Amélie Plume a un projet, celui de comprendre pourquoi il lui a été difficile de trouver son chemin, de le faire, alors que l'image d'elle que lui renvoient les autres n'est pas celle-là. Pour y parvenir, elle va remettre ses pas dans ceux de son enfance, et, même, de son adolescence.
Quand on fait le chemin inverse à celui que l'on a pris, il n'est pas rare que l'on retrouve le fil perdu en cours de route. Amélie Plume va peut-être ainsi trouver une réponse à sa double question lancinante: pourquoi avoir été partagée, pourquoi toujours cette envie de partir?
Elle n'en est pas à son coup d'essai d'écriture pour y voir plus clair: elle a déjà commis quatorze livres avant celui-ci. Mais celui-ci est particulier. Il devrait lui révéler des mouvements plus profonds que les précédents, à partir de deux approches, l'une horizontale et l'autre verticale.
L'approche horizontale est géographique: elle va faire un tour du côté de la terre de [son] enfance, à commencer par La Chaux-de-Fonds, sa ville natale, pour se rendre d'abord dans ce qui fut le Jura bernois, puis dans le Jura neuchâtelois, où se trouve La Brévine, un fantasme:
Peu ou pas de souvenirs d'enfance dans ce village, sinon qu'il y faisait très froid et que sa basse température était une référence météorologique capitale pour les écoliers de la région qui étaient dispensés d'école si elle atteignait - 40 degrés.
Son port d'attache reste toutefois Genève dans cette quête d'elle-même. Depuis là, pour faire son tour, elle renonce à la voiture, car elle a peu d'entrain à conduire. Elle jette son dévolu sur le train et réalise un vieux rêve, celui de prendre un abonnement général, un AG, son AG.
Le lecteur charmé l'accompagne dans son pèlerinage aux sources, sept dizaines d'années plus tard, et même un peu plus. Il découvre sa prédilection pour l'altitude afin d'y retrouver le soleil et d'y échapper à la grisaille genevoise ou au stratus du plateau: est-ce cela le voile de coton?
Il ne faut cependant pas entendre l'expression au sens propre, mais au figuré. Son approche existentielle devient désormais verticale, c'est-à-dire historique. Et elle réalise son projet, auquel elle tenait et qui était, en fait, recherche d'écume, de lame de fond, de scénario original.
Elle va être servie en matière d'écume, de lame de fond. Mais le scénario ne s'avérera pas si original que ça, même s'il sera d'un romantisme que la réalité démentira. Venue à bout de son projet, non sans avoir égayé le lecteur par sa vision singulière des choses, elle peut lever le pied:
Oui, qu'attendre encore pour se prélasser au soleil couchant?
Francis Richard
Un voile de coton, Amélie Plume, 112 pages, Zoé (sortie le 5 avril 2018)
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