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NDL, un mois 1/2 après

Publié le 08 mars 2018 par Alex75

Il y a maintenant environ un mois 1/2 de cela, le chef du gouvernement tranchait enfin. La décision d’Edouard Philippe était irrévocable. Après 50 ans de débats passionnés, 179 décisions de justice, des occupations de terres agricoles et une consultation locale, le 17 janvier dernier, le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes était enfin abandonné. Mais en ce début de mois de mars, l’Etat de droit peine à s’imposer dans l’ex-ZAD de Notre-Dame-des-Landes, toujours non évacuée par les gendarmes. Alors que le chef du gouvernement avait précisé que son évacuation par les zadistes étaient par contre une condition sine qua non et cela avant la fin de l’hiver. Et alors que des incidents, sans gravité, ont éclaté ailleurs, le 3 mars, dans la ZAD de Bure (Meuse). Et que va-t-il se passer à NDL, après l’abandon du projet, vu sous différents angles ?  Va-t-on aux devants de nouvelles difficultés, quant à l’extension de l’aéroport de Nantes ? Ira-t-on vers un autre projet d’aéroport ailleurs sur le territoire hexagonal, parce que l’on a pris cette décision-là ?  Les aéroports français sont-ils réellement saturés ? A-t-on réellement besoin d’un nouvel aéroport ? Est-ce la fin des grands projets étatiques, suite à cet abandon face à une pression populaire ? Que faire des terres agricoles de l’ex-ZAD de Notre-Dame-des-Landes ? Que faire avec les occupants illégaux de terres agricoles dans cette zone rurale et cultivée, sur le plan du cadastre ?  Et ce qui est joué à NDL est aussi plus vaste et complexe. C’est un rapport à la modernité, au progrès. Car la question posée, c’est comment on peut être moderne, tout en respectant l’équilibre environnemental sur le plan de l’aménagement du territoire ? Comment concevoir un développement sans procéder à une artificialisation des sols, grignoter sur les surfaces agricoles et détruire les zones humides en France (dont on sait qu’elles sont très restreintes) ? Et combien vont coûter 50 ans d’atermoiements de l’Etat, sur le plan financier ?  Quelles seront les compensations pour les collectivités locales ? Quelles seront les indemnisations accordées à Vinci ? Est-ce que cela sera un jour transparent ? Cela se négoce-t-il ? Que fait-on sur le plan comptable ? Autant d’interrogations sont soulevées et toujours en suspens.

Il y a un mois 1/2 de cela, avec l’abandon du projet de NDL, c’était ainsi une longue histoire qui s’achevait, presque aussi longue que la Ve République. En effet, quand la déclaration d’utilité publique ouvre ce chantier d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, en 1965, Charles de Gaulle est encore au pouvoir, à l’Elysée depuis 1958. Edouard Philippe expliquait à l’Assemblée nationale, qu’il n’y avait pas de bonnes solutions sur ce dossier qui traînait depuis très longtemps. En effet, s’il y en avait eu une, elle aurait sans doute été prise avant et que l’on ne pouvait s’avancer sur un projet divisant autant les Français, faisant si peu l’unanimité. Les critiques émanant des partisans du projet ont fusé, à la mi-janvier, les détracteurs parlant d’abandon en rase campagne, de déni de démocratie. On accusait alors le gouvernement d’avoir reculé devant les zadistes, à savoir les militants opposés au projet d’aéroport, occupant l’ex-Zone à défendre (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes. Soit un néologisme militant (ZAD) utilisé pour désigner une forme de squat à vocation politique, la plupart du temps à l’air libre, et généralement destinée à s’opposer à un projet d’aménagement, dans ce cas à Notre-Dame-des-Landes, en Loire-Atlantique (à quelques km de Nantes). Politiquement, le gouvernement est plutôt soutenu par les sondages. La réaction des Français pour la plupart n’est pas sur le fond, ne connaissant aux 3/4 pas le dossier. Mais ce qu’ils ont approuvé, c’est que c’était enfin une décision. Depuis 15 ans, c’était quand même à la une de l’actualité et c’était le symbole de cette incurie de l’Etat, incapable de prendre une décision. C’était vrai du temps de Nicolas Sarkozy et de François Hollande, Ayrault étant un élu du coin qui voulait cet aéroport. Il y a eu l’arrivée de toute une population concernée et pour les Français, c’était un symbole d’un Etat faible. Nous voulons des politiques prenant des décisions. La décision a été bien annoncée, elle tranchait non seulement un débat du passé, mais aussi par avance les débats à venir. Par exemple, un débat sensible commence à germer, à savoir la question de la rétrocession des terres aux agriculteurs, qui étaient propriétaires et qui ont été expropriés. Et qui la réclame, puisque l’aéroport ne se fait plus. Cela fait deux ans, que l’on sait qu’il ne se fera plus. En attendant, les zadistes s’organisent pour réclamer le droit de s’installer légalement sur les terres qu’ils occupent. De ce point de vue là, pour Edouard Philippe, c’était sa 1ère épreuve. C’est un ancien élu local, maire du Havre et il est parti du rapport des médiateurs. D’abord, Philippe prend cette décision sachant qu’il était pour l’aéroport et le président aussi, comme il l’a exprimé à plusieurs reprises durant la campagne présidentielle. Puis Macron a fait appel à la médiation, ayant remis son rapport et Edouard Philippe est parti avec cette décision. 80 % des élus locaux à Nantes étaient favorables au maintien du projet d’aménagement de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, sa décision étant courageuse sur le plan politique.

Etant clair qu’il a appuyé la décision dans les coulisses, en concertation avec le chef du gouvernement, Emmanuel Macron a vu le dossier sous un angle national, dans une démarche « président vert » ayant pris une dimension « écolo » au niveau planétaire. Ensuite, il a pris dans son gouvernement l’écologiste Nicolas Hulot et la raison politique claire, c’est d’être cohérent vis-à-vis de lui. C’est une association de plusieurs éléments, avec notamment une dimension politique claire insufflée par Nicolas Hulot, étant la prise de guerre d’Emmanuel Macron et qui ne voulait pas la perdre. Hulot n’aurait pas accueilli très favorablement le maintien d’un aéroport. C’est un succès politique majeur, mais sans triomphalisme pour lui, qui affirme n’avoir pas pesé dans la balance dans cette prise de décision, n’ayant jamais fait valoir aucune hypothèse. Il souhaite que les routes soient naturellement restituées à l’Etat, encore une fois dans le cadre d’un retour à l’ordre normal. Par ailleurs, c’est surtout la mort accidentelle d’un zadiste dans une tentative d’évacuation par les gendarmes, qui a réellement pesé dans la balance, ayant tétanisé l’Etat et ses représentants. Le gendarme devait-il être ou pas poursuivi, il ne l’est pas. Mais cette affaire-là pèse massivement sur le gouvernement ayant deux problèmes. D’abord, il y a celui de l’autorité de l’Etat avec plusieurs autres sujets comme Bure dans la Meuse (le traitement des centrales nucléaires), mais aussi dans l’Aveyron (un gros condensateurs électrique)… Depuis 30 ans, depuis 1986, les services de gendarmerie rencontrent des difficultés à cerner la diversité et la professionnalisation de ces populations qui ne sont pas là uniquement pour défendre la ZAD, mais parfois pour affronter les forces de l’ordre. Ce n’est pas contagieux, mais cette catégorie de population existe et c’était un risque important. Si on ne trouvait pas de solutions de sagesse, alors il fallait recourir à la force. Et les forces de l’ordre ne souhaitaient pas s’offrir le luxe d’un nouveau drame ou d’un nouvel incident. Cela a certainement pesé dans la décision. C’est une pondération des différents éléments. Et c’est ce qui avait paralysé François Hollande, qui avait expliqué qu’il ne voulait pas évacuer Notre-Dame-des-Landes. La 2e chose, c’est que le rapport du médiateur était objectif. D’ailleurs, il était assez fin dans ses analyses. Le discours d’Edouard Philippe a été très mesuré, le 17 janvier dernier. Cependant, il n’emploie pas le terme de zadistes dans son discours, mais celui d’occupants illégaux. Ce qui soulève en filigrane la question de l’évacuation de l’ex-ZAD, de l’avenir des terres occupées. Un dispositif de 200 gendarmes a été mobilisé à NDL. Après avoir obtenu l’abandon du projet d’aéroport du grand ouest, les 300 zadistes de Notre-Dame-des-Landes continuent à mener la danse. 

