C'est en me baladant sur Pitchfork que je tombasse sur Jay Reatard. "Avec un nom pareil (retard = débile), il ne peut faire que du punk" me dis-je. En même temps une photo de Bétancourt venait quelques minutes plus tôt de me faire penser à Joey Ramone, j'étais un peu fatiguée. Mais non, Jay Reatard est bien en passe de devenir un artiste punk culte. Il y a même un best-of de ses "singles" qui est sorti récemment.
"Mais c'est qui ce mec ?"
Jay Reatard (de son vrai nom Jay Lindsey) est quelqu'un de plutôt prolifique puisqu'il a produit une bonne cinquantaine de CD, que ce soit des EP ou LP avec ses différents groupes (The Reatards, Terror Vision...) ou projets parallèles, ou en tant que "Jay Reatard". En tant que lui-même il n'a sorti qu'un album, c'est celui que j'ai trouvé : Blood Visions, sorti en 2006, dont on était extraits plusieurs singles, beaucoup se sont retrouvés sur la compilation de singles chroniquée par Pitchfork, mais dans des versions alternatives, ou démos...
Concrètement, ce que fait Jay Reatard, c'est du punk à se rouler par terre et à sauter à poil une bière à la main en hurlant des insanités que je n'oserais vous retranscrire ici, avec des touches de new wave (notamment les synthés), mais c'est surtout du bon gros punk ramonesque aux mélodies (ouais, y a des mélodies) accrocheuses, aux riffs de guitare binaires (j'exagère à peine) et aux performances live qui font déjà l'objet de légendes eunedeurgraoundes. En effet les concerts de Jay Reatard durent rarement plus de 30 minutes (en même temps seules 6 des 15 chansons de Blood Visions font plus de 2 minutes, ça va vite, très vite, ça faisait d'ailleurs bien longtemps que j'avais pas écouté un album de moins de 30 minutes !) et se déroulent encore plus rarement dans le calme, sans chaises cassées ou verres balancés dans la foule. Sur son blog, Jay s'amuse d'ailleurs de sa réputation de "asshole" sur scène, confirmée par un classement des "meilleurs" (sic!) pétages de plombs sur scène effectué par l'équipe du blog de Limewire.
Vient le moment où il faut vous donner des repères, c'est assez facile : la voix de Jay Reatard est un mélange de Franck Black (The Pixies, vous connaissez ça), Gaz Coombes (Supergrass, vous connaissez ça) et Jack Black (White Stripes/Raconteurs). La musique fait forcément penser aux Ramones, Devo, Stooges et autres New York Dolls. Il y a des riffs de guitare à vous hérisser les poils sur les bras, des trucs parfaitement jouissifs qui font autant plaisir que le riff de "Now I Wanna Sniff Some Glue" des Ramones (1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8 tadadadadadadadadada) ou que le "No Fun" des Stooges en vitesse accélérée.
Les paroles ne valent pas grand-chose, 'faut bien le dire, la musique n'a rien de révolutionnaire, c'est du garage/punk/rock bon pour générer de joyeux pogos et la reprise en choeur de ses refrains pop, sans apologie de l'adolescence (pas sur cet album, mais deux de ses premiers EP se nomment Teenage Hate et Grown Up Fucked Up, Jay a grandi, mais est toujours aussi retard) ou de la violence gratuite, non, non, c'est juste du tapage rock n' roll comme il en faut et comme il en manque sûrement à la radio (j'écoute plus la radio, dites-moi si vous y entendez du punk parfois, ce serait surprenant). L'album Blood Visions est en passe de devenir culte, je n'en dirais pas autant sur la qualité, c'est très bon, mais c'est paaaas non pluuuuuus... Evidemment, c'est répétitif parfois (c'est du punk), et les paroles sont assez mielleuses de temps en temps (en même temps vous avez lu les paroles de "I Wanna Be Your Boyfriend" des Ramones ?), mais bon dieu, quel pied !!!
7/10
Je vous propose 2 extraits de Blood Visions (montez le son, ça s'écoute fort) : "My Shadow" (3'18", la plus longue) et "Oh It's Such A Shame" (2'28") (si les ayant-droits veulent virer ces extraits, qu'ils se manifestent) :
Voilà la vidéo du fameux pétage de plomb de Jay (c'est avec ce genre de choses que des légendes se construisent, les colères de Keith Richards ou Angus Young sont aussi réputées) :