Lorsque reviendra le printemps
peut-être ne me trouvera-t-il plus en ce monde.
J’aimerais maintenant pouvoir croire que le printemps est un être humain
afin de pouvoir supposer qu’il pleurerait
en voyant qu’il a perdu son unique ami.
Mais le printemps n’est même pas une chose : c’est une façon de parler.
Ni les fleurs ne reviennent, ni les feuilles vertes.
Il y a de nouvelles fleurs, de nouvelles feuilles vertes.
Il y a d’autres jours suaves.
Rien ne revient, rien ne se répète, parce que tout est réel.
*
Quando tornar a vir a Primavera
Talvez já não me encontre no mundo.
Gostava agora de poder julgar que a Primavera é gente
Para poder supor que ela choraria,
Vendo que perdera o seu único amigo.
Mas a Primavera nem sequer é uma coisa:
É uma maneira de dizer.
Nem mesmo as flores tornam, ou as folhas verdes.
Há novas flores, novas folhas verdes.
Há outros dias suaves.
Nada torna, nada se repete, porque tudo é real.
7-11-1915
***
Fernando Pessoa (1888-1935) – Poemas de Alberto Caeiro
– Le Gardeur de troupeaux (Poésie/Gallimard) – Traduit du portugais par Armand Guibert.