Les zadistes et leurs soutiens avaient appelé à converger récemment à NDL pour fêter leur victoire, incendiant en effigie un avion en carton-pâte. La remise en état de la fameuse « route des chicanes », détruite et occupée par les zadistes, se fait désormais au moyen d’un dispositif ahurissant. Mais il ne faut pas parler de « zadistes » dans un sens réducteur, car c’est un mouvement très large, rassemblant divers types d’activistes aux profils divers, si l’on peut dire. Dans le mode d’action, il y a eu une alliance de contre-expertise, de grève de la faim, de manifestations d’agriculteurs qui ont mis leur tracteur en danger, qui ont vu leur matériel saisi aussi. Ces occupants sont des architectes, des agriculteurs, des ingénieurs agronomes, des artisans, des collectifs d’élus, des écolos. Après, il y aura un débat sur l’illégalité. Des canaux de discussion seraient ouverts sur l’aménagement du territoire et l’avenir de NDL. Un projet agricole encore incertain dans l’ex-ZAD est débattu avec la préfète. Ainsi, on peut espérer une issue pacifique. Faisons de NDL, insufflait le rapport du médiateur, un lieu où l’Etat est intelligent, dans un contexte agro-écologique. Et c’est aussi une idée de ne pas évacuer par la force NDL suite à une trêve hivernale, vue sous un autre angle, les choses étant appelé à se déliter, l’ex-ZAD étant forcément appelé à se dissoudre. Si on relit le rapport du médiateur, il voudrait aussi que ces terres reviennent à l’Etat. Cependant, même si cela était noyé dans l’ensemble de son discours, Edouard Philippe y a apposé une fin de non-recevoir. Si bien que l’Etat ne va pas garder les terres, ne va pas les préempter sur le plan cadastral. Il faudra cependant négocier, ayant eu des agriculteurs expropriés. Et il faut trouver des solutions avec ces agriculteurs installés entre temps. Edouard Philippe déclare cependant, qu’il est difficilement imaginable qu’il n’y ait pas de départ à un moment donné.

Le Larzac constitue un précédent, en la matière. La lutte du Larzac fut un mouvement de désobéissance civile non-violente contre l’extension d’un camp militaire sur le causse du Larzac qui dura une décennie, de 1971 à 1981. Et qui se solda par une victoire lorsque François Mitterrand, nouvellement élu Président de la République, décida d’abandonner le projet. La lutte du Larzac est une référence historique pour de nombreux zadistes, dont ceux de l’ex-ZAD à Notre-Dame-des-Landes, qui disent s’en inspirer largement. Que ce soit entièrement pacifique, espérons-le mais cependant ce n’est pas certain, disent certains spécialistes. Quelques expulsions seront opérées avec discernement, a-t-il été déclaré récemment. Emmanuel Macron ne s’est pas encore exprimé publiquement sur le fond du dossier, mais sur le fond sécuritaire il a déclaré : « je ne veux pas voir ce genre de choses sur le territoire français ». Ce n’est pas Martine à la ferme. Edouard Philippe tend aux zadistes l’occasion de partir d’eux-mêmes. Cependant, ces-derniers n’auront pas leur victoire symbolique, si au printemps, il y a des départs. Une nouvelle période trouble a aussi été ouverte en prenant cette décision. C’est le grand risque des 50 zones où il y a déjà des crispations locales. Une liste par sous-catégories du Figaro établie par les RG montrent une diversité de risques et de troubles liés à des erreurs manifestes de dialogue et de consultation avec les populations, avec des débats. Et nous allons devoir faire face à d’autres problèmes ailleurs, comme à Bure. C’est aussi le début d’une réflexion différente sur les projets. Ce qui est quand même très frappant, c’est que la contre-expertise des citoyens s’est révélée plus pertinente. Donc, il convient d’abord avant de lancer un grand projet, de lancer une consultation technique et la prendre en considération.

