L'apparition, film de Xavier Giannoli

Publié le 19 février 2018 par Onarretetout

« L’Eglise préférera toujours passer à côté d’un véritable phénomène plutôt que de reconnaître une imposture ». Une jeune fille, Anna (Galatea Bellugi), dit avoir vu la Vierge Marie. Les pèlerins affluent. Le Vatican invite un journaliste (Vincent Lindon), reporter de guerre, traumatisé par la mort d’un de ses amis, à participer à une commission d’enquête qui doit décider de la reconnaissance de cette « apparition ».

Xavier Giannoli multiplie les signes : le journaliste, au début du film, est enfermé chez lui, colle des cartons à toutes ses fenêtres. Il n’apparaît même pas à la cérémonie d’hommage à son ami. Le cinéaste fait dire, à un moment du film, que c’est en réalité Anna qui a choisi cet homme, qui n’est pas comme les autres, à qui elle racontera plus tard l’histoire amusante d’une enveloppe sur laquelle est écrit « Ne pas ouvrir ». Et le réalisateur ouvre les pistes. Tous ses personnages sont sincères et il ne met pas en doute cette sincérité. Il parvient à maintenir le mystère jusqu’au bout. Et quel meilleur moyen que de placer celui qui veut des preuves au coeur de l’enquête ? Car les preuves ne dissipent pas le mystère. 

Comme dans d’autres cas d’apparition, la « voyante » vient d’un milieu pauvre : de famille d’accueil en foyer, a-t-elle un autre choix que celui-ci, « le CAP coiffure ou la sainteté » ? Comme dans d’autres cas aussi, ce sont peut-être les autres qui disent qu’il s’agit de la Vierge Marie, la « voyante » parlant d’abord d’une lumière sur les pierres. Et « la foi est un choix libre et éclairé », dira la psychanalyste qui participe à la commission.

De ce film magnifique, il ne faut pas trop révéler ici les derniers chapitres sinon qu’ils soulignent ce que dit le curé du village dans un sermon, dénonçant « la mondialisation de l’indifférence ».

Et la dernière image me rappelle la fin d’un livre de Laurent Gaudé, Écoutez nos défaites, où un objet est rapporté à l’endroit d’où il avait été retiré : le mystère qui nous traverse est rendu à son origine.