Objet céleste inédit traversant notre Système solaire, ʻOumuamua retient toute l'attention des astronomes qui n'avaient encore jamais pu étudier d'astéroïde venu d'un autre système solaire. Pour expliquer sa forme allongée si particulière, une étude propose qu'il s'agisse d'un débris d'une ancienne planète rocheuse.
Dans les épisodes précédents, nous avons vu qu'un objet venu de l'espace interstellaire a été détecté le 19 octobre. Il est le premier de ce type jamais observé, ce qui a obligé l'Union astronomique internationale (UAI) à créer une nouvelle nomenclature et à élargir son catalogue. L'astéroïde est donc désigné 1I/2017 U1 et surnommé ʻOumuamua ( " messager venu de loin et arrivé le premier "), clin d'œil à Hawaï, et à sa culture, où il fut découvert.
Le 20 novembre dernier, coup de théâtre : les observations réalisées avec le VLT révèlent que le corps céleste ressemble à un cigare, il est 10 fois plus long que large, il est de couleur rouge foncé (ce qui est le cas de certaines comètes ou certains astéroïdes de type D dans notre Système solaire), il est dense et pourrait être riche en métal. Une forme si inhabituelle, en tout cas pour un astéroïde, que des chercheurs se demandent si ce n'est pas un artefact... Pourquoi pas un vaisseau extraterrestre venu nous écouter ? Pour en avoir le cœur net, le programme Breakthrough Listen a consacré le 13 décembre 10 heures à l'écoute du mystérieux ʻOumuamua. On devrait bientôt en savoir plus à ce sujet.
Spéculations sur les origines de ʻOumuamua
D'où vient-il ? De quoi est-il fait exactement ? Quelle est son histoire ? Telles sont les principales questions que se posent les astronomes qui ne le quittent pas des yeux depuis sa découverte (il faut faire vite car l'astéroïde repart vers le milieu interstellaire). ʻOumuamua, premier voyageur (messager ?) interstellaire remarqué par l'humanité, a bien évidemment beaucoup de choses à nous raconter sur son lieu de naissance. À l'instar de nos astéroïdes et comètes, il a en quelque sorte piégé dans sa matrice, et donc enregistré, les ingrédients qui composaient la nébuleuse où il est né ainsi que les planètes autour de son étoile mère. De quoi nous éclairer sur les autres systèmes planétaires, sans à attendre de pouvoir s'y rendre. Sont-ils différents du nôtre ?
Une récente étude déposée sur Arxiv propose pour expliquer la forme très allongée, si particulière, de ʻOumuamua qu'il s'agirait d'un morceau d'une planète déchiquetée. Un éclat d'un monde qui aurait été mis en pièce par sa propre étoile et éjecté dans le cosmos.
Dans son scénario, l'auteur, Matija Ćuk, de l'Institut SETI, envisage que l'écharde vienne d'une étoile double. " Nous trouvons que les planètes géantes sont relativement inefficaces pour éjecter les petits corps des systèmes solaires internes des étoiles de la séquence principale et que les systèmes binaires offrent une bien meilleure opportunité pour les éjections de corps non volatils ", écrit-il. Et pour lui, les naines rouges sont de bonnes candidates pour son éjection car " très denses, elles sont capables de perturber complètement les planètes telluriques ". Une planète rocheuse 10 fois plus grande que la Terre aurait donc flirté trop près de son étoile et se serait retrouvée brisée par les forces de marée de celle-ci. Les débris auraient ensuite été projetés sur l'étoile-compagnon, créant ainsi des " éjectoïdes " qui parcourent la galaxie.
Le chercheur spécule que les astéroïdes interstellaires sont pour la plupart façonnés de la même façon et ressemblent donc à ʻOumuamua. " L'hypothèse actuelle est basée sur la supposition que ʻOumuamua n'est pas un coup de chance mais un représentant typique des astéroïdes interstellaires ", conclut-il. Nous le saurons dans le prochain épisode, quand l'objet sera mieux caractérisé et que nous découvrons ʻOumuamua 2.