Travailleuses du sexe…un métier toujours aussi stigmatisé

Publié le 05 juillet 2008 par Ttiger

CAMPBELLTON - Doit-on encadrer, légaliser ou décriminaliser la prostitution?

C’est ce que se demande le Conseil consultatif sur la condition féminine au Nouveau-Brunswick.

L’organisme était de passage à Campbellton le 26 juin dernier dans le cadre de sa rencontre trimestrielle. Il aimerait bien pouvoir se positionner sur cette question d’ici quelques mois.

«C’est un sujet très complexe et peu discuté. C’est pourquoi il faut que l’on s’éduque avant de prendre position», explique Ginette Petitpas-Taylor, présidente du Conseil. «Quand on regarde à la question de la décriminalisation et de la légalisation, on s’aperçoit qu’il y a des défis de tous les côtés. On veut vraiment s’assurer d’avoir la bonne approche sur le sujet, soit l’approche qui supporte le mieux les femmes. On veut aussi savoir ce que les travailleuses du sexe nous disent, ce qu’elles veulent», poursuit Petitpas-Taylor, exprimant du même coup son empathie pour ces travailleuses encore souvent discriminées dans la société. «On doit changer la perception des gens à propos de ces travailleuses. Ce sont des êtres humains, des femmes, et on doit les supporter dans leur cheminement.»

Afin de procéder à son éducation, le Conseil a sollicité les services de deux chercheuses universitaires afin de comprendre les tenants et aboutissants du plus vieux métier du monde en Atlantique.

Leslie-Ann Jeffreys et Gail McDonald sont les co-auteures du livre Sex Workers in the Maritimes Talk Back. Ce dernier brosse un portrait de l’industrie de la prostitution par l’entremise des témoignages d’une soixantaine de travailleuses indépendantes de Moncton, Saint-Jean et Halifax, ainsi que d’une soixantaine d’intervenants divers (policiers, juges, médecins, etc.).

On apprend notamment que les prostitués – du moins celles interviewées – ne sont pas aussi en peine que le veut la croyance populaire. En effet, les commentaires recueillis démontrent qu’elles apprécient énormément l’indépendance et la flexibilité de leur métier. Mais ce qu’elles apprécient par-dessus tout, bien entendu, c’est l’argent que cette activité rapporte. Plusieurs d’entre elles trouvent effectivement plus logique d’opter pour la prostitution que l’assurance-emploi, laquelle rapporte trop peu pour assurer une existence décente.

À l’opposé, on y apprend également que la violence est bel et bien toujours présente dans ce domaine. Viols, menaces et agressions sont encore des réalités bien fréquentes.

De plus, la prostitution ferait toujours les frais d’une perception sociale négative (produits jetables après consommation). Les chercheuses citent en exemple le cas des prostituées portées disparues dans la région de Vancouver. «Il en fallut plus d’une vingtaine avant que la police daigne s’intéresser à la situation. Mais à l’inverse, si une secrétaire disparaissait sans raison, c’est certain qu’on monopoliserait tout le monde», a sous-entendu l’une des deux intervenantes.

Politiques

Une étude canadienne démontre que les prostitués désirent d’abord et avant tout un endroit sécuritaire pour travailler. Elles sont largement en faveur de la décriminalisation de la prostitution sans pour autant être en faveur de sa légalisation (ce qui entraînerait, selon elles, un une perte d’autonomie, de liberté). Elles seraient également majoritairement contre la criminalisation de leurs clients.

Néanmoins, il n’y a pas consensus formel sur tous ces enjeux. Les opinions divergent énormément d’une prostituée à l’autre et d’un groupe à l’autre.

François Boisvert