C'est une nouvelle démonstration du rôle clé du microbiote intestinal ou du moins de certaines familles de bactéries dans la réponse à l'immunothérapie dans le traitement du cancer. Certaines bactéries intestinales peuvent en effet stimuler le traitement, concluent, dans la revue Science, ces chercheurs français (Gustave Roussy, l'Université Paris-Sud et Université Paris-Saclay) avec leurs collègues du Memorial Sloan Kettering Cancer Center, du Weill Cornell Medical College (US) et du Karolinska Institute (Suède).
Les chercheurs ont ici spécifiquement examiné le rôle possible du microbiote en cas d'immunothérapie, un traitement de choix pour certains cancers qui consiste à stimuler le système immunitaire à attaquer les cellules cancéreuses en utilisant des anticorps spécialement conçus. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'une étude montre que les patients porteurs de certains types de bactéries dans leur microbiote intestinal ont " plus de chance " de bien répondre à une immunothérapie contre le cancