D'après un article du Monde Diplomatique de février, rien n'est moins sûr. Mais revenons-en à la définition : les JO, qu'est-ce que c'est ? Du point de vue sportif et social, une immense fête du sport qui a lieu tous les quatre ans (en fait tous les deux ans, puisque s'alternent les Jeux d'été et ceux d'hiver), un rendez-vous international où toutes les nations se réunissent, un moment de paix, un temps hors du temps. Une rupture dans les conflits ou, plutôt, un instant, trois semaines pendant lesquelles cette actualité prend le pas sur toutes les autres. Pendant les Jeux Olympiques, on oublie la guerre. On oublie et c'est à double tranchant : on reprend espoir en l'humain, on se dit qu'une autre façon de cohabiter est possible... mais on devient également amnésique, on occulte les catastrophes humanitaires et les sauvageries politiques qui, elles, continuent de se jouer chaque jour à travers le monde. Certains diront donc des JO que c'est un pont entre les peuples ; d'autres un grand gâchis égoïste marqué par le déni et l'ignorance. Toujours est-il que cela réunit non seulement un grand nombre de participants, mais aussi des millions de téléspectateurs. Autant dire que la manne financière est énorme. Seulement voilà, les Alpes, elles, ne veulent plus des Jeux Olympiques.
Fabien mérelle. — « Chute ou envol », 2010
En 2006, Turin, gagnante fac à Sion, a été la dernière ville alpine à s'y coller et cela ne laisse pas un grand souvenir aux Italiens. On a construit des infrastructures ruineuses, mais les fédérations n'ont pas suivi et il y a eu dans les faits peu de pratiquants supplémentaires. Des pistes de ski ont par exemple coûté plusieurs dizaines de millions d'euros et n'ont servi deux fois après les Jeux Olympiques. Aujourd'hui, les installations sont abandonnées et défigurent le paysage. Les voix des villageois se font entendre eux qui pensaient que les JO allaient apporter de nombreux emplois et qui se voient déçus, parce que, sur ces sites, on amenait les athlètes pour la compétition et ils repartaient. Il y a même eu des pertes économiques... D'autre part, les délais imposés par les institutions olympiques pour construire sont trop courts et les bâtiments ont été mal faits. A Sestrières, les édifices devaient se transformer en village universitaire mais aujourd'hui ce sont des migrants qui vivent dans ces ruines.
Malgré ce constat négatif, Turin va à nouveau présenter un dossier pour 2026. Des Jeux durables et low coast : un rêve impossible tant que le CIO imposera la structure des Jeux telle qu'elle est.
Toutes les infos sur Turin sont à retrouver ici.
Tignes
Si on remonte un peu plus loin dans le temps, on peut se rendre à Albertville où on a encore plus de recul, puisque les Jeux datent de 1992. Si les installations sportives sont toujours utilisées, elles restent déficitaires et le département est obligé de compenser par des subventions (150 000 euros pour les tremplins, par exemple). Cependant, la construction de l'autoroute et d'autres infrastructures innovantes ont permis une ouverture de la région et la valorisation de celle-ci. Le problème, aujourd'hui, réside dans le fait que le comité olympique en demande toujours plus, dans des régions où il n'est plus nécessaire d'attirer les visiteurs et où on est de plus en plus inquiet face à l'impact écologique d'un tel événement.
Le cas d'Athènes est une pure catastrophe. On a aveuglément obéi au CIO qui a poussé à construire de nombreuses et coûteuses infrastructures pour lesquelles aucun plan préalable de réutilisation n'a été établi. Si bien qu'après les jeux, les installations se sont rapidement écroulées ou on été rachetées par des promoteurs, lesquels ont provoqué une spéculation sans limites.
Albertville
En résumé, on peut affirmer que les Jeux Olympiques ne font plus rêver les habitants des Alpes. Si plusieurs villes alpines ont posé des candidatures pour des Jeux futurs, lors du référendum correspondant les populations ont majoritairement voté contre le projet. Dans les Alpes, on n'a pas besoin de JO pour attirer des touristes et, dans ce domaine, on cherche plutôt à réparer les dégâts des exagérations passées, quand on construisait à tout va pour séduire les visiteurs du monde entier. Complexes hôteliers, logements, pistes de skis, remontées mécaniques : on persiste et on signe dans la destruction. Les glaciers fondent mais on continue encore et toujours d'ouvrir de nouvelles pistes de ski. On a beau s'entourer de géologues pour officiellement minimiser l'impact sur l'environnement, c'est toujours trop et il faudrait absolument arrêter le massacre. Pourtant, le profit fait office de religion et on veut maintenant séduire les chinois et les indiens. Les montagnards n'en peuvent plus de cette loi du profit qui défigure leurs montagnes. Alors, leur demander de faire un effort supplémentaire en accueillant les gargantuesques JO d'hiver, ce n'est plus pensable.
Si les candidatures des différentes villes sont politiques, le refus, lui est populaire.
Sur un mur de Chamonix
La ville valaisane de Sion propose pour 2026 une candidature, comme celle de Turin, basée sur le développement durable et portée, comme par hasard, par des entrepreneurs. Le referendum aura lieu le 10 juin prochain. Pas sûr que l'issue en soit positive.
Plus de détails dans cet article.
Depuis Sotchi et ses Jeux les plus chers de l'histoire, arrosés de neige artificielle et marqués par la corruption et les affaires de dopage, on comprend que les habitants de Sion et des autres villes alpines soient réticents...
Pourtant, une autre alternative est certainement possible, si on voulait bien s'en donner la peine, se défaire du carcan de la grosse machine totalitaire CIO, mettre en avant le sport et la réunion des nations, valoriser la nature avant tout. Des JO écolos, pourquoi ne pas y croire ?
Quelque part, à la frontière italo-suisse...