Jusqu’à la Garde // De Xavier Legrand. Avec Denis Ménochet et Léa Drucker.
Dans une période cinématographique assez pauvre, Jusqu’à la Garde est une bonne surprise. Je dirais que c’est la première bonne surprise française de l’année racontant une histoire sous tension constante où l’on ne sait pas forcément où est-ce que l’on est et ce que l’on peut attendre de chacun des personnages. Xavier Legrand (Avant quel de tout perdre) retrouve alors Léa Drucker (Avant que de tout perdre) dans ce qui ressemble à un thriller psychologique où chacun des personnages joue un peu une sorte de double jeu. Jusqu’à la Garde sait bousculer le spectateur au fond de son siège en le mettant dans une position intense qui ne nous lâche jamais jusqu’au bout. L’émotion est palpable par moment mais en ressort alors une boule de nerf dont il est difficile de ressortir indemne. Jusqu’à la Garde n’a de cesse de nous prendre aux tripes, avec des rebondissements et des réactions inattendues des personnages qui permettent de se poser encore plus de questions que l’on ne pouvait l’imaginer au départ. La sobriété de grain de la mise en scène permet de créer un climat particulier où tout peut arriver, même les choses les plus terribles. Le casting est lui aussi pour beaucoup dans la réussite de ce film, alors que les faces à faces entre Denis Ménochet et Léa Drucker deviennent toujours de grands moments de cinéma.
Le couple Besson divorce. Pour protéger son fils d’un père qu’elle accuse de violences, Miriam en demande la garde exclusive. La juge en charge du dossier accorde une garde partagée au père qu’elle considère bafoué. Pris en otage entre ses parents, Julien va tout faire pour empêcher que le pire n’arrive.
Jusqu’à la Garde prend pourtant un sujet complexe qui est celui des violences conjugales. Il était difficile de savoir qu’attendre mais le résultat est là. Le film maîtrise l’intensité de son récit grâce à un processus destructif où chacun des personnages semble vouloir écraser l’autre à sa façon. La violence conjugale reste une thématique actuelle, et le film débarque au cinéma sans prévenir afin de nous offrir un vrai coup. Après le film, on reste encore dans Jusqu’à la Garde jusqu’au bout. Car le film ne se fait pas avec des artifices en tous genres, ennuyeux, et préfère alors creuser dans la personnalité de chacun de ses personnages pour en puiser le meilleur. En prenant ce sujet à corps et avec tact, Jusqu’à la Garde sait comment s’y prendre pour raconter ce récit douloureux, prêt à hanter le spectateur. L’intérêt de Jusqu’à la Garde est finalement de ne pas être prévisible et de nous faire comprendre seulement au fur et à mesure le dénouement étonnant et inespéré. Les clés du récit sont alors délivrées petit à petit afin de comprendre ce que chacun des parents retient au fond de lui. Primé lors de la dernière Mostra de Venise (Lion d’argent du meilleur réalisateur et Lion du futur), il fallait s’attendre à un film réussi, ce qui est le cas.
Note : 9.5/10. En bref, un film choc.