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Les 23èmes Jeux Olympiques d’hiver viennent de clôturer leur cérémonie d’ouverture, à Pyongchan, en Corée du Sud, sous un froid glacial qui cherchait à contraster avec un certain réchauffement des relations diplomatiques entre la Corée du Sud, pays organisateur et sa voisine du Nord. En effet, à l’occasion de ce grand évènement sportif, Kim Yo Jong, la sœur du dictateur nord-coréen Kim Jong Un, a fait le voyage pour rencontrer Mr Moon, le dirigeant du Sud. Cette tentative de briser la glace succède à un rapprochement timide des deux nations du même sang qu’une guerre a séparées depuis 1945 (une tentative de réunification ayant échoué en 1948). En effet, les athlètes des deux camps coréens avaient déjà amorcé les premiers pas. Une équipe de hockey sur glace réunit les compétiteurs nord et sud-coréens et la délégation coréenne a défilé avec un drapeau unique représentant la réunification des deux états. On pourrait se bercer d’illusions et croire à une réelle pacification des relations entre Séoul et Pyongyan. En réalité la prudence doit rester de mise. Les JO ont toujours représenté une jolie vitrine humanitaire et les valeurs du sport, lorsqu’elles ne sont pas bafouées par des affaires de dopage (n’est-ce pas Mr Poutine ?) peuvent, momentanément, nous rapprocher d’un idéal planétaire où les hommes vivraient d’amour et dans lequel les soldats seraient troubadours ainsi que le chantaient trois canadiens. Oui, les JO n’excluent pas la méfiance à l’égard de Kim Jong Un. Ce dernier n’a-t-il pas récemment effectué des essais nucléaires, menaçant son voisin du sud et affirmant être en mesure d’envoyer, éventuellement, une gentille bombinette sur le territoire américain ? Oui, l’opération de charme de Kim Yo Jong ne doit pas faire oublier le long chemin qu’il reste à parcourir pour la réunification des deux états. Les Américains sont sur leur garde et les mesures de rétorsion économique sont maintenues. L’Oncle Sam, par la voix de son chef Trump, entend monter qu’il n’est pas dupe de telles manœuvres de séduction. Oui, les JO d’hiver, dans leurs arabesques sur glace, leurs prouesses neigeuses, leurs combats de crosses pour le gain d’un palet, ne peuvent totalement gommer la violence du monde. Tandis que des champions chercheront à dépasser leurs limites, d’autres seront franchies, encore et encore, dans l’escalade meurtrière qui règne en Syrie. Le maître de Damas, profitant des revers de l’Etat Islamique sur son sol, peut désormais consacrer ses efforts guerriers pour réduire à néant les poches de résistance à son régime. Les forces de Bachar ont à nouveau bombardé, ce vendredi 9 février, l’enclave de la Ghouta orientale, proche de Damas. C’est un nid de rebelles, aux yeux de l’autocrate, et rien ne lui sera épargné. Les soldats syriens frappent aveuglement dans cette zone qualifiée pourtant de « lieu de désescalade » en vertu d’un accord appuyé par la Russie, alliée de la Syrie. En d’autres termes, tout devrait être mis en place pour réduire les combats. La réalité est tout autre : Bachar s’acharne et tue sans distinction hommes, femmes et enfants. En cinq jours, 240 civils y auront perdu la vie. Plus haut nord, à la frontière avec la Turquie, les armées d’Erdogan, le maître d’Ankara, pilonnent intensivement les Kurdes syriens à Afrin, région multiethnique contrôlée par le Parti de l’Union Démocratique (PYD) soutenu par les USA. Pour Erdogan, les Kurdes sont des terroristes, potentiellement nuisibles pour l’équilibre de son régime qu’il se veut de plus en plus autoritaire. Au nom de la sécurisation de ses frontières le maître ottoman fait parler la poudre et risque de commettre, à tout moment, la bavure. En effet, l’opération militaire turque contre Afrin appelée « Opération bouclier de l’Euphrate » risque d’envenimer les tensions au sein de l’OTAN, mettant non seulement les troupes turques en conflit avec les milices kurdes soutenues par les États-Unis, mais aussi avec les troupes syriennes qui continuent leur marche vers le nord du pays !
Une véritable poudrière menace la planète que des jeux d’hiver ne sauront que provisoirement enchanter… On aimerait si fort se bercer d’illusions Dans le lit rassurant des bonnes intentions On voudrait voir la neige de son blanc olympique Couvrir l’horreur du monde et les armes chimiques.
On danserait si bien sur la glace étoilée Qui tapisse l’hiver de l’étrange Corée Si ne pointait pas l’ire des querelles à venir Entre deux camps dressés à devoir se haïr.
On voudrait respirer la sportive insolence Qui fait fi des rancœurs, éteint la violence Mais la flamme éclairant cinq anneaux symboliques Projette aussi quelque ombre aux noirceurs maléfiques
On aimerait voir la paix dans tes yeux, Kim Yo-Jong Jolie fée dépêchée dans ce jeu de ping-pong Où le filet se tend jusqu’au bord des ruptures Ton sourire avenant peine à gommer blessures…
On danserait si bien sur le neigeux manteau En rêvant d’avenir sous des cieux bien plus beaux Mais le sang coule encore dans le fracas syrien Il pleut tonnes d’obus en éclats diluviens…
On voudrait longuement ne voir que la beauté Au fil des fééries de ces sports aux sommets Le sultan d’Ankara nous remet en mémoire Que l’épreuve des guerres tache encore son histoire…