Un livre attendait chez moi depuis plusieurs jours. Le film de Xavier Giannoli me l’a rappelé. Marie Cosnay y évoque Bernadette Soubirous. L’apparition, c’est tout au fond d’une grotte, tombée par temps d’orage, le souvenir de Bernadette, dont elle a lu l’histoire à l’infirmerie. Bernadette qui a « a vu aquèra, accent sur le "e", c’est‐à‐dire celle‐ci, fille, fée ou déesse ou bien elle a vu la lumière à l’état de lumière : aquerò, l’accent sur la dernière syllabe, ceci, neutre ? Bernadette a vu celle‐ci, la fille, ou ceci, la chose ? »
Dans une grotte, on peut voir beaucoup de choses extraordinaires : des mains dessinées sur les parois, parfois des ossements, des objets, des outils, des figures sculptées dans l’ivoire, comme la dame de Brassempouy.
Bernadette ramassait du bois dans la forêt, et des os. Son père fut un jour mis en prison, parce qu’il était tellement pauvre qu’il fut suspecté d’avoir volé. Et Bernadette, dans une grotte, a vu une lumière. Ça n’était pas bon pour sa famille, qu’elle se fasse remarquer de la sorte. Mais elle a persisté, creusé pour faire sortir de l’eau, les gens la regardent. Et l’interrogent sans cesse : Qu’a-t-elle vu ? dit, dans son patois ? ressenti ? On lui propose des images : elle les refuse. Son corps est une plaie.
Au fond de la grotte, elle a marché comme elle a pu, puis trouvé une lumière, l’endroit où elle pouvait sortir. L’histoire de Bernadette la rattrape donc là, meurtrie.
Et je me souviens de la chute de Thomas dans la montagne quand, dans le livre de Luc Lang, Au commencement du septième jour, il rejoint à pied, seul, son frère Jean : comme dans le livre de Marie Cosnay, le smartphone s’éteint, on marche comme on peut, blessé, ils voient, lui une ourse, elle une biche…
Et, comme dans le film de Xavier Giannoli, Bernadette monte dans la forêt, court dans le Gave...