Et si la génétique pesait plus fortement sur l'incidence des douleurs chroniques post-opératoires que les facteurs de risque cliniques tels que l'âge, le sexe, le tabagisme ou la technique d'anesthésie ? C'est bien la conclusion de cette étude à paraître dans la revue Anesthesiology : les variations génétiques expliquent un taux de douleurs postopératoires chroniques plus élevé, compris entre 7 et 12%, que les facteurs de risque cliniques.
La douleur postopératoire chronique est l'une des complications les plus courantes et parmi les plus sévères après la chirurgie. Les estimations concernant son incidence sont peu précises, entre 9% à 80%, cependant il est probable, écrivent les chercheurs, que des millions de patients souffrent de douleurs au site chirurgical, durant des mois, voire des années. De précédentes recherches ont également montré que la douleur chronique post-op affecte la qualité de vie, le fonctionnement social, les activités physiques et la santé mentale.
Il existe, révèle cette étude, des variations génétiques courantes qui pourraient permettre de déterminer la vulnérabilité d'un patient à la douleur chronique après la chirurgie et ces variations peuvent également contribuer à expliquer pourquoi certains patients souffrent de douleur persistante, explique l'auteur principal de l'étude, le Dr Matthew TV Chan, de l'Université de Hong Kong. " Jusqu'à cette étude, ces variations génétiques associées à la douleur chronique post-chirurgicale n'avaient pas été bien identifiées ".
L'analyse d'échantillons de sang de 1.152 patients ayant subi une chirurgie, centrée sur les variations génétiques de 54 gènes déjà associés à la douleur, rapprochée des données auto-déclarées des participants sur la nature et la sévérité des douleurs un an après la chirurgie, constate que :
- un an après la chirurgie, 21% des patients éprouvent toujours une douleur chronique post-chirurgicale ; 33% de ces patients qualifient leur douleur comme sévère ;
- ces mêmes patients souffrant de douleur signalent des difficultés à accomplir les activités du quotidien, des troubles de l'humeur, des difficultés à marcher, des problèmes de relations avec les autres, des troubles du sommeil et un mal-être. Leur état de santé général s'avère globalement dégradé.
- Une variation génétique en particulier sur un gène du système nerveux, le facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF ou Brain-Derived Neurotrophic Factor) s'avère la plus fortement associée à une augmentation de la douleur chronique post-chirurgicale. Ce point est d'ailleurs confirmé par l'équipe chez une souris modèle de douleur post-op.
Au final, concluent les auteurs, ces variations génétiques pourraient peser bien plus lourd que des facteurs cliniques habituels sur l'incidence des douleurs postopératoires chroniques. A terme, il serait probablement possible de détecter les patients les plus à risque pour une prévention et une prise en charge adaptées.
Équipe de rédaction Santélog