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Jusqu'à maintenant, les agriculteurs bio n'avaient pas accès aux variétés anciennes, issues d'une sélection paysanne traditionnelle car elles étaient hors la loi. Qu'il s'agisse de céréales, de fruits et légumes, de légumineuses, des plantes aromatiques... et même de races d'animaux. Les semences à leur disposition étaient les mêmes que celles utilisées en agriculture conventionnelle, à quelques exceptions près. Problème : ces semences mises au point dans les laboratoires des semenciers, souvent comparées à des formules 1 en raison de leurs rendements, sont fragiles et ne fonctionnent qu'avec un arsenal médicamenteux (les pesticides rebaptisés produits phytopharmaceutiques). Difficile donc d'obtenir de bons résultats en bio, particulièrement pour le blé.
Une grande diversité de semences redevient accessible
Le nouveau règlement européen sur l'agriculture biologique, adopté le 20 novembre par le Conseil de l'UE et le 22 novembre par le Parlement européen, change la donne. Il rend accessibles deux nouvelles catégories de semences. D'une part, les variétés paysannes anciennes désormais appelées " matériel hétérogène biologique ". D'autre part, des variétés spécifiquement sélectionnées pour les besoins de l'agriculture biologique appelées quant à elles " variétés biologiques adaptées à la production biologique ".
Cultivées en bio, ces nouvelles catégories seront répertoriées dans une base de données, qui devraient rapidement s'enrichir car elle sera alimentée par les producteurs eux-mêmes sans aucun frais. Elle grandira d'autant plus vite que le règlement bio est étendu à de nouveaux produits, tels que de nouveaux animaux de fermes (lapins et cervidés) et des produits non alimentaires comme la cire d'abeille, le liège, la laine...
Les variétés végétales et animales bio disponibles seront donc connues. Les agriculteurs seront tenus de les utiliser, les semences conventionnelles n'étant autorisées qu'en l'absence de semences bio. Et ils pourront les reproduire librement.
Le principe du contrôle annuel et du contrôle inopiné maintenu
L'autre sujet important de ce nouveau règlement concerne les contrôles et les résidus de pesticides présents dans les produits bio. Le principe du contrôle annuel et des contrôles inopinés réalisés par un organisme certificateur est maintenu. Pour les opérateurs sans irrégularité depuis plus de trois ans, le contrôle physique de l'exploitation pourra être espacé de 24 mois à leur demande. En revanche, en cas d'irrégularités constatées, les contrôles seront intensifiés. Ces règles de l'UE devront s'appliquer aux produits bio importés des pays tiers (50% de ceux vendus dans l'UE sont importés), au plus tard d'ici 5 ans, tant pour la production que pour les contrôles.
Pour mutualiser les coûts de certification, les producteurs pourront de plus se regrouper. Petits magasins et producteurs à la ferme pourront enfin vendre leurs produits non transformés et non emballés jusqu'à un certain plafond, sans certification du lieu de vente (les magasins font également l'objet de contrôles et d'une certification) après déclaration préalable auprès de l'administration compétente.
Pas de seuils de " décertification " imposés
La question de la quantité de pesticides au-delà de laquelle un produit ne saurait être vendu comme " bio " n'a pas été tranchée : le règlement n'impose aucun seuil mais permet aux Etats-membres de le faire comme c'est le cas en Belgique. Les producteurs bio ne sont globalement pas favorables aux seuils. Ils ne souhaitent pas transformer une obligation de moyens (respecter des méthodes culturales) à une obligation de résultat (s'engager à l'absence de produits chimiques sur le produit livré).
Pour éviter les contaminations, l'accent a été mis sur les mesures de précaution qui ont été précisées et clarifiées. Elles concernent surtout la transformation, le stockage, le conditionnement, le transport, étapes au cours desquelles les contaminations sont les plus fréquentes. Cependant, dans les quatre ans à venir, la question des contaminations et des seuils va être auscultée et devrait déboucher sur une nouvelle proposition de la commission.
Principal bémol de ce nouveau règlement : la production bio et non bio reste autorisée sur une même ferme. Mais de l'avis des négociateurs de la filière et des parlementaires, le compromis trouvé apporte des avancées importantes par rapport au texte précédent.
Anne-Françoise Roger
A lire en complément, l'interview pour bioaddict de Blanche Magarinos-Rey, avocate spécialisée en droit de l'environnement, qui a suivi les négociations qui se sont tenues à Bruxelles au cours des trois années passées pour élaborer le nouveau règlement sur l'agriculture biologique. Ses compétences ont été déterminantes pour l'adoption de mesures en faveur des semences biologiques.