Ecrite et mise en scène par Xavier LemaireDécor de Caroline MexmeLumières de Stéphane BaquetCostumes de Marie-Thérèse Roy
Avec Isabelle Andréani, Franck Jouglas, Xavier Lemaire ou Alain Sachs
Présentation : Et si la première scène du Médecin malgré lui de Molière vous était présentée dans trois versions différentes ?Zigzag ou le pourquoi du comment de l’art de la mise en scène dans un spectacle ludique et surprenant…
Mon avis : Si vous êtes amateur d’ovnis, cette pièce est pour vous.D’abord, il ne faut pas arriver en retard au Petit Montparnasse car le spectacle commence avant le spectacle. Ce préambule nous conditionne sur ce qui nous attend : ça sent le burlesque !
Zigzag est une sorte de master class. Un metteur en scène quelque peu grandiloquent (Xavier Lemaire) nous invite à une conférence au cours de laquelle il va nous démontrer à travers différentes interprétations le rôle et l’influence que ses pairs peuvent avoir sur la lecture d’une pièce et, partant, sur le jeu des acteurs. Pour cela, il va s’appuyer sur trois versions différentes – personnellement, j’en ai vu quatre – de la première scène ô combien trépidante du Médecin malgré luide Molière.
Photo J.B. Vincens
Voilà, le postulat est posé… Après avoir attiré notre attention sur le pouvoir prépondérant de l’imaginaire, il va faire appel aux deux seules personnes dont il dispose, le régisseur de plateau en chef et son assistante débutante. Ça part d’un bon sentiment. Lui, il est tout entier tourné vers sa démonstration, il prend sa mission didactique très au sérieux ; le problème, c’est qu’il va avoir affaire à deux véritables branquignols… Son bel académisme va singulièrement se déliter pour partir carrément en sucette.
Ce qui est bien, c’est que le déroulement de la pièce va crescendo. Ça démarre comme un diésel et ça se termine comme une Formule 1. Mais essayez de faire des zigzags avec une Ferrari… Vous êtes bon pour une sortie de route. En clair, on part d’une version classique du Médecin malgré luipour finir sur une transcription post-moderne totalement déjantée.
Photo J.B. Vincens
Ce spectacle insensé ne pourrait exister sans la présence étourdissante des deux branquignols en question : Franck Jouglas et Isabelle Andréani. Quelle prestation ils nous offrent ! Quel éventail de jeu ! Quelle présence ! Ils sont l’un et l’autre véritablement époustouflants. Il n’y a pas d’autre mot. Ils osent tout. S’ils peuvent se le permettre, c’est parce qu’ils savent tout faire. Leur inventivité est vraiment jubilatoire. On se demande en permanence jusqu’où ils vont aller. Et puis on abandonne car ils vont encore plus loin que ce que l’on avait osé imaginer. C’est de la folie pure. Mais une folie totalement maîtrisée car servie par un jeu parfaitement abouti.
Photo J.B. Vincens
Le pauvre metteur en scène a le talent de savoir s’effacer devant eux. Il fait celui qui a tout imaginé et qui, quand tout lui échappe, feint d’en être l’organisateur. Procédé connu qui s’appelle de la récupération. Le jeu de ce personnage qui se veut être deux ex machina et qui, de toute façon, restera droit dans ses convictions se doit d’être tout en nuances et en déséquilibre permanent. Xavier Lemaire s’en tire à merveille. Tout en gardant sa superbe, il sait que, quoi qu’il fasse, il va se faire voler la vedette par ces deux hurluberlus géniaux, ces deux clowns modernes. Il faut une certaine dose d’humilité.
Photo J.B. Vincens
Zigzag est une pièce qui fait l’apologie du théâtre, qui rend un vibrant hommage aux acteurs et qui tente de définir la fonction de metteur en scène.En tout cas, hier soir, avec Franck Jouglas et Isabelle Andréani, j’ai vu sur scène deux véritables phénomènes (définition de phénomène : Personne qui se fait remarquer par son caractère extraordinaire, singulier, exceptionnel ; qui surprend par son originalité, son caractère excentrique).
Gilbert « Critikator » Jouin