C’est un premier dossier difficile, après la loi travail, sur l’écologie. Naturellement, la décision a enflammé les débats politiques, le gouvernement ayant pour la 1ère fois ressuscité une opposition inaudible depuis l’élection de Macron. Opposé au projet d’aéroport, le FN a critiqué le calendrier choisi par Philippe, la France insoumise estime que c’est la preuve d’une mobilisation juste pouvant faire céder, la droite fustige l’abandon, estimant que cela donne une mauvaise image de l’Etat. La question subsidiaire est de savoir, si l’on a vraiment besoin d’un nouvel aéroport, dans la région de Nantes. Et qu’en est-il sur le plan économique et de retour sur investissement ? Il est difficile de s’y retrouver dans le décompte des aéroports français. L’Inspection du travail en dénombre pas moins de 475, mais si l’on compte uniquement les aéroports commerciaux, l’Union des aéroports français en dénombre environ 170. La France compte ainsi un aéroport pour 358 000 habitants, soit trois fois plus qu’au Royaume-Uni, six fois plus qu’en Italie et douze fois plus qu’en Allemagne. Il faut faire la différence entre les 17 grands aéroports parisiens et régionaux, ceux qui accueillent plus d’un million de passagers par an, et les petits aéroports locaux. Les premiers, dont celui de Nantes, font des bénéfices. D’après un rapport de Bruno Le Roux, leur contribution économique s’élève à 20 milliards d’euros et ils représentent 149 000 emplois. Par contre, les autres sont en déficit chronique faute de passagers et ne survivent que grâce aux subventions publiques. Les écologistes dénoncent, depuis les années 1960, un gaspillage des ressources en France, pays pionnier et berceau de l’aviation civile et miliaire. A ce titre, est pointé une vision de l’aménagement du territoire obsolète. Mais les critiques, aujourd’hui, viennent du secteur aérien lui-même. Le Board of Airlines Representatives (Bar) en France dénonçait récemment le « nombre pléthorique d’aéroports en France dont les coûts sont finalement supportés par les compagnies aériennes opérant en France sans bénéfice pour le transport aérien dans son ensemble ».

