Sans prétendre à identifier les recettes magiques qui font la réussite de certains entrepreneurs (et les échecs de beaucoup d'autres), ce livre (que j'avoue ne pas avoir encore lu intégralement) offre une analyse objective approfondie des caractéristiques communes aux plus grandes réussites de l'accélération exponentielle qui constitue toute la différence entre une simple PME classique et une véritable startup. Les auteurs en ont identifié 5, toujours présentes, quel que soit le secteur d'activité considéré.
Or, aujourd'hui, les entreprises traditionnelles affirment régulièrement vouloir fonctionner comme des startups. Si ces prétentions ont une quelconque réalité, il semble légitime de vérifier si elles ont aussi adopté les attributs les plus représentatifs de leurs modèles. À défaut, ce seront autant de pistes d'amélioration que pourront trouver ici les acteurs qui désirent sincèrement progresser dans leur capacité de croissance par l'innovation (et il n'est pas indispensable que ce soit à l'échelle d'une organisation multi-nationale).
Sans surprise, la première qualité d'une startup à fort potentiel est de porter une vision radicale : les plus convaincantes sont celles dont le fondateur et l'équipe visent à transformer le monde. De toute évidence, une telle mission n'a pas fait partie des objectifs de la plupart des grands groupes depuis longtemps, et même leurs tentatives de création de nouveaux produits ont normalement des ambitions plus limitées.
La volonté et la détermination inébranlables qui accompagnent la vision, avec un socle formel de valeurs et de rites partagés contribuent à créer une culture d'entreprise qui cimente l'organisation et l'aide à avancer au fil des à-coups de l'accélération. Elle est, en particulier, une des clés du niveau extrême d'exigence qui s'exerce sur les collaborateurs, autant en matière de compétence que d'engagement.
Et dans une grande entreprise ? L'absence de culture commune commence à ressortir comme un handicap sévère, mais il faudra beaucoup de temps et d'efforts avant d'y pallier. Pour cette raison, entre autres, les salariés peu impliqués restent les plus nombreux et, surtout, ils poursuivent des objectifs personnels (généralement de promotion hiérarchique) qui ne convergent pas avec les intérêts de leur employeur.
Vient ensuite l'obsession de la mesure. Dans une startup à la recherche d'un modèle viable, les indicateurs de performance sont rois, ils sont évalués et pilotent l'activité en temps réel. En apparence, il en est plus ou moins de même dans les organisations historiques. Pourtant, il existe une différence essentielle : dans un cas, c'est toute l'entreprise qui est concernée par les mêmes indicateurs, tandis que, dans l'autre, l'écart entre la mesure et les actes du quotidien est souvent abyssal (en délai et en contenu).
Enfin, le dernier critère est celui de l'accès au financement. Celui-ci est évidemment à l'avantage des acteurs établis, à condition que les rouages décisionnels soient adaptés. En synthèse, sauf rares exceptions, les grands groupes n'ont quasiment aucune chance d'acquérir l'agilité et la capacité d'innovation des startups sans remettre en question les fondements de leur fonctionnement actuel. En attendant d'avoir opéré la transformation nécessaire, peut-être est-il préférable de confier la disruption à une entité distincte…