Critique de Vera, de Petr Zelenka, vu le 20 mars 2018 au Théâtre de Paris
Avec Karin Viard, Helena Noguerra, Lou Valentini, Rodolfo De Souza, Pierre Maillet / Jean-Luc Vincent et Marcial Di Fonzo Bo / Clément Sibony, dans une mise en scène de Marcial Di Fonzo Bo
Tout me tentait. Le thème, cette femme qui marche allègrement sur des cadavres et qui connaîtra une chute brutale et douloureuse ; la distribution, Karin Viard en tête, que j’avais hâte de découvrir sur les planches ; la mise en scène dont l’aspect burlesque et délirant éclatait à travers les photos ; Di Fonzo Bo, dont la mise en scène de Démons, bien que pas assez poussée à mon goût, me laisse quand même un souvenir marquant. Tout cela devait donner lieu à un grand spectacle qui aurait soulevé les foules se précipitant au Théâtre de Paris. J’avais tout faux.
Vera est une directrice de casting qui a le vent en poupe : au début du spectacle, sa société est rachetée par des Anglais qui la caressent dans le sens du poil mais ne manqueront pas de retourner leur veste au moindre faux pas. Caricaturale, Vera est une femme sans scrupule, presque sans une once d’humanité, que seule sa carrière semble intéresser. Le spectacle montre son ascension rapide et sa chute attendue, en la suivant dans son quotidien, tant professionnel que personnel.
Rapidement, on comprend que quelque chose ne va pas. Ça ne prend pas. L’histoire telle qu’elle est présentée, alourdie par des effets de mise en scène inutiles, manque d’intérêt. A trop se concentrer sur la forme, on en oublie le fond. Et la forme est pesante. Dès le début, la débauche de moyens étonne par sa complexité et sa futilité. Cachent-ils un manque d’idée de mise en scène ? Probable. L’ascenseur, les projections, les intermèdes chantés sont autant de poids ajoutés à chaque pied des comédiens qui s’enlisent peu à peu, submergés par le trop-plein d’artifices jusqu’à en oublier l’histoire.
C’est dommage, car je venais quand même voir une Karin Viard que j’admirais beaucoup et dont j’attendais une prestation hors du commun. Quelle déception de la voir si lisse, toujours en force dans les cris comme dans la gestuelle, comprimée dans certains costumes qui la desservent alors même qu’elle est impérieuse lorsqu’elle en change. De ce côté-là, le metteur en scène n’a pas été tendre, mais il n’a pas compensé par sa direction d’acteur, qui s’avère bien trop linéaire. Tous suivent une ligne caricaturale et sans grand intérêt, nous perdant rapidement au milieu de ces cris et mouvements incessants.
Voilà une Vera vraiment vaine.