La France a beaucoup de petits aéroports en déficit, seulement un aéroport sur cinq étant rentable. Les aéroports français ne sont semble-t-il pas saturés, par conséquent, le maillage territorial étant très dense, à l’exception peut-être des deux grands aéroports parisiens de Roissy et Orly. Nombreux sont ainsi les députés souhaitant un aéroport pour le territoire dans lequel ils ont été élus, sous prétexte de développement économique. Mais cela est valable pour d’autres projets d’aménagement, tel l’a établi Jacques Marseille dans « Le grand gaspillage ». C’est l’éléphant blanc dans les années 70, Sylvie Brunait en ayant dressé la liste, vous avez ici ou là des ouvrages immenses, sur le territoire hexagonal, qui ne servent à rien. Edouard Philippe a évoqué l’enclavement de Nantes, estimant qu’il faudrait fluidifier la circulation, en contre-partie de cet abandon du projet. C’est là un signal adressé à la maire de Nantes, entendant sa colère de façon très nette, la difficulté étant de s’accorder sur ce qui serait envisageable, avec la question des liaisons ferroviaires entre Nantes et Paris et Rennes et Nantes. L’aéroport de Rennes aura droit à un agrandissement et il y a aura une petite compensation sans doute. Mais on n’est pas sûr que l’extension de l’aéroport de Nantes, présentée comme une contre-partie éventuelle, ne se réalise. Surtout dans le rapport du médiateur sur NDL, il y a un petit quodici stipulant que cela règle le problème pour vingt ans, soit pour maintenant. Mais en 2037, peut-être va-ton repartir pour un tour. Alors dans vingt ans, c’est certes dans quatre élections. Mais il n’est pas impossible que l’on en reparle, un jour. Cette décision semble irrévocable, dans l’immédiat. Il faut tourner une page, mais est-ce si simple que cela. Ce projet datait, ne tenait pas la route. Mais on s’intéresse aussi à NDL, car cela ne parle pas que du problème du développement de Nantes. Mais cela dit quelque chose sur l’évolution de notre économie, de notre société, de la façon dont on envisage l’avenir. Et ce qui s’est joué à NDL, c’est comment on peut vivre la modernité. Et c’est ce qui explique également la motivation des zadistes à Notre-Dame-des-Landes, sur l’exemple de leurs prédécesseurs éleveurs du Larzac, jamais partis par la suite, se posant en gardiens.

Le changement climatique est important (quoi qu’il en soit des liens à établir avec), mais aussi la préservation de la bio-diversité, de nos terres cultivables, des zones humides. Et tous les élus diraient que oui, on doit se poser la question du développement du trafic aérien, de l’automobile, etc et de trouver d’autres moyens de développement de notre économie, plus harmonieuse, au XXIe siècle. En effet, NDL posait une problématique qui est celle de l’aménagement du territoire (concernant un site classé rappelons-le, avec toute une faune et une flore protégée) et plus largement, celle du recul des surfaces agricoles, du recul des zones humides. La surface des sols artificialisés présente une hausse de façon régulière depuis 1992. Sur le plan scientifique, on parle d’artificialisation du sol ou d’un milieu, d’un habitat naturel ou semi-naturel quand ces derniers perdent les qualités qui sont celles d’un milieu naturel. L’artificialisation s’accompagne généralement d’une perte de capacité d’auto-cicatrisation de la part du milieu (moindre résilience écologique) et à titre d’exemple l’artificialisation de la nature dans les espaces verts, sur les talus routiers ou par l’éclairage artificiel peut respectivement induire des situations de piège écologique, d’impacts plus ou moins négatifs, de « roadkill » (animaux écrasés ou blessés par les véhicules) de nuisances et pollution lumineuse, etc. En 23 ans, l’artificialisation a augmenté de 36 % pour atteindre 51 603 km² en 2015, ce qui représente 9,4 % du territoire français. On observe sur la même période un recul de 7 % des terres agricoles, soient 0,2 % de baisse en moyenne par an. Elles restent malgré tout majoritaires, couvrant 51 % du territoire.

La part des zones boisées, naturelles, humides ou en eau est stable sur la période 1992-2015, représentant 39,6 % des sols de métropole en 2015 alors qu’elle en représentait 38 % en 1992. En France, en 2011, selon l’ancienne ministre de l’Ecologie (N. Kosciusko-Morizet), en moyenne 165 hectares, soit 1 650 000 m² de milieux naturels et terrains agricoles étaient détruits chaque jour ; remplacés par des routes, des habitations, des zones d’activités. Cette surface correspond à un plus de 6 hectares par heure. Depuis 2015, les surfaces transformées en logements, commerces ou structures de loisirs ne cessent d’augmenter. L’an dernier, 60 000 hectares de terres agricoles ont été urbanisés, dans l’hexagone. A titre de comparaison, en Belgique la surface lotie a augmenté de 46 % en 20 ans. Ainsi 1/5 de la superficie foncière de la Belgique était artificialisée en 2006. Un des objectifs de la Trame verte et bleue française (TVB / SRCE) est de limiter ce phénomène et en atténuer les conséquences. Parallèlement à la Trame Verte et Bleue, la Région Nord-Pas-de-Calais expérimente une directive régionale d’aménagement visant à lutter contre l’artificialisation du territoire par la périurbanisation. Nicolas Hulot évoque la création d’une redevance, étudiant une nouvelle source de financement qui aurait un intérêt double : lutter contre l’artificialisation des sols et contribuer notamment à financer la préservation de la biodiversité. C’est une réflexion proposée à Edouard Philippe récemment, qui l’a invité à y travailler. Sur le plan financier, un autre débat se pose entre l’Etat et Vinci, d’une autre nature. 

