Bon, pour ma part, je m’en fous un peu puisque je n’achète plus Libération
depuis longtemps. Ce journal est l’archétype de la presse de bobo parisiens
défenseurs de la bien-pensance de gauche, toujours prête à enfourcher les
belles et bonnes causes avec la bonne conscience qui caractérise l’intellectuel
de Gauche et de salon.
Mais ce petit coup d’éclat est révélateur de cette manière qu’à ce type de
média de s’emparer d’un vrai problème de société en faisant passer un message
simpliste et dogmatique qui peut se résumer de la manière suivante : Les
femmes sont payées 25% de moins que les hommes, c’est scandaleux et Libération
est à vos côtés pour faire avancer la cause.
Evidemment, en ce faisant, Libération ne fait rien avancer du tout, au
contraire, il aurait plutôt tendance à énerver. Non pas pour les 50 cents
d’écart mais par cette manière d’utiliser une cause juste, en la traitant avec
simplisme et manichéisme.
C’est d’ailleurs, d’une manière générale le problème avec les sujets
« bonnes causes ». Ils sont souvent traités à l’aulne de l’émotion
générale, de l’indignation voire de la révolte ce qui exclut de facto du débat
le pragmatisme, le réalisme voire la moindre once de réflexion.
Ce bon vieux serpent de mer « l’inégalité salariale
hommes/femmes » en est un exemple frappant.
Soyons clair, il ne s’agit pas de contester le fait qu’il y a un réel
problème mais de rappeler que les causes de ce problème ne sont pas aussi
simples qu’on se plait à le répéter à longueur de médias et qu’en conséquence
les solutions non plus.
Précisons déjà que, contrairement à ce que prétend Libé, qui amalgame plusieurs problèmes très différents, à qualification et ancienneté équivalente, l’écart de salaire hommes/femmes serait tout au plus de 10 %. C’est certainement trop mais ce n’est pas 25% !
Et ces 10% ne sont établis que par déduction, en éliminant les autres
causes. Ces 10% peuvent s'expliquer par un tas de raisons qui ne relèvent pas
nécessairement d'une bête discrimination machiste de la part des
entreprises.
25% est un chiffre évidemment très approximatif (mais qui sonne bien)qui
correspond à l’écart moyen de salaires entre les hommes et les femmes toutes
situations confondues. Ces 25% trouvent leur explication dans plusieurs
phénomènes qui sont grosso-modo que les femmes sont 4 fois plus souvent en
temps partiel, qu’elles sont moins représentées dans la hiérarchie et donc dans
les plus hauts salaires et que les hommes ont, en moyenne, plus d’ancienneté et
qu’ils ont plus souvent changé de boulot ce qui s’accompagne souvent d’une
hausse du salaire.
On comprend bien qu’autant l’écart de salaire à poste, qualification et
ancienneté équivalents, peut être considéré comme le résultat d’une certaine
discrimination de la part des entreprises (même si le jugement est simpliste et
doit être considéré au cas par cas), autant tout le reste exige une analyse et
un diagnostic beaucoup plus complexe et surtout implique une responsabilité
très largement partagée par tous les hommes depuis les débuts de
l'humanité.
En amalgamant une discrimination sur laquelle il est possible d’intervenir
et le résultat d’un processus quasi ancestral qui nécessite de modifier en
profondeur les mentalités d’une grande partie de la gent masculine, certes on
se fait mousser à peu de frais, mais on laisse croire que la question est
simple à traiter, et de surcroit qu’elle ne concerne que les entreprises et
l’Etat qui devra légiférer pour obliger ces abominables discriminatrices à
changer leurs pratiques. Ce qui est évidemment extrêmement réducteur.
Sur le même sujet, et sur liberation.fr (ce n'est évidemment pas un hasard),
on trouve une tribune proprement stupéfiante écrite par « Le collectif
52 » qui est, je cite « un réseau d’entraide féminin qui vise à
l’empowerment des femmes » …tout un programme !
Cette
tribune est intitulée : « Le féminisme est-il devenu la vache
à lait du capitalisme ? »
Rien qu’en lisant le titre on s’attend à du gratiné…et on n’est vraiment pas
déçu, c’est du lourd.
Je ne résiste pas au plaisir d’en reprendre un très bel extrait :
« Et pendant que l’indépendance économique des femmes continue de
s’organiser, le marketing, cet ami intime du capitalisme, n’a cessé de
convoiter les revenus grandissants des femmes. Dans les années 90, les
femmes dépensaient 70 % de l’argent des ménages ; les multinationales ont
fait en sorte que cette proportion dépasse aujourd’hui les 85 %. De
quelle indépendance économique s’agit-il, si le capitalisme n’a de cesse de
faire dépenser plus aux femmes et de faire d’elles le moteur de la croissance
? Le féminisme est-il devenu la vache à lait du capitalisme ?
Prendre conscience de ce pouvoir économique, c’est faire un premier
pas.»
Tout y est, on imagine ces femmes, qui viennent juste d'acquérir leur
indépendance de haute lutte et qui voient fondre sur elles avec avidité et ses
grosses pattes griffues, le grand méchant capitalisme, pour les dépouiller des
(nécessairement) maigres salaires qu’elles auront eu enfin le droit de gagner
en travaillant.
Mais le meilleur reste à venir puisque le paragraphe se termine par une
question qui nous projette dans les très hautes sphères de la pensée humaine.
Accrochez-vous, ça dépote :
« Le deuxième (pas), c’est s’inscrire dans la dynamique du vouloir.
C’est repenser ses désirs. Le capitalisme va-t-il se reconstruire sur d’autres
bases, et si oui, les femmes pourront-elles prendre la liberté de faire autre
chose que de consommer aux dépens de leur liberté sexuelle ?
»
…ouah, une phrase comme ça faut la faire encadrer et l’afficher dans son
entrée (si on en a une). Et je me dis que si je ne comprend pas tout c'est tout
simplement parce que je ne suis qu'un homme.
C’est sûr que quand la femme battue par son mari, la jeune de banlieue qui
se fait insulter sous prétexte qu’elle porte une jupe, celle dont le compagnon
n’envisage pas un seul instant de passer l’aspirateur, la mère abandonnée avec
ses enfants sur les bras, l’employée qui subit les regards graveleux et les
gestes déplacés de son chef, petit ou grand, ou d’une manière générale toutes
celles qui se sentent déconsidérées parce qu’elles sont une femme…auront
réalisé que le féminisme était la vache à lait du capitalisme et qu’elles
pourront prendre la liberté de faire autre chose que de consommer aux dépens de
leur liberté sexuelle, leur situation se sera très nettement améliorée
!
Et si en plus elles peuvent payer Libération 2 euros au lieu de 2euros
cinquante, alors là, on ne veut plus les entendre se plaindre !
Pauvres femmes, leur cause mérite mieux qu’une couverture racoleuse ou que les élucubrations fumeuses de féministes doctrinaires.