mot, qui est le fruit d'une politique d'instruction défaillante. On ne cesse de faire croire à des jeunes qu'ils seront quelqu'un avec plusieurs années d'études dans l'enseignement supérieur, alors même que les savoirs demeurent pour la plupart d'entre eux parcellaires et mal assimilés (Cf. enquêtes PISA, TIMSS...). Ils découvriront alors qu'ils ont été bercés d'illusions par les Trissotins modernes du ministère de l'Éducation nationale, qui ont "oublié" que l'école devait avant tout former des citoyens libres et éclairés (Cf. Condorcet) et non de la main-d’œuvre pour les entreprises !

Et cela ne s'arrangera pas tant que l'on continuera à donner aux compétences, pourtant si vite périmées, le primat sur les connaissances, ce qui se confirme déjà par la substitution du coach au professeur-animateur social... Et malgré cela, des enquêtes comme PIACC montrent que les compétences de la population active sont faibles en France. En fin de compte, une fois sortie de l'enseignement obligatoire, nombre d'élèves ne disposent au fond ni de connaissances solides ni de compétences sûres. Une vraie réussite en somme !

Or, si les créations d’emplois se font dans les services peu sophistiqués où le niveau de productivité est faible, il faut s'attendre à une croissance potentielle très faible et à de nombreux problèmes subséquemment :

Chômage et précarité de l'emploi en France

[ Source : Natixis ]

Parmi ceux-là, on peut citer une pression sur les finances publiques, en raison des baisses de cotisations sociales prises en charge par l'État dans l'espoir de baisser le coût salarial des personnes peu qualifiées et ainsi de créer davantage d’emplois pour eux.

Pour conclure en quelques mots : la flexisécurité conduira à des emplois plus précaires, à une baisse des salaires et ce faisant des conditions de vie bien plus difficiles pour nombre de travailleurs. Mais le gouvernement pourra se targuer d'avoir atteint le plein-emploi. Est-ce vraiment cela le progrès qu'on nous a tant vanté ?

P.S. : l'image de ce billet provient de cet article du site ses-noailles.


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