Les négociations ont commencé entre Vinci et le gouvernement pour savoir si le groupe de BTP sera indemnisé après l’abandon du projet de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique). Vinci a annoncé que le trafic de l’aéroport de Nantes a augmenté de 15% en 2017. Edouard Philippe l’affirme, l’aéroport de Nantes-Atlantique sera modernisé, optimisé. Mais rien n’est sûr. Au-delà de la décision politique s’ouvrira un autre volet économique et Philippe se heurtera aux riverains bien décidés à en découdre à Nantes. L’extension de l’aéroport de Nantes était présentée comme un projet réalisable en deux ans. Sur le plan économique, le projet d’extension sera très compliqué, et il faudra le financer, les élus locaux n’étant pas préparé, l’Etat devant présenter le projet, ce qui est en général assez long. L’aéroport vient d’être transféré ailleurs, à priori, ayant d’autres problématiques se posant, soit rallonger la piste, étendre l’aéroport de Nantes, repartir pour un tour, aussitôt relancé, en voyant s’il n’y a pas de problème. Les riverains de l’aéroport de Nantes s’en alarment également. Un patelain près de Roissy, Goussainville, a été vidé de sa population, aux maisons murées, la même chose se produisant dans une localité près de Nantes. On fait allusion à une nuisance graduée par les nouvelles technologies. Ce que l’on pense, c’est qu’un certain nombre de dispositifs techniques ont été pris. Tout n’est pas obligé de se faire à Nantes également, à côté il y a Rennes et Angers, à 1/2 d’heure de train.

D’autres spécialistes préconisent des mesures, notamment écolos de régulation du trafic aérien, guère convaincantes, déclarant qu’il n’y a pas d’impôts sur les kérozènes. Alors commençons déjà à mettre une taxe sur les kérozènes et peut-être le trafic aérien évoluera différemment. En 2037, on verra peut-être que les projections de trafics aériens seront beaucoup moins importantes, disent certains spécialistes plus sérieusement. Sur le plan pécunier, Bruno Le Maire a bien l’intention de faire baisser la note, ayant reçu le PDG de Vinci et qui s’entendra avec l’Etat, vu le nombre d’appels d’offres auquel le groupe répond chaque année, étant concessionnaire de l’aéroport de Nantes. Car le débat de la gabegie ne se fera pas. Certes, cela coûtera environ 450 millions d’euros, le débat sur les APL touchant à 110 millions d’euros ! Mais en général, ces choses-là se résolvent, car il y a d’autres sujets de conversation, les élus locaux ayant quelques moyens de recours. Dans le cas de l’aéroport de Nantes, il y en aura, mais l’aéroport existe déjà et fonctionne déjà. Sa modernisation coûtera plusieurs dizaines de millions d’euros, mais il y aura quand même des économies sur ce plan-là, car les infrastructures existent déjà. Le débat portera sur les conditions, où il pourrait y avoir indemnisation, pour savoir en restant dans la légalité, comment défendre au mieux les intérêts de l’Etat. Jusqu’à 350 millions d’euros, c’est que l’Etat pourrait avoir à verser à Vinci, selon certaines estimations. Dans l’esprit de l’opinion publique, le fait d’avoir tranché est un immense progrès et occulterait le reste. La terrible gabegie a eu lieu avant, durant les 60 ans. Les 31 millions d’euros des collectivités locales ont été prêté par ces-dernières et il était convenu que l’Etat les prenne en charge. Mais si les Français payent à la fin, il est vrai que ça serait plus compliqué. 

A défaut d’argent, l’Etat a d’autres arguments. Mais Vinci étant un aménageur puissant, n°4 au monde et n°1 en France, présent dans les partenariats public / privé, le groupe peut exercer une forme de chantage. A savoir faire ça contre autre chose, ce qui peut aller à contre-courant des règles du marché public. L’aéroport de Nantes-Atlantique géré par eux, doit faire l’objet d’aménagements supérieurs à 350 millions d’euros, peut-être 720 millions d’euros selon certains experts, ce qui aurait été pire encore pour NDL. Sans compter le coût politique, car il aurait fallu expulser les zadistes. La moyenne, c’est le double du prix. On parle d’argent et ce qui est souvent assez choquant, c’est cette approche commerciale, concernant l’argent public ne connaissant probablement jamais les tenants et les aboutissants du sujet abordé. Les partenariats public / privé soulèvent le même problème. En revanche, vous reportez ce coût sur les décennies à venir, soit 40, 50 ans. Pour le ministère de la défense, l’ajout d’une prise de courant coûtait 10 fois ce qu’il coûte à n’importe quel entrepreneur. C’est mal négocié, un rapport comparatif pointant le surcoût d’une prison construite en partenariat avec l’Etat. C’est préoccupant pour un Etat qui n’a pas d’argent. Quand l’Etat construit tout seul lui-même une route, il n’y a personne dans la comptabilité publique. Donc effectivement, on a du mal à séparer. Cependant, il y a une grande transparence de la part de Vinci, donc nous verrons. C’est une entreprise qui communiquera, devra communiquer. Ce que l’on ne connaîtra pas, en revanche, ce sont d’autres négociations. Par exemple, il y a un projet d’ouvrir le capital des aéroports de Paris, ADP. Si l’Etat n’explique pas que Vinci présente une meilleure offre financière, cela ne se fera pas. Et l’Etat sera feux fois plus sous surveillance depuis l’aéroport NDL. Vinci a de très bons juristes et sur un projet récent d’autoroutes, dans un différent avec Ségolène Royal, il y a eu un recours et il a été déterminé que ce contrat était illégal. Ce contrat est administratif et l’Etat peut le casser ou en rediscuter les conditions et cela varie d’un contrat classique. 

L’Etat peut mettre en avant un motif d’ordre d’intérêt général, d’ordre de sécurité publique. Aujourd’hui, tous les chiffres sont fantaisistes et cette négociation devra être transparente. Ce sont des montages un petit peu complexes aussi. Par contre,  on sait qu’on trouvera très rarement ce type de sociétés dans des recours, parce que cela ne se fait pas non plus. Cela se règle autrement. L’indemnisation peut aussi être absente. Vinci n’a aucune raison d’aller jusqu’au contentieux, au Conseil d’Etat, étant là question de s’en prendre juridiquement à l’Etat qui leur passe des commandes avec le risque de perdre. Par contre, une des contre-parties peut-être dans des contrats à l’étranger. Quand le chef de l’Etat effectue un déplacement officiel à l’étranger, il part très généralement avec les entrepreneurs de travaux publics, en Chine, en Inde, en Afrique du sud. Et là justement le gouvernement, le chef de l’Etat peut être un facilitateur pour passer des contrats. Vinci a décroché un contrat d’exploitation au Chili, celui de l’aéroport de Belgrade, exploite des aéroports au Japon, a racheté une entreprise de BTP en Australie, décroché un contrat de traitement de déchets en Allemagne, et n’a donc vraiment pas attendu la décision de NDL.  

                                                                                                                                                                                                            J. D.


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