Quand je peux, je vais voir l’exposition des finalistes du Prix Marcel Duchamp, au Centre Pompidou. Me tenir au courant des dernières nouveautés de l’art contemporain et constater sur quels critères les meilleurs artistes sont aujourd’hui choisis.
Cette année 2017 s’achevait, le lauréat était connu depuis deux mois déjà! Mais… je ne le savais pas! Je suis allée voir l’expo des 4 finalistes et…je suis très contente (et fière!) d’avoir préféré de loin le travail de Joana Hadjithomas et Khali Joreige, qui s’avéraient être les gagnants!
L’installation de ces Libanais s’intitule « Discordances/Uncomformities » (dans la lignée de leurs travaux précédents). Le visiteur circule entre de grands tubes en verre, dressés à la verticale, fixés au plafond et au sol par de fins câbles de métal. Comme des tubes à essai. D’où la sensation d’être dans un laboratoire. A l’intérieur de ces éprouvettes géantes ont été reconstitués les empilements de prélèvements réalisés par carottages. Ces derniers ont été effectués lors de gros travaux à Beyrouth, Athènes et Paris.
On a donc là, à hauteur de nos yeux, les strates de l’histoire de ces villes. Terre, cailloux et débris divers racontent la chronologie des temps passés. L’Anthropocène, essentiellement. C’est à dire les époques où l’intervention humaine s’est mise à agir sur l’environnement.Aux murs de la salle, Joana Hadjithomas et Khalil Joreige présentent aussi des relevés stratigraphiques. Des photos allongées de ces fameuses « carottes », à l’horizontale. En parallèle, des dessins précis reproduisant ces entassements de morceaux d’histoire. Et, enfin, des notes manuscrites expliquant le pourquoi et le comment de ces présences anciennes dans le sous-sol (« fragments d’amphore, silex taillés » ou « vestiges d’un aqueduc romain » ou « offrandes et bouteilles de parfum » ou « tsunami de 551 après JC » etc)
Un film sur grand écran, complète le tout – son à l’appui- montrant l’ampleur des travaux de déconstruction et reconstruction, la façon de faire des carottes etc.
Tout y est! Cette oeuvre possède une épaisseur extraordinaire (comme ça arrive de temps en temps en art contemporain!). Elle mêle le côté recherche scientifique, réflexions politiques et sociales, études historiques. Esthétique également. Oui, les superpositions d’éléments, à l’intérieur des tubes, derrière le verre qui déforme quelque peu la vision …c’est beau!
Et les croquis des deux artistes, reproduisant ces séries de fragments posés côte à côte… ils sont beaux! La mise en scène, enfin, est suggestive et crée l’intérêt et l’émotion. J’ai vu les visiteurs s’attarder. Fascinés. Touchés. Curieux.Jusqu’au 8 janvier 2018
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