Je crois avoir entendu parler mon père de l'histoire suivante. Je ne suis pas sûr que qui que ce soit, en dehors de moi, l'aie entendue. Un de ses élèves lui avait envoyé une lettre curieuse. Peu après l'élève s'était suicidé. J'en déduis que c'était un appel à l'aide. Et que mon père devait sembler quelqu'un qui peut entendre ce type d'appel. Et c'était probablement le cas, puisqu'il n'avait pas enseveli l'accident dans son inconscient. Mais, il y a cinquante ans, la distance élève enseignant était infranchissable. Et il ne pouvait pas y entrer l'émotion. Il est surprenant d'ailleurs qu'un élève ait pu penser autrement. Toute la question du changement ne serait-elle pas là ? Un signal, mais nous n'agissons pas. Une situation que la société n'a pas prévue ? Qu'elle nie ? Et ce peut être un faux signal. La menace de suicide peut être manipulation. Que faire ?
Tout commence par un paradoxe, une bizarrerie : il y a quelque-chose qui ne tourne pas rond dans un homme ou un groupe humain. SOS ? Il faut s'en assurer. Malheureux ou pervers ? Ensuite, voici comment j'interprète la théorie d'Edgar Schein à la lumière de mon expérience.
Seule une recherche personnelle peut nous faire passer de malheur à bonheur. Mais, nous ne cherchons pas. Et quand nous nous mettons à chercher, nous nous égarons. Parce que la solution est là où nous ne voulons pas regarder. Mais, elle est évidente une fois acceptée.
Il suffit de comprendre cela pour que le monde change de couleur. Seulement, celui qui se noie n'a plus sa tête à lui. Pour pouvoir l'aider, il doit vous accepter comme secouriste. S'il se confie à vous, vous avez fait le plus difficile. Ensuite, il faut lui expliquer qu'il y a une solution à ses tracas, mais pas où il le pense. Donnez lui des exemples de gens qui ont rencontré sa situation. Ce n'est jamais parfaitement le cas, mais ça stimule le démarrage de son enquête. Et quand il a démarré, c'est quasiment gagné.