Magazine Culture

Fragments de Nuit, inutiles et mal écrits : 52-53-44

Par Blackout @blackoutedition
Fragments de Nuit, inutiles et mal écrits : 52-53-44

Photo de Simon Woolf

Pour le livre de Richard Palachak, "Kalache", c'est par ici : KALACHE

Fragments de Nuit, inutiles et mal écrits : 52

Tout d'un coup, les dégrafées se levèrent et se mirent en ligne devant la première table venue, face à trois têtards affalés dans leurs trônes tels de Gros-Dabo. Ces torche-culs décérébrés dévoraient des yeux les misérables esclaves debout côte à côte, mutiques et clignots rivés sur le sol. Il y en avait en combi résille, en string ouvert à lanières, en guêpière à fines bretelles, en bodystocking opalescents, puis tout un tas d'autres bouts de ficelle fluo coruscants. Chacun fit son choix en désignant sa nouvelle bobonne du doigt. Et les paillasses de nuit répondirent illico à l'appel, en venant s'asseoir sur leurs nouveaux locataires de lune de miel.

Fragments de Nuit, inutiles et mal écrits : 53

– En retournant au bar, je tourne la tête en direction du dancefloor et vise un gamin qu'a l'air à cran, poings et mâchoire serrés, tendu comme un ressort. Et tout à trac, il se rue sur une banquette en bord de piste et se jette sur un autre moutard affalé entre deux mominettes. V'là-t-y pas que le pigeonneau récolte une pluie de bourre-pif sans pouvoir en placer un. Alors par réflexe, j'appelle au talkie et cours chopper le cogneur en culotte courte. – Pourquoi t'appelles au talkie quand y'a qu'un gosse à vider ? – Parsk'en cas de peignée t'appelles. C'est la règle d'or, la base de ton taf, un commandement de survie. Tu sais jamais ce qui peut se passer. – Du foutre ! Y s'est passé quoi ? – J'ai agriché le morveux par le colbac et l'ai traîné comme un colombin jusqu'à la porte d'entrée, que j'ai ouvert avec son tarin. Une fois rétamé au sol, je l'ai savaté à grands coups de tartines dans la tronche et dans le bide. Le môme a rapidement perdu connaissance. – Après c'est toi qui me dis qu'on n'a pas le droit de taper ? Ça me dépasse, Kalache... Et pourquoi eske tu l'as giclé par la porte d'entrée ? Y'a bien deux sorties de secours, dans la grande salle ? – J'ai pété les plombs, Felicio. Pas réponse à tout... Mes dents faisaient des claquettes et la patronne hurlait à la chienlit tandis que les clients se tournaient les sangs. Quant à Luc, en faction devant la porte, il a pas moufté. Mais je voyais bien dans son regard plein de reproche et de consternation qu'il n'en pensait pas moins. – J'imagine. Et ça s'est terminé comment ? – Les papillons de nuit sont tombés de la lune.

Fragments de Nuit, inutiles et mal écrits : 54

Le règne de la nuit revendiquait son régime de frimas, de crachin et d'obscurité, là où le jour avait leurré Gino de rayons chauds et caressants. Le parc autrefois papillotant sous les cris joyeux des moutards, n'était plus qu'un cortège d'ombres encore plus noires que les eaux du Danube, sur un piteux sentier dépourvu de tout lampadaire. Et pas un bruit, plus la moindre enluminure, aucune âme qui vive dans ce couloir de la mort où le vent terrassait de ses coups de fouet le visage maudit de ce pauvre Gino, sidéré de fond en comble. Alors ne pensez pas que la peur se fût emparée de lui, mais plutôt la sensation d'avoir échu dans une dimension fantomatique, une sorte d'enfer glacial et désert, un piège à la con maboul où chaque humain plongeait systématiquement les yeux fermés, toujours attiré par un souvenir prénatal de voluptueuse chaleur... et le chant macabre de la lune maternelle.

Tweeter

Suivre @blackoutedition

Fragments Nuit, inutiles écrits 52-53-44

© Black-out


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Blackout 292 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines