Première femme directrice de publication d’un grand journal américain, le Washington Post, Katharine Graham (Meryl Streep) s’associe à son rédacteur en chef, Ben Bradlee (Tom Hanks), pour dévoiler un scandale d’État monumental et combler son retard par rapport au New York Times, qui mène ses propres investigations. Ces révélations concernent les manœuvres de quatre présidents américains, sur une trentaine d’années, destinées à étouffer des affaires très sensibles. Au péril de leur carrière et de leur liberté, Katharine et Ben vont devoir surmonter tout ce qui les sépare pour révéler au grand jour des secrets longtemps enfouis.
Après Lincoln et Le Pont des Espions, Steven Spielberg poursuit son exploration de l’histoire américaine avec Pentagon Papers (The Post en VO), un drame historique passionnant qui résonne étrangement avec l’actualité. D’abord par son propos résolument féministe, symbolisé par le combat admirable d’une femme dans un univers d’hommes, mais aussi par sa défense perpétuelle de la liberté, tant d’un point de vue individuel que journalistique. En s’appuyant sur un récit d’une grande richesse, fait d’enquêtes trépidantes, de manigances sordides et de grands sentiments, le film pose des enjeux d’une ampleur considérable. Tellement considérable d’ailleurs que les personnages sont parfois réduits à leur plus simple expression. Hormis Katharine Graham et Ben Bradley, la plupart des protagonistes manquent effectivement d’épaisseur dramatique. Un défaut toutefois mineur au regard de la multitude de thématiques traitées au travers du duo principal. Plutôt biens écrits, les deux personnages sont, de surcroît, magnifiquement interprétés par Meryl Streep et Tom Hanks. L’actrice américaine maintes fois récompensée séduit notamment par l’émotion subtile qu’elle parvient à dégager tout au long de l’histoire.
Jamais manichéen, Pentagon Papers a la bonne idée d’exprimer concrètement les sujets qu’il aborde, sans se contenter de notions abstraites. L’ouverture en pleine guerre du Viêt Nam apparaît ainsi judicieuse pour exprimer clairement les problèmes soulevés par la suite. On appréciera également la faculté du long-métrage à poser en permanence les bonnes questions, même celles qui fâchent, en matière de journalisme, de gouvernement ou même d’émancipation féminine. Il en découle du coup un film qui invite constamment à la réflexion, chaque action des personnages, aussi noble soit-elle sur le papier, ayant des répercussions directes à différents niveaux de pouvoir. Pour autant, c’est justement dans l’approche démonstrative du film que réside sa principale faiblesse. A trop vouloir montrer les choses plutôt que de les suggérer, celui-ci perd en effet un peu en subtilité, s’apparentant parfois trop à un objet didactique et simplifié. Certes, la volonté de Steven Spielberg d’ouvrir cette histoire importante au grand public est infiniment louable et généreuse, mais davantage de complexité aurait néanmoins certainement servi le récit. Malgré tout, on ne peut contester la pertinence d’un tel choix compte tenu du message du film.
Plus nécessaire qu’exceptionnel, Pentagon Papers est donc un drame historique captivant qui résonne étrangement avec l’actualité. Entre enquêtes journalistiques et manigances politiques, le film s’appuie brillamment sur un épisode important de l’histoire américaine pour réveiller les consciences et valoriser le courage des lanceurs d’alerte. Formidable Meryl Streep !