McMafia est une co-production entre la BBC One et AMC aux Etats-Unis. Les deux chaînes diffusent la série et bien que les américains ne soient pas loin, on sent tout de même la patte britannique. Créée par Hossein Amini (scénariste de Drive, dont le remake indien est en cours de tournage, mais aussi récemment du Bonhomme de Neige) et James Watkins (Eden Lake, Bastille Day), ce n’est pas la première fois que l’on parle de mafia russe dans une série, surtout que les russes sont souvent à l’honneur (The Americans, Occupied, Allegiance, et j’en passe). Mais McMafia tente de changer un peu la donne en proposant alors une réflexion sur le crime organisé international au travers d’un casting solide, composé notamment de James Norton (Grantchester, Happy Valley), Juliet Rylance (The Knick, Frances Ha) et David Strathairn (Blacklist, Alphas). La série élude alors certains poncifs afin de nous plonger dans un univers mafieux différent des clichés que l’on a pour habitude de voir. Le casting est d’ailleurs suffisamment grand pour sortir de cette idée de famille impliquée dans des affaires mafieuse et les changements de lieux permettent de dépayser un téléspectateur qui n’a donc pas vraiment le temps de s’ennuyer. Bien au contraire.
Alex Godman a passé sa vie à échapper l'ombre de ses parents et à leurs liens avec la mafia russe. Il a bâti son propre business légal et se construit une vie avec sa petite amie. Mais lorsque le passé meurtrier de sa famille ressurgit, Alex plonge dans le milieu criminel et ses convictions les plus profondes sont remises en cause lorsque la protection de sa famille devient sa priorité.
Si le fond de la question reste le nerf de la guerre (l’argent), McMafia sait comment nous fasciner avec sa petite aventure. Inspirée du livre de non-fiction de Misha Glenny (The Lasty Panthers), McMafia décide donc de ne pas trop facilement nous faire découvrir ce qu’elle veut raconter. En nous plongeant dans un monde d’envergure international, McMafia est déjà à la hauteur de ses ambitions car elle n’a pas peur et surtout elle a les moyens de ses ambitions. Afin de raconter cette histoire, les deux créateurs (et donc le livre original) prennent le prisme d’Alex Godman, incarné par James Norton (qui en fait le moins possible d’un point de vue expressions faciales pour le rendre sûrement plus sérieux). C’est le fils d’une famille russe, qui a immigré sur le sol britannique il y a de ça plusieurs années et qui, en immigrant, a décidé de mettre son passé derrière elle. Sauf que ce passé va rattraper Alex. C’est au moment où son oncle se fait tuer sous ses yeux que tout bascule et que la série nous plonge alors dans une histoire complètement différente. Alex veut se venger de la mort de son oncle et décide alors de plonger dans le passé de ses parents afin d’assouvir sa vengeance.
Là aussi, on retrouve le sempiternel questionnement du bien et du mal, du fait de détruire tout ce que l’on a construit pendant des années pour vivre une vie tranquille, bla-bla-bla. Sauf que McMafia a la chance de ne pas s’arrêter là et de réellement nous plonger dans son univers assez sombre. Par ailleurs, la série décide de ne pas se laisser avoir par le manque de moyens. C’est pourquoi la multiplication des lieux permet de rendre le produit beaucoup plus pertinent et surtout joli à suivre. On passage de Londres à Mumbai, en passant par Tel Aviv, Moscou, Prague et j’en passe. D’un point de vue géographique, culturel et géopolitique, McMafia décide d’implanter son histoire comme un film qui aurait eu les moyens de pouvoir tourner dans tous ces pays. Si visuellement, la mise en scène reste très classique pour une série et que le tout se fait en toute sobriété, ce n’est pas forcément une mauvaise chose. Le téléspectateur se concentre alors sur les dialogues et le récit plus que sur les décors de carte postale que la série aurait pu mettre en avant pour cacher la misère. Surtout que ce n’était pas facile au départ de voir où est-ce que cet angle international pouvait nous embarquer tant il n’était pas toujours aussi lisible qu’il n’aurait dû l’être.
Ce que McMafia réussi cependant à faire c’est montrer que les actions ont toujours des conséquences. Ce que Alex peut faire (ou d’autres personnages dans la série) va avoir des conséquences sur d’autres personnages dans d’autres régions du globe. C’est là que McMafia devient beaucoup plus palpitante et qu’elle donne vivement envie d’enchaîner les épisodes (ce que j’ai fais sans lâcher). McMafia ne s’arrête jamais vraiment à ses aventures de mafioso car elle veut aussi réfléchir sur des thématiques plus politiques ou sociétales comme l’immigration, la délocalisation, la criminalité rendu simple par le système (notamment le monde bancaire), etc. Sans compter que McMafia n’évite pas non plus les histoires de famille et faire remonter le passé car c’est de ça qu’il est question au départ dans cette série. Si la série décide d’harponner énormément de sujets, tous ne trouvent pas forcément un intérêt ou une singularité qui pourrait rendre le récit encore plus impressionnant. C’est suffisamment solide pour captiver mais par moment la réflexion part un peu trop dans tous les sens et aurait mérité de se concentrer uniquement sur certains aspects plutôt que de tout balayer d’un coup d’un seul sur seulement huit épisodes.
Les drames familiaux ne sont pas mauvais mais ralentissent par moment le processus que la série cherche à mettre en scène au travers des histoires de criminels. On retrouve alors du point de vue de ces dernières des personnages charismatiques comme Vadim Kalyagin, le mafieux incarné par Merab Ninidze ou même ce businessman israélo-russe Semiyon Kleiman (incarné par David Strathairn). Chacun des personnages a un but précis que l’on découvre au fur et à mesure que les épisodes s’enchaînent et à l’issue de McMafia, on a presque envie de voir plus souvent des séries de ce genre là fleurir. Car même si McMafia a de nombreux défauts, elle reste suffisamment sobre et intelligente pour ne pas trop dévier de ce qu’elle veut nous raconter au départ. Dommage que McMafia ne sache pas vraiment comment s’y prendre pour sortir du lot et être LA série évènement qu’elle était destinée à devenir.
Note : 6/10. En bref, captivant mais peut mieux faire.