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Alors que le salon de l'agriculture s'ouvre dans quelques jours, l'association Générations futures vient de dévoiler un rapport alarmant sur la présence des résidus de pesticides mesurés dans des fruits et légumes non bio consommés en France.
Ce rapport, intitulé "Etat des lieux des résidus de pesticides dans les fruits et légumes en France", a été élaboré sur la base de données officielles produites par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ( DGCCRF) qui dépend du ministère de l'Economie. Ces analyses officielles ont permis à l'association de réaliser un classement des fruits et des légumes en fonction de la fréquence de la présence de résidus de pesticides mesurés et un classement des fruits et légumes en fonction de la fréquence des dépassements des limites maximales en résidus (LMR), sur une période allant de 2012 à 2016.
En tout ce sont 19 fruits et 33 légumes qui ont pu être étudiés sur la base des données fournies par la DGCCRF. Ont été écartés ceux dans lesquels des résidus de pesticides ont été détectés mais pas en quantité insuffisante pour être quantifiée. Et le constat est alarmant : on trouve des résidus de pesticides à des teneurs quantifiables dans 72,6% des fruits et 41,1% des légumes analysés. Et tous ces pesticides sont potentiellement toxiques pour la santé humaine !
Le raisin en tête des fruits les plus contaminés par les pesticides
Sur le podium des fruits les plus contaminés arrive en tête le raisin (89 % des échantillons testés contiennent des résidus de pesticides). Le rapport précise qu'en moyenne, 19 traitements de pesticides sont répandus sur les vignes chaque année avec une grande variabilité selon les régions ! Arrivent en 2ème position les clémentines/mandarines (88,4%) essentiellement produites en Corse (78% de la production française), puis les cerises (87,7%). Suivent le pamplemousse (85,7%), les fraises (83%), les pêches/nectarines (82,8%) qui subissent plus de 20 traitements pesticides par an, les oranges (80,6%) et les pommes (79,7%), 1er fruit consommé en volume par les Français, et sur lequel sont appliqués plus de 35 traitements pesticides par an !
Parmi les fruits les moins contaminés du rapport, on trouve l'avocat (23,1% des échantillons contiennent des résidus de pesticides mesurés), le kiwi (27,1%) et les prunes (34,8%).
Le céléri en tête des légumes les plus contaminés par les pesticides
Côté légumes, le trio de tête est formé par le céleri branche (84,6%), les herbes fraîches (74,5% - sauf persil, ciboulette et basilic analysés à part) et les endives (72,7%) dont la France est le 1er producteur européen. Le céleri rave arrive en 4ème position (71,7%) suivi de près par la laitue, que beaucoup lavent à peine, avec 65,8% des échantillons contaminés.
La tomate, premier légume consommé par les Français en volume avec un peu plus de 14 kg par ménage et par an, arrive en 13ème position avec 48,9% des échantillons contaminés, talonnée par la carotte, 2ème légume consommé par les Français en volume (1 légume acheté sur 5 est une carotte), qui arrive en 12ème position (48,9%)
Parmi les légumes les moins contaminés, on trouve le maïs (1,9%), les asperges (3,2%), les betteraves (4,4%) et les choux fleurs (6,7%).
Et les analyses ignorent une grande partie des produits chimiques utilisés !
Si ces chiffres montrent que nos fruits et légumes non bio sont très largement contaminés par les pesticides, il faut savoir que cette étude ne prend pas en compte la totalité des produits chimiques retrouvé sur les aliments ! "On peut considérer que les résultats présentés ignorent une partie des résidus réellement présents", souligne le rapport.
En effet, seule la matière active des pesticides est recherchée par la DGCCRF. Plusieurs sont régulièrement retrouvés sur un même fruit ou légume. Mais d'autres molécules ne sont même pas recherchées : celles qui entrent dans la composition des pesticides renforcent l'efficacité de la matière active et sont parfois plus dangereux qu'elle.
"Cette question des multirésidus est importante car ces résidus de pesticides peuvent interagir entre eux pour avoir des effets additifs ou synergiques plus importants que l'effet de chaque molécule prise isolément. C'est l'effet cocktail dont la science commence à montrer la réalité" explique le rapport. "Les données de la DGCCRF ne permettent pas de connaître la présence de cocktails de résidus de pesticides aliment par aliment. Cependant des chiffres issus des plans de contrôle et de surveillance permettent de réaliser que cette présence de multirésidus est importante et concerne une proportion importante des aliments analysés."
Les limites maximales de résidus de pesticides autorisés sont dépassées sur tous les fruits analysés
Dans cette étude, Générations Futures s'est également intéressée au dépassement des seuils légaux, appelés Limites maximales de résidus (LMR). Il faut savoir qu'une LMR correspond à la quantité de matière active maximale que l'on doit trouver sur un produit cultivé si l'agriculteur a respecté le guide de bonnes pratiques du fabricant : elle concerne donc le travail des agriculteurs. Et là aussi le constat est alarmant, le rapport montre en effet que tous les fruits connaissent des dépassements de LMR ! avec tous les risques que cela comprend pour la santé humaine !
Pour les fruits, la palme des dépassements de LMR revient aux cerises (6,6% des échantillons dépassent les limites maximales en résidus) suivis des mangues/papayes (4, 8%), des oranges (4,4%) et des kiwis (4,1%).
Pour les légumes, ce sont les herbes fraîches qui, dans 29,4 % des cas, présentent des dépassements de LMR, suivi du céleri-branche (16%) puis des blettes (12,1%) et des navets (9,1%). Sont épargnés les artichauts, les betteraves, le maïs, la pastèque, les pois non écossés et les potirons.
Le fait est que les LMR, qui sont fixées par l'Union européenne et variables d'une culture à l'autre pour une même molécule, ne sont pas suffisamment protectrices de la santé des consommateurs. Pour preuve, certaines d'entre elles sont supérieures aux seuils autorisés dans l'eau.
" Elles ne sont pas protectrices pour les perturbateurs endocriniens par exemple, qui agissent à très faibles doses ", explique François Veillerette, porte-parole de Générations Futures.
Attention aux produits non bio affichés "sans résidus de pesticides"
Quelles solutions face à la contamination généralisée de nos fruits et légumes en France par les pesticides ?
Le meilleur moyen de se protéger est de choisir des produits issus de l'agriculture biologique dans laquelle sont interdit les pesticides de synthèse.
Générations Futures demande aujourd'hui au gouvernement de prendre des mesures urgentes "pour la transparence totale sur les pesticides utilisés dans la culture et le stockage des fruits, légumes et céréales par un affichage complet" bien visible par les consommateurs dans les magasins et sur les produits.
L'ONG évoque également le problème des marques non bio qui affichent que les produits sont "sans résidus de pesticides". Elle explique ainsi : "Nous ne considèrons pas que les dernières annonces de distributeurs de produits "sans résidus de pesticides" répondent pleinement aux attentes des citoyens car ces offres ne garantissent pas une absence d'utilisation de pesticides mais seulement une absence de résidus pesticides au-dessus d'un certain seuil (généralement 10 μg/kg) ce qui n'empêche pas ces aliments de contenir éventuellement des résidus de pesticides inférieurs à ce seuil et ne supprime pas les pollutions environnementales."
"Il faut accompagner les agriculteurs vers moins de pesticides"
"Un nouveau plan Ecophyto doit sortir le mois prochain. Nous espérons qu'il sera plus volontariste que les précédents", a déclaré François Veillerette. Face au constat de contaminations aussi larges, il a évoqué la nécessité d'un objectif chiffré de réduction des usages des pesticides mais avec plus d'implication des pouvoirs publics que dans les précédents plans Ecophyto.
"Ce serait bien de doubler la surface en bio qui passerait à 12% car ce mode de production est respectueux de l'environnement et de la santé des consommateurs. Mais il resterait encore près de 90% d'agriculteurs non bio qu'il faut accompagner vers moins de pesticides. Pourquoi pas un système de bonus-malus, aidant ceux qui travaillent mieux, avec un plan d'assurance récolte quand ils renoncent à certains pesticides ?", a suggéré François Veillerette.
Anne-Françoise Roger