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Michel Layaz, invité de Tulalu!?, au Cinéma Bellevaux, à Lausanne

Publié le 05 décembre 2017 par Francisrichard @francisrichard
Michel Layaz et Pierre Fankhauser

Michel Layaz et Pierre Fankhauser

Hier soir, Michel Layaz était le dernier invité de l'année 2017 de l'association littéraire Tulalu!?. La rencontre s'est déroulée, comme les précédentes de cet automne, dans le cadre mythique du Bellevaux, le cinéma d'art et d'essai lausannois.

Il est convenu que Pierre Fankhauser, l'animateur charismatique de l'association, l'interrogera surtout sur son dernier livre, paru en 2016, Louis Soutter, probablement, pour lequel l'écrivain vaudois a reçu le Prix suisse de littérature 2017.

Mais, au préalable, en amuse-bouche, Miguel Moura ne tarit pas d'éloges sur l'auteur, avec l'emploi d'adjectifs qu'il dira pourtant avoir égalisés pour les atténuer... Enthousiaste, il parle de son écriture fluide et précise... qui l'enchante.

Michel Layaz, invité de Tulalu!?, au Cinéma Bellevaux, à Lausanne

Que signifie ce probablement qui figure dans le titre du livre, demande, faussement ingénu, Pierre Fankhauser? Michel Layaz, avant de répondre, raconte qu'il a tout de suite été attiré par Louis Soutter. Il ne parle pas d'atomes crochus, mais il pourrait...

Dans l'existence, il y a ainsi des attirances immédiates pour des personnes et des répulsions tout aussi immédiates pour d'autres. Elles ne s'expliquent pas. Elles se confirment ou non avec le temps... L'attirance de Michel Layaz pour Louis Soutter ne s'est jamais démentie...

C'est pourtant un drôle de personnage puisqu'il semble avoir tout raté de ce qu'il a entrepris, sauf dans le domaine de l'art, où il a excellé en tant que musicien mais, surtout, en tant que peintre. Il avait un grain de folie, mais il n'était pas fou. Peut-être un artiste doit-il avoir ce grain-là...

Patricia Bosshard et Michel Layaz

Patricia Bosshard et Michel Layaz

L'artiste se caractérise en effet par sa créativité, par son imagination. Comme le dit Albert Einstein, cité par l'invité: La logique vous mènera d'un point A à un point B. L'imagination vous emmènera où vous voulez.


La musicienne Patricia Bosshard improvise. Le comédien René-Claude Emery lit. Leur interprétation de trois extraits de Louis Soutter, probablement ouvre tous les possibles à ceux qui les écoutent, à partir des notes qu'elle joue et des mots qu'il prononce.

Michel Layaz lui-même est un peu désarçonné: il ne peut bien sûr que reconnaître ce qu'il a écrit, mais, dans le même temps, il s'en sent comme dépossédé. N'importe quel lecteur fait pourtant de même avec ses textes, mais la différence est qu'il ne l'entend pas...

Pierre Fankhauser et René-Claude Emery

Pierre Fankhauser et René-Claude Emery

Si Michel Layaz emploie l'adverbe probablement, c'est une manière de respect envers son sujet. Il est romancier, n'est pas biographe. Et, s'il a pris quelques libertés pour combler les vides de la vie de Soutter - il y en a beaucoup -, tout, ou presque, dans le livre, est documenté, donc probable.

Aussi, comme il est soucieux du détail vrai, est-il bien difficile de le prendre en défaut. Certes la remarque lui a été faite qu'il n'y a pas de balcons dans une des rues qu'il décrit, mais il dit vrai, par exemple, quand il parle du jet d'eau de Genève qui ne fonctionne alors que le dimanche... 

Au début Louis Soutter dessine pour lui-même. Mais il est encouragé par les figures que sont déjà Jean Giono et Le Corbusier (qui est son petit-cousin). Eux et, dans une moindre mesure, le peintre René Auberjonois et l'écrivain Charles-Ferdinand Ramuz le poussent...

Michel Layaz et Pierre Fankhauser

Michel Layaz et Pierre Fankhauser

Michel Layaz reconnaît qu'il n'a pas connu de tels stimulants. Ce sont des écrivains qui, par leurs oeuvres, lui ont donné l'envie d'écrire. C'est mieux maintenant qu'à son époque: il est en effet plus facile aujourd'hui à un jeune d'être publié, ce qui ne préjuge pas de ses qualités...

Dès lors Louis Soutter va dessiner avec tout ce qui lui tombe sous la main. Quand, ravagé par l'arthrose, il ne pourra plus tenir crayon ou pinceau, il se servira de ses doigts pour peindre. Ce qui fait penser à Francisco Goya: Donnez-moi un morceau de charbon et je vous ferai un tableau...

Pour ceux qui n'ont pas lu son livre ou qui ne connaissent pas la vie de Louis Soutter, Michel Layaz précise que le peintre aura passé près de vingt ans à l'Asile de Ballaigues, où il a été placé par sa famille: il fugue souvent, mais il revient toujours, comme si ce cadre à la fois le tenait et lui permettait de lâcher prise...

Romain Buffat et Michel Layaz

Romain Buffat et Michel Layaz

L'Institut littéraire suisse a dix ans. Ce n'est évidemment pas l'Asile de Ballaigues. Mais il offre, d'une autre façon, bien moins sévère, un cadre où la création littéraire peut s'approfondir. Car, si l'on n'y apprend pas à devenir écrivain, on peut éviter là les pertes de temps inutiles et certains écueils.

Les projets des étudiants bénéficient en effet d'un accompagnement par un mentor, qui commentent leurs projets lors d'entretiens individuels. Romain Buffat y a justement Michel Layaz pour mentor. Et il témoigne de tout ce que ces entretiens lui apportent dans l'accomplissement de son projet.

Le projet de Romain Buffat arrive à son terme. Il sera prochainement publié. C'est vraiment mieux maintenant... Romain Buffat ajoute qu'à l'Institut littéraire suisse il a aussi fait l'expérience de l'écriture collective, à côté de son projet individuel. Il se félicite de cette ouverture enrichissante.

Le mentor lui aussi s'enrichit au cours de ces entretiens. Il n'est même pas interdit de penser qu'ils ont permis quelque peu à Michel Layaz de faire de son ami Louis Soutter un véritable personnage littéraire...

Francis Richard


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