Dans la vie, on est parfois tenus d'avoir un avis et de devoir l'exprimer, l'imprimer ou le publier, précisément lorsque la vie d'autrui est en jeu.
Mon souci qui est sans doute le vôtre aussi : c'est le souci qui concerne les sans-abri.
Avec cette vague de froid, il y a de quoi reprendre ce chemin de croix en reposant la question du pourquoi?
Pourquoi on les laisse mourir de froid ?
Ce n'est pas aux sans-abri d'y répondre. C'est à nous autres abrités d'apporter une réponse.
Cela relève de notre responsabilité, de notre devoir-être-ensemble. Responsabilité morale, responsabilité civile et responsabilité pénale.
-->Il ne suffit pas de dire que ça nous empêche de dormir pour remplir son devoir moral
-->Il ne suffit d'écrire un article alarmiste pour accomplir son devoir civique
-->Il ne suffit pas de recourir aux pouvoirs publics pour rendre ce mal moins banal et la mort moins fatale.
Notre responsabilité à tous est totale... s'il y avait une justice, nous aurions tous droit à une sanction pénale!
Notre État n'assure pas. C'est le moins qu'on puisse dire. Pire, l'État n'assume pas.
Je veux parler de notre fameux état de droit qui est censé protéger les plus démunis, leur fournir un toit, c'est dans l'esprit de nos Lois.
Mais ce n'est pas le cas.
Sommes-nous devenus la proie d'un État irresponsable ?
Coupable de ne pas appliquer la loi?
Puisqu'on continue de mourir de faim et de froid, non pas à cause d'un quelconque dérèglement climatique, mais à cause d'un dérèglement moral, éthique et politique.
Et si le pouvoir n'a pas assez de pouvoir, qu'il le donne à ceux qui ont le sens du devoir... à des hommes responsables.
Mais le sujet le plus préoccupant, selon les médias qui s'autorisent des propos qui ne devraient pas être autorisés... le plus préoccupant ce sont les sans-abri qui refusent d'avoir un abri et préfèrent continuer de courir le risque de mourir dans la rue. Ils refusent d'être secourus... qui l'eut cru ?
On se dit que rien n'explique, rien ne justifie ce refus qui nous paraît absurde ou tordu.
Et pourtant ce refus ne manque pas de hauteur de vue. Il est très clair et non point confus.
Il signifie en premier : que les sans-abri sont libres. Ils ont choisi la liberté jusqu'à braver toutes les intempéries.
En deuxième : ce refus signifie qu'ils placent leur dignité ailleurs que sous un toit. Ils n'ont pas froid aux yeux.
En troisième : ce refus exprime la plus belle forme d'insolence : dire non à toute espèce d'assistance. Ils veulent être reconnus et non secourus, estimés et non méprisés. Admirés et non emmurés.
En dernier : les sans-abri protestataires ont un message très clair : c'est le système qui est à la rue... système d'objets qui ne convient plus à ceux qui continuent de croire qu'ils sont avant tout des hommes... et non des déchets qu'on se baisse pour ramasser. Pour eux, le système n'est pas un refuge mais un subterfuge pour promouvoir le vol, le viol et le ras-le -bol.
Doit-on les empêcher de mourir comme ils meurent ?
Ou les empêcher de vivre comme ils vivent ?
Ce n'est pas l'une et l'autre en même temps mais ni l'une, ni l'autre, monsieur le Président.
Auteur interprète : Emeline Becuwe
Scénario : Emeline Becuwe
Actrice : Emeline Becuwe