La cote de l’exécutif
baisse et, selon les sondeurs, c’est de la faute du pouvoir d’achat qui
n’augmente pas aussi vite que ne le voudraient les français.
L’explication est évidemment reprise en boucle par les journalistes qui ne
font pas l’interview d’un responsable politique sans poser la question :
« Les français se plaignent de ne pas voir leur pouvoir d’achat augmenter,
que leur répondez-vous ? »
Eh bien, s'ils m’interrogeaient (ce qui ne risque pas d'arriver), je leur
répondrais que c’est tout à fait normal, et qu’il faut être d’une naïveté
stupéfiante ou d’une stupidité navrante pour s’imaginer qu’en 6 mois un
gouvernement puisse faire augmenter le pouvoir d’achat des français.
Je leur répondrais que le pouvoir d’achat, c’est comme le chômage mais à
l’envers, l'Etat n’en décrète pas la hausse comme il ne décrète pas la baisse
du chômage. J’ai en tête un récent Président de la République qui a passé 5 ans
à regretter de l’avoir fait croire.
D’autant que les marges de manœuvre de l’Etat sont faibles sinon
inexistantes.
Compte tenu des contraintes auxquelles nous sommes soumis du fait de
décennies d’inconscience et d’inconsistance, l’Etat ne peut plus distribuer de
l’argent supplémentaire. L’endettement de la France est au taquet (la dette
publique frôle les 100% du PIB) et tous les ans le déficit budgétaire de l’Etat
se compte en dizaines de milliards (68 milliards pour 2017).
Les régimes de chômage, de retraite et de santé sont tous
déficitaires.
Si on veut, enfin, que la France tienne ses engagements de déficit et se
prémunisse contre le cout exorbitant d’une inévitable hausse des taux, inutile
de rêver à une baisse massive des impôts ou, à contrario, à une hausse massive
des pensions et aides en tous genres.
Le jeu de bonneteau consistant à augmenter la CSG au profit de certaines
cotisations sociales et la taxe d’habitation, a plusieurs intérêts, mais
globalement pas celui d’augmenter le pouvoir d’achat des français ou de manière
marginale. Ce fut certainement une erreur de le laisser croire.
Si on ajoute à cela les hausses du tabac et de l’essence, respectivement
pour des raisons de santé publique et de lutte contre le réchauffement
climatique, pas étonnant que le pouvoir d’achat ne s’emballe pas.
D’autant plus que, ces dernières années, ce pouvoir d’achat a été largement
boosté par moult circonstances favorables, un important déficit public (des
distributions non compensées par l'impôt), la baisse du prix du pétrole, les
taux d’intérêt extrêmement bas et des salaires réels qui se sont plutôt bien
maintenus malgré la situation dégradée des entreprises.
Tout cela pour dire que si le pouvoir d’achat moyen doit augmenter ce ne
pourra être que grâce à une augmentation significative de la productivité en
France qui seule pourra augmenter le revenu disponible et baisser
significativement le chômage structurel. Or, celle-ci est faible pour des
raisons qui sont connues : désindustrialisation, faible niveau de gamme,
manque d’investissements des entreprises, insuffisance de la qualification
moyenne de la population active…
Autant de chantiers auxquels le Gouvernement tente de s’attaquer mais
d’évidence, ça ne se fera pas en 3 coups de cuillère à pot, et de toute façon,
les effets (s’il y en a) ne se feront sentir qu’à long terme.
Le problème, c’est que le long terme, cela fait longtemps que le monde
médiatique et la population des réseaux sociaux drogués aux jugements
instantanés et aux commentaires spontanés et sans appel n’en n’ont cure, et
qu’ils ne regardent pas plus loin que le bout de leur écran !
Comme une déclinaison du vieux proverbe chinois « Quand le sage montre
la lune, l’idiot regarde le doigt » on pourrait dire « quand le
dirigeant regarde le long terme, l’idiot exige des résultats immédiats »
!
Ce qui ne veut évidemment pas dire que le dirigeant est toujours sage et le citoyen toujours idiot, car hélas, rares ont été les politiques à regarder le long terme, et sans sage, pas d’idiots !...ou ils se voient moins !