Balkis est irakienne. A l'automne 1955, elle quitte son pays pour étudier la couture à Genève, choisie parmi tant d'autres parce qu'elle est la meilleure de sa classe... Mais, à la fin de l'année préparatoire, on ne veut pas d'elle. Par manque de place.
A la place... elle est envoyée aux Beaux-Arts de Lausanne:
J'aime la précision de la couture, la patience qu'elle exige, les heures à suivre les chemins tracés par les fils. Je ne comprends ni le dessin ni l'art en général, je ne suis pas en mesure de comprendre ces traits que l'esprit impose à une feuille de papier.Pour elle c'est donc un désastre.
Peu de temps après sa petite soeur Badiya, la fille préférée de son père, la retrouve à Genève. Baba lui a obtenu une bourse. Quelques semaines plus tard, Balkis déménage à Lausanne et trouve une colocation avec Ruth, une jeune étudiante de la même école.
Une année encore plus tard Ruth obtient son diplôme et commence à travailler, tandis que Balkis ne sait toujours pas tenir un crayon et s'imagine devoir rentrer au pays, après avoir échoué honteusement. C'est alors que Ruth lui présente David.
Moyennant finance David fera les croquis à la place de... Balkis. Ce qui sera un bon début pour faire connaissance... Mais connaissons-nous vraiment ceux que nous connaissons?
Avant de partir, mon père m'a dit: "Ma fille, j'aimerais que tu regardes ta main, que tu la regardes attentivement. Tu portes l'honneur de la famille à l'intérieur. Je t'en prie, prends-en soin, ne le salis pas. Je te fais confiance pour ne pas laisser l'Occident te faire oublier qui tu es, d'où tu viens."Pendant les décennies qui suivent, Balkis gardera ces paroles en mémoire. L'Occident refuge ne lui fera jamais oublier ni ce qu'elle est ni d'où elle vient, malgré qu'elle en ait...
Et, comme dans le récit biblique, après une douloureuse traversée du désert, le palais de Salomon sera son horizon, mais lui semblera toujours bien loin...
Francis Richard
Balkis, Chloé Falcy, 240 pages, Pearlbooksedition