Au milieu des années 2000, le web se peuplait d'avatars, chargés de répondre automatiquement aux questions des visiteurs en adoptant une apparence humaine afin de rendre les interactions plus naturelles. Après une longue éclipse, NatWest profite aujourd'hui des récents progrès technologiques pour tenter de remettre le concept au goût du jour.
Depuis un an, la banque britannique a déjà mis en œuvre un chatbot, baptisé Cora, destiné à aider ses clients à naviguer dans ses pages d'aide en ligne par l'intermédiaire de messages textuels. Capable de prendre charge environ 200 types de requêtes élémentaires (comment se connecter à son espace personnel ? que faire en cas de perte de sa carte de crédit ? etc.), il gère actuellement plus de 100 000 conversations par mois. Mais il n'est pas question pour NatWest de se contenter de ces résultats.
Un prototype beaucoup plus élaboré est donc en cours d'expérimentation, exploitant les derniers développements des neurosciences, des sciences du comportement, de l'intelligence artificielle (et des capacités de calcul informatique). L'objectif est de proposer une expérience plus riche et plus abordable, rendant possible de véritables conversations (vocales) interactives – sur le web, sur mobile ou sur tablette – avec Cora, qui prend alors les traits d'une jeune femme toujours attentive aux besoins de son interlocuteur.
Plus grand chose à voir avec les avatars d'antan… NatWest a fait appel aux services d'une société néo-zélandaise, Soul Machines, dont un des fondateurs a été récompensé pour les simulations faciales mises en œuvre dans les films King Kong et Avatar. Propulsée par des technologies directement inspirées du fonctionnement du cerveau humain, Cora peut ainsi détecter les émotions des internautes (par la voix et par vidéo) et réagir en conséquence, dans ses intonations comme dans ses « attitudes » physiques.
En dépit de son réalisme impressionnant, l'agent virtuel de NatWest, tel qu'il est présenté dans sa vidéo de démonstration, ne parvient pas à créer l'illusion parfaite d'une personne réelle (même dans la synchronisation de la bouche avec les paroles prononcées). Dès lors, il est à craindre qu'il sombre dans le piège de la vallée de l'étrange (« uncanny valley »), la théorie de Masahiro Mori selon laquelle un robot trop proche de l'homme fait ressortir ses défauts comme des monstruosités inacceptables.
En dehors de ces considérations, il reste à s'interroger sur l'intérêt de donner un visage humain aux robots logiciels qui envahissent notre quotidien, alors que les consommateurs sont presque universellement familiers des échanges avec leurs congénères par messages textuels (depuis les SMS et encore plus avec l'extraordinaire popularité des messageries sociales) et que les enceintes vocales (Amazon Echo, Google Home, Apple HomePod…) se déploient à grande vitesse dans les foyers connecté.
Pour NatWest, face à ces doutes, il reste toutefois des opportunités à explorer, notamment du côté de ses clients les plus timorés, qui pourraient être rassurés dans les usages numériques grâce à la présence d'une figure empathique, les encourageant à interagir avec les outils mis à leur disposition en ligne. En tout état de cause, sa démarche reste pour l'instant purement expérimentale et ne débouchera sur une généralisation que si elle démontre des bénéfices concrets. Une initiative qu'il vaut de suivre, donc…