J'ai du mal à croire que le long week-end est déjà terminé et que le prochain est encore plus proche, mais on en aura bien profité, de façon inattendue d'ailleurs. Ayant assez vite abandonné l'idée d'aller passer les 5 jours quelque part, nous n'avions pas pour autant envie de rester en ville tout le temps, donc nous avons coupé la poire en deux. Assez de temps pour se détendre et profiter du beau temps à la maison, et un peu d'air (pas si) frais à la montagne, voilà un bel équilibre.
A tout hasard, vendredi, j'avais emprunté un guide de randonnées en BC à la bibliothèque, et samedi soir, pleine d'enthousiasme, je choisis la rando d'Elfin Lakes. Je ne sais pas ce que j'ai bu, mais me voilà déterminée à faire les 22 km (11 aller-11 retour quand même) et les 600 m de dénivelé. Ok, c'est pas la mer à boire, mais il faut avoir fait des randonnées avec moi pour trouver la chose étonnante et même inquiétante. Je suis une râleuse de rando. Je ne comprends jamais pourquoi il faut qu'on s'emm... à monter monter monter, s'essouffler, avoir chaud, avoir soif et j'en passe, pour rester ensuite 5 minutes à regarder un lac ou une montagne ou un autre truc du genre, beau j'en conviens, mais qui ne vaut pas tous les efforts qu'on vient de fournir, pour ensuite tout bêtement redescendre et rentrer à la maison.
Mais là, je ne sais pas, j'avais envie de faire quelque chose "d'extrême" (tout est relatif) et aussi de faire passer mon sentiment de culpabilité d'avoir englouti un cheeseburger avec des grosses frites au Bridges sur Granville Island vendredi soir avant d'aller écouter Hannah Georgas au Backstage Lounge. En passant, le même burger du même pub qui en hiver coûte 9 dollars et est super bon est soudainement passé à 17 dollars et a baissé en qualité, juste parce qu'il y a du soleil (et des nanas, tarladi-etc.). Une honte...
Bref, j'avais des choses à me faire pardonner, j'avais envie de me dépasser, j'ai convaincu sans problème mon homme de chausser ses bottes et de m'emmener à Squamish, d'où part le sentier qui mène à deux beaux lacs (selon ce que j'ai vu sur différents sites web). Voici une vue alléchante de la destination finale, que l'on peut trouver sur Flickr:
Et nous voilà partis aux aurores, les sacs à dos pleins de bonnes choses -on a fait des quiches la veille et plein de bons sandwiches au thon- et l'enthousiasme débordant. Ca monte pas mal, mais c'est supportable. Ca et là, on aperçoit des montagnes, et on arrive à des jolies chutes devant lesquelles on fait une première mini-pause-framboises. A partir de là, ça ne prend pas très longtemps avant que le sentier soit partiellement, puis complètement, couvert de neige. Je m'attendais bien à ce qu'il en reste un peu, mais tant que ça, jamais. Je commence à m'inquiéter pour le retour, ça va être joyeux de redescendre dans la neige... Mais bon, chaque chose en son temps, pour le moment, ça monte, ça monte. Ca monte encore, mais je respire toujours. C'est impressionnant de marcher dans toute cette neige tout en crevant de chaud comme ça; à un moment, je me crois presque dans le désert, ça frôle l'insolation, là.
J'avais lu que ce sentier était populaire, mais nous ne croisons que quelques personnes en chemin. Sans doute la plupart des gens savent que ce n'est aps une bonne idée de faire cette rando fin juin... Le garde forestier se croit encourageant quand il nous annonce qu'il ne nous en reste que pour une heure de marche, mais ça m'achève. Et finalement, après quelques heures et quelques pauses, agrémentées de quelques glissades sur les fesses (ça rafraîchit!), alors que je commence à en avoir franchement ma claque de monter et de marcher dans la neige, voilà les fameux lacs. GELÉS!
C'est incroyablement beau mais moi qui m'imaginais le matin même que j'allais pouvoir nager, mettons que je dois me faire une raison. Et comme on a pris pas mal de temps pour monter, on ne peut pas se permettre de rester des heures pour se remettre de tous ces efforts. Jeremy remplit sa bouteille d'eau dans le lac cristallin, et nous repartons sans trop tarder. Aussitôt, mes genoux qui ne sont pas fanas de la descente commencent à manifester leur mécontentement. La montée a été longue, la descente sera interminable. Chaque pas me tire un gémissement, je me traîne misérablement pendant que mon cher et tendre galope joyeusement à des kilomètres en avant. La douleur devient telle que je me dis que je n'y arriverai pas. Je m'assois dans la neige pour pleurer toutes les larmes de mon corps -comme si ça allait changer quoi que ce soit au fait que je dois encore me taper 7 ou 8 km avant d'arriver à la voiture...
Clopin clopant, en fredonnant des chansons de Nick Drake (ça semble apaiser la douleur), je finis par voir la lumière à la sortie de la forêt. C'est alors que j'entends mon homme, qui est toujours loin devant, m'appeler et me dire de ne plus bouger. Il arrive avec une drôle de tête, et pour cause, il vient voir un gros ours arriver dans sa direction. A ce stade-là, je suis tellement fatiguée que ça ne me fait (presque) plus rien. Sauf que franchement, si je dois mourir attaquée par un ours, pourquoi c'est pas arrivé 11 kilomètres plus tôt? Que les dernières heures de ma vie se soient déroulées dans une telle souffrance, c'est pas juste... Gros dilemme, on ne sait pas trop quoi faire. Un type (qu'on avait vu monter la montagne en courant le matin même) arrive, et nous décidons de descendre tous les 3 en criant et en tapant des mains. On ne reverra pas l'ours, thank God, la voiture n'est plus loin.
Après toutes ces émotions, il ne nous reste plus qu'à rejoindre Pemberton où nous avons réservé une chambre dans un B&B, et à se jeter sur la bière et la pizza tant attendues. Il va encore falloir que je marche des kilomètres pour éliminer tout ça, du coup...