Des pratiques rigoureuses d'hygiène et de lavage des mains peuvent permettre de réduire la mortalité, les taux de prescription d'antibiotiques et donc les risques d'antibiorésistance, particulièrement chez les patients/résidents âgés. C'est donc vrai non seulement dans les établissements hospitaliers mais aussi dans les maisons de soins infirmiers ou de longs séjours, conclut cette étude française du laboratoire Modélisation, épidémiologie et surveillance des risques sanitaires (MESuRS) du Conservatoire national des Arts et Métiers. Les conclusions, présentées dans l'American Journal of Infection Control (AJIC) apportent les preuves d'efficacité d'un programme multi-mesures et multi-cibles de lavage des mains dans des structures de soins autres qu'hospitalières.
Cette intervention comportait des mesures cohérentes incitant le personnel, les résidents, mais aussi les visiteurs à se laver les mains. L'étude parmi les premières à évaluer la mise en œuvre de bonnes pratiques d'hygiène en maisons de soins infirmiers, montre l'efficacité de ce programme à réduire les taux de prescription d'antibiotiques et de décès dans ces structures de soins.
L'étude a porté sur 26 maisons de soins infirmiers dont 13 assignées à l'intervention et 13 à un groupe témoin. Le programme d'hygiène, composé de plusieurs interventions, ciblait les personnels soignants, les résidents, les visiteurs mais aussi les professionnels de santé ou prestataires de santé " externes ". Parmi les interventions :
- un accès facilité à une solution hydroalcoolique le lavage des mains, soit en petits flacons " format poche " soit via de nouveaux distributeurs;
- une campagne d'information sur le lavage et l'hygiène des mains, via des affiches et l'organisation d'événements;
- l'organisation de séances de travail en groupe dans chaque maison de soins infirmiers sur les directives, dans un objectif de formation des personnels ;
- l'accès à des questionnaires en ligne avec notation et accès à de nouvelles sessions de formation en cas de score pas assez élevé ;
L'analyse de différentes données confirme l'efficacité de ce type de programme dans ces structures, avec notamment,
- une consommation moyenne de solution hydroalcoolique plus élevée dans le groupe d'intervention (7,9 mL par résident et par jour vs 5,7 mL dans le groupe témoin),
- une mortalité plus faible (2,10/100 résidents par mois dans le groupe d'intervention vs 2,65 dans le groupe témoin),
- moins de prescriptions d'antibiotiques (5,0 vs 5,8 doses quotidiennes/100 jours-résidents),
- un taux de mortalité inférieur de 30% dans le groupe d'intervention en janvier-mars 2015, en pleine épidémie de grippe ;
- enfin, des résultats qui commencent à émerger entre 3 et 6 mois après la mise en œuvre du programme et qui cessent en cas d'arrêt du programme.
Si l'étude montre tout l'intérêt de tels programmes multicibles dans des structures non-hospitalières, comme les maisons de soins infirmiers ou les services de long séjour (EHPAD) destinés aux patients âgés, elle montre aussi la nécessité de ne jamais relâcher l'effort. Les auteurs soulignent les taux d'adhésion généralement faibles des personnels des maisons de soins infirmiers et dans de nombreux pays (ex : 14,7% au Canada). En regard de ces taux, la marge de progrès apparaît donc considérable pour réduire les infections, les prescriptions et les décès chez les résidents âgés.