Quelques géants de la grande distribution ont lancé leur offre « bancaire ». D'autres prennent position sur le crédit et, selon la rumeur, l'assurance… Pourquoi ces acteurs ne pourraient-ils pas également s'attaquer au conseil en investissement ? Le défi ne fait pas peur à l'américain Overstock et l'aventure n'est pas si stupide qu'il y paraît.
Certes, les professionnels de la finance se gaussent depuis l'annonce, en soulignant l'incongruité (voire l'absurdité) apparente de la démarche de la part d'un spécialiste de la vente en ligne de meubles, d'articles de mode et d'accessoires divers et variés. Naturellement, il serait difficile de leur donner tort… si l'initiative visait leur clientèle, nantie et encline à rechercher un accompagnement personnalisé. Or il n'en est rien : comme tous les robo-advisors, elle a une autre cible… et des arguments pour l'atteindre.
D'emblée, la simplicité du modèle marque l'ambition d'Overstock. Pour un abonnement fixe, tout compris, de moins de 10 dollars par mois, les clients se voient ainsi donner le choix entre 3 styles d'investissement (conservateur, modéré ou agressif), complétés par une option d'allocation dédiée. Particularité notable, les portefeuilles sont investis directement en actions (et non en ETF, comme il est désormais d'usage). La qualification du profil de risque lors de l'entrée en relation est elle-même réduite à 2 questions.
Avec une telle facilité d'accès, le pari que fait le e-commerçant est classique : puisque ses 40 millions de visiteurs uniques chaque mois – dont une forte proportion, à l'image de l'ensemble de la population américaine, n'épargnent pas suffisamment pour leur retraite ou même pour faire face à un accident de la vie – lui font déjà confiance pour leur faire réaliser des économies sur leurs achats, ils devraient être réceptifs à l'idée que la même entreprise leur propose une solution d'investissement adaptée à leurs besoins.
Overstock dispose en outre d'une botte secrète dans son approche. En effet, tandis que les conseillers en investissement traditionnels délaissent notoirement la clientèle féminine et continuent à s'adresser principalement aux hommes, son PDG, Patrick Byrne, est convaincu depuis toujours du pouvoir de décision des femmes en matière financière. La stratégie commerciale qu'il a mise en place sur la base de cette croyance fait que, aujourd'hui, deux tiers de sa clientèle est composée de femmes, possédant un peu d'argent, qui constituent donc une cible de grande valeur pour le nouveau produit.
Je le rappelais en introduction, Overstock n'est pas le premier distributeur qui tente sa chance dans le secteur financier et, jusqu'à maintenant, peu de ces expériences ont connu un succès retentissant. Mais, quelle que soit la fortune que lui réserve l'avenir, et avant de susciter le dédain et les moqueries des acteurs historiques, son initiative devrait d'abord servir de tremplin à une réflexion en profondeur sur les lacunes et faiblesses des offres existantes, qu'elle met en évidence, et qui sont autant d'opportunités.