Das Gesetz c'est la loi. L'origine est claire, enfin autant que l'étymologie est fiable : C'est ce qui est posé là ; " setzen " asseoir, installer, poser là devant. Sich setzen c'est clair c'est s'asseoir, mais" Setzen " tout seul c'est asseoir mais aussi 'composer' dans l'imprimerie... donc placer les lettres de plomb dans le bon ordre( ce que les moins de quarante ans ne peuvent pas connaître). Le préfixe " ge " ne doit pas nous étonner en allemand car on l'accole aux mots parfois pour donner l'idée d'un ensemble. Exemple das GE-fühl, le sentiment, rassemble tout ce qui est ressenti par un être humain. Das Gestell est tout ce qui est placé là devant, " Dispositif " " arraisonnement ", enfin tout ce qui fait la difficulté de la technique vue par Heidegger.
Ce qui est assis là, posé là c'est le principe que l'on désigne par " Satz " en allemand. La loi a affaire avec la philosophie. Gesetz et Satz, loi et principe, sont donc étroitement liés. Mais Satz c'est aussi en allemand la " phrase ". Donc c'est un terme qui relève de la philologie. L'homme est assis devant la loi, certes, mais on peut dire qu'il est assis devant son miroir, si la loi est " assise " (l'assise du social).
Enfin, pour la phrase, " der Satz ", la pensée se dirige alors vers sa forme et on imagine aisément que la phrase et la loi sont comme forme et fond d'une seule et même chose : la loi est une phrase, un principe que l'on peut énoncer dans l'espace d'une phrase et dont le modèle est sans doute dans les dix commandements de l'ancien testament. Pour que la loi soit applicable elle doit être simple et ramassée en une phrase. Enfin, j'ajouterai pour que ce soit vraiment personnel (!) que personne n'a jamais mis en valeur ce sens de s'asseoir avec le texte de Kafka " Vor dem Gesetz " ; or, si vous le lisez bien vous voyez tout de suite que c'est précisément la position de l'homme de la campagne. Il est assis et il attend assis. Je lis une certaine forme d'ironie dans ce face à face de l'homme de la campagne assis face à la loi qui est elle-même assise dans son principe (miroir donc).
Je note que si l'homme de la campagne n'était pas assis, il ferait un excellent remplaçant à Vladimir ou à Estragon dans la pièce de Beckett. Sauf qu'il n'attendrait pas devant la loi mais devant le vide du temps qui nous est alloué ici et maintenant.