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Sheila Hicks : tissages et métissages

Publié le 22 février 2018 par Pantalaskas @chapeau_noir
Sheila Hicks : tissages et métissages

Exposition Centre Pompidou Sheila Hicks 2018

Une américaine à Paris depuis plus d’un demi-siècle, Sheila Hicks, bien cachée dans un passage privé tranquille au cœur du trépidant quartier Latin, accède au Centre Pompidou de Paris à une visibilité majeure. Ce n’est pas faute d’avoir connu, depuis de nombreuses années, une notoriété internationale à la hauteur de cette personnalité forte qui, tout au long de son périple, a maintenu le cap dans une recherche personnelle qui échappe aux classifications.

«Textiles Pré-Incas »

Amie de l’ethnologue Claude Levi-Strauss, l’artiste s’est intéressée à la dimension anthropologique du textile et de l’art contemporain. En 1957 elle bénéficie d’une bourse Fulbright et se rend au Chili pour étudier le tissage. Cette découverte sera fondatrice de son travail dans une relation au monde qui s’établit lors de ces voyages, au contact des civilisations anciennes. Sheila Hicks n’abandonnera jamais cette approche. De sa thèse «Textiles Pré-Incas » aux œuvres contemporaines, l’artiste a suivi le fil de cette réflexion par une pratique associant dans un même geste la fonctionnalité possible du textile et le jeu des formes et des couleurs libérées de tout argument utilitaire. Au Centre Pompidou le vaste espace qui lui est consacré permet de découvrir une centaine d’œuvres qui retracent ce parcours atypique des années soixante à aujourd’hui. Ce métissage entre textiles traditionnels et art contemporain se révèle avec l’emploi des matériaux, couleurs, techniques qui donnent à l’œuvre de Sheila Hicks cette force singulière.

Sheila Hicks : tissages et métissages

Dans les premières années de sa recherche, l’artiste réalise une série de pièces dans un petit atelier de tisserands au Mexique, suivant un procédé inspiré de la technique Kilim (mode de tissage le plus ancien,  » à plat », à base de fils de chaînes (verticaux) et fils de trames colorés (horizontaux).

« The evolving tapestry : He/She »

Quelques années plus tard quelque chose d’inédit se passe dans le travail de Sheila Hicks. Avec « The evolving tapestry : He/She » (1967/1968) elle quitte le plan traditionnel de la tapisserie pour ouvrir cette nouvelle forme de sculpture. Composée de centaines d’unités « queue de cheval » liées et empilées, la pièce prend une forme différente chaque fois qu’elle est exposé. Le processus répétitif et tactile par lequel il a été construit et installé reflète la préoccupation de l’artiste pour le geste dans cette création. Ici les fils de lin sont massés dans un volume collectif. Déjà dans l’exposition « 72 72 » au Grand Palais en 1972, Sheila Hicks présentait ces œuvres résolument engagées dans cette voie de la sculpture en laine.

Sheila Hicks : tissages et métissages
Dès lors ce sont des sculptures monumentales qui se déploient dans l’espace. Aujourd’hui Sheila Hicks dirige dans son atelier parisien une petite équipe concentrée sur la réalisation des pièces souvent destinées à des intégrations architecturales dans le monde entier, notamment l’impressionnant rideau de Théâtre au Kiryu Cultural Center de Gumna au Japon en 2001.
On voit même apparaître la notion d’interactivité dans cette oeuvre avec notamment « Pockets » (1982) , constituée d’un assemblage de poches de coton pour lesquelles le public est invité à glisser quelque chose. Cette dérive a pris récemment une forme inattendue comme j’ai pu le découvrir il y a quelques mois sur la High Lane à New York. C’est le tissu urbain auquel se réfère Sheila Hicks : « Le ballet des véhicules de construction dans les Rail Yards; les innombrables couches entrelacées de mailles de construction qui couvrent les bâtiments, les échafaudages et les paysages urbains, réseaux architecturaux inachevés et la dentelle des câbles de grue suspendus » , tout cet environnement dans lequel la High lane se fraye un chemin sinueux sert de cadre à cette longue proposition colorée qui accompagne le parcours des promeneurs . Cette installation temporaire de l’artiste doit être encore en place jusqu’en mars prochain. Le métissage artistique de Sheila Hicks montre, de New-York à Paris, une vitalité à l’image de cette jeune artiste de quatre-vingt quatre ans.

Photos de l’auteur

Sheila Hicks « Lignes de vie »
7 février 2018 – 30 avril 2018
Galerie 3
Centre Pompidou, Paris


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