[Critique] GHOSTLAND

Par Onrembobine @OnRembobinefr

Partager la publication "[Critique] GHOSTLAND"

Note:

Origine : France/Canada
Réalisateur : Pascal Laugier
Distribution : Crystal Reed, Emilia Jones, Taylor Hickson, Anastasia Phillips, Mylène Farmer, Rob Archer, Kevin Power…
Genre : Horreur/Épouvante
Date de sortie : 14 mars 2018

Le Pitch :
Une mère et ses deux filles emménagent dans une maison isolée qui vient de leur être léguée par leur tante. Alors qu’elle s’installent, deux individus font irruption et les agressent sauvagement. Des années plus tard, le traumatisme de cette nuit d’horreur persiste dans l’esprit de chacun des membres de la famille. Beth, l’une des filles, a d’ailleurs préféré prendre le large tandis que sa sœur, Vera a sombré dans la folie. C’est lorsqu’elles se retrouvent réunies dans la maison où s’est produit le cauchemar, que de mystérieux phénomènes commencent à se produire, indiquant qu’une présence malveillante leur en veut…

La Critique de Ghostland :

On ne sait trop comment Pascal Laugier est devenu pour certains amateurs de cinéma d’horreur une sorte de sauveur. L’homme de la situation. Celui qui fait reluire le cinéma de genre français. Pourtant, si Laugier aime en effet manifestement faire reluire des trucs, c’est surtout son ego qui a toute son attention tant tous ses films démontrent surtout d’une capacité de plus en plus marquée à se regarder le nombril en prétendant inventer l’eau tiède. Ghostland, son nouveau « fait de gloire » ne fait pas exception et vient se positionner dans la lignée du calamiteux Martyrs, tout en cochant à peu près toutes les cases d’un genre ici réduit à une série de vieux clichés en bois vermoulu…

Maison en T

Autant le dire tout de suite : Ghostland est tout de même mieux que Martyrs. Si il est également putassier, il l’est tout de même moins, et lui au moins a l’énorme mérite de ne pas se terminer par une espèce de révélation bien moisie. Au fond, malgré son scénario plein de détours pas toujours heureux, Ghostland est plus simple. Et la simplicité, ça a du bon. Il y a aussi les actrices. Elles sont toutes très bien. Même Mylène Farmer, qui demeure la grosse surprise du long-métrage. Comment aurait-on pu se douter, après des dizaines de clips nous ayant prouvé que la chanteuse n’était visiblement pas capable de se jouer elle-même sans même parvenir à être crédible, que derrière la star maniérée se cachait une vraie actrice ? Sobre, touchante même, ici, elle est impeccable. Mieux ! Elle fait carrément profiter au film de sa force tranquille et d’une aura qu’elle trimbale avec la grâce de ceux qui ont tout vu et tout vécu. À ses côtés, Crystal Reed, Emilia Jones, Taylor Hickson et Anastasia Phillips font parfaitement le job. Et quel job ! Parce qu’on imagine facilement que ce tournage ne dut pas être simple. Avec un cinéaste complètement empêtré dans des obsessions certes glauques mais mises en image de façon totalement (ou presque) grotesque et ce scénario beaucoup moins malin que semble le penser Laugier, les actrices ont eu beaucoup de mérite et grâce à elles, le film parvient à de rares moments à sortir la tête hors de l’eau.

Chevilles tuméfiées

Le vrai problème de Ghostland est le même que celui au centre de tous les précédents longs-métrages de Laugier : il n’est que l’illustration d’une idée basique (pour ne pas dire simpliste) que le réalisateur tente de nous vendre en l’enrobant de trucs censés choquer ou révulser dans l’espoir de faire illusion. Rassuré par son statut privilégié (contrairement à Xavier Gens par exemple, que personne n’a de scrupules à critiquer avec virulence), Pascal Laugier y va gaiement et nous propose un truc à la Massacre à la Tronçonneuse, mélangé avec du Amityville et d’autres influences plus ou moins marquées mais jamais totalement digérées. Très violent, voulu glauque et malsain, Ghostland noie le poisson pendant 1h30 et sait aussi se montrer ridicule plus d’une fois. Quand il rend hommage à Lovecraft notamment. Un auteur plusieurs fois cité, que Laugier se permet d’inviter à sa table le temps d’une séquence hallucinante car complètement aux fraises (et risible). Parce que le soucis, c’est que tout ceci est pris avec beaucoup trop de sérieux. Pas recul, pas de second degré rien. N’est pas Tobe Hopper qui veut… Et si certaines images révulsent, cet effet n’est pas du tout persistant et finit par souligner avec encore un peu plus d’insistance le caractère anecdotique de l’ensemble. Anecdotique et très prétentieux car il est évident que tellement occupé qu’il était à regarder ses chevilles enfler, le réalisateur/scénariste n’a pas vu qu’il ne faisait ici que maquiller de vieux schémas avec une outrance extraordinaire, dans la bonne vieille tradition consistant à faire passer des vessies pour des lanternes. En soi, Ghostland exploite la violence graphique afin de faire diversion, alors qu’à côté se déroule une intrigue dont l’idée principale n’appelait pas forcément une telle brutalité. Ce qu’avait parfaitement compris Tobe Hooper et que la majorité de ceux qui se réclament de son influence, Laugier y compris, ignorent…

En Bref…
Rien de nouveau sous le soleil. Ghostland n’est ni si poétique, ni si éprouvant, ni si palpitant ou même intelligent, qu’on veut nous le faire croire. C’est juste un énième film d’horreur lancinant et laborieux, complètement calqué sur le modèle américain. Une œuvre opportuniste qui tente de s’approprier le style des meilleures productions du genre des années 60/70, sans bien sûr y parvenir. Reste alors quelques jump scares, Mylène Farmer donc, les actrices et le fait qu’au fond, tout ceci ne dure qu’1h30. Même si ici ces 90 minutes semblent durer une éternité…

@ Gilles Rolland

  Crédits photos : Mars Films