Le cinéaste David Cronenberg monte "La Mouche" à l'opéra !
Le cinéaste canadien David Cronenberg va faire voler sa "Mouche" de l'écran vers la scène avec la création mondiale mercredi soir à Paris de "The Fly", un opéra en deux actes composé, comme la musique du film fantastique éponyme, par son compatriote Howard Shore.
A projet insolite, maître d'oeuvre exceptionnel: l'Orchestre philharmonique de Radio France sera dirigé dans la fosse du Théâtre du Châtelet par le ténor et chef espagnol Placido Domingo, directeur général de l'Opéra de Los Angeles, qui a commandé l'oeuvre et l'accueillera du 7 au 26 septembre prochains.
David Cronenberg, aujourd'hui âgé de 65 ans, a fait sensation il y a plus de vingt ans (1986) avec "La Mouche", à la fois film d'horreur et fable métaphysique sur les conséquences de la fusion malencontreuse d'un homme (le scientifique Seth Brundle) et d'un insecte avec lequel il a été "téléporté".
L'idée d'en faire un opéra a d'abord germé dans l'esprit d'Howard Shore, ami d'enfance de Cronenberg, pour lequel il a écrit onze bandes originales, dont celle de "La Mouche".
Ce compositeur de musique de films très demandé ("Aviator" de Martin Scorsese, "Ed Wood" de Tim Burton...) voulait, après s'être essayé au genre symphonique (à partir de ses partitions pour la trilogie "Le Seigneur des anneaux" de Peter Jackson), passer à la grande forme lyrique.
"Nous nous sommes rendus compte que le film était d'une certaine façon proche de l'opéra, avec trois personnages dans une pièce et une musique très intense, pour ainsi dire opératique", explique dans un entretien à l'AFP David Cronenberg, qui a signé la mise en scène du spectacle mais pas son livret, confié à un spécialiste, l'Américain David Henry Hwang.
L'intrigue amoureuse, ingrédient quasi obligé d'un livret dans la tradition lyrique, est présente dès le scénario du film: la jeune journaliste Veronica Quaife tombe amoureuse puis enceinte de "Brundlefly", et c'est son rédacteur en chef et ex-petit ami Stathis Borans qui la sauvera de l'emprise du mutant.
Pas question cependant pour David Cronenberg de créer un opéra qui ne serait que la simple adaptation scénique de son film.
"Avant de me lancer dans le projet, j'ai dit +je ne veux pas faire un remake du film. Je ne veux pas utiliser la vidéo, les effets additionnels, les projections. Je veux faire du théâtre+", souligne le réalisateur.
Parmi les différences entre le film et l'opéra figure le contexte historique de l'action, transposée dans les années 1950, soit l'époque de la réalisation de "La Mouche noire" de Kurt Neumann, le classique de série B d'horreur dont s'était inspiré David Cronenberg pour son long métrage.
"J'ai trouvé que ça nous donnait une perspective visuelle et une résonance intellectuelle intéressantes, avec la menace nucléaire, la réaction contre la science", explique le cinéaste.
A quelques jours de sa première mise en scène dans un théâtre, David Cronenberg avoue être "curieux, excité, un peu nerveux, mais pas vraiment apeuré".
"Comme un film, un opéra est une grosse machine, et il m'a fallu comprendre comment ça marchait. Mais après, ce n'est pas si difficile. Ce le serait si les chanteurs n'étaient pas vraiment des acteurs", explique David Cronenberg.
"Maintenant, je suis très confiant", ajoute le cinéaste, rassuré notamment par le "casting fabuleux" réuni pour donner vie à cet "opéra physique, comme le film".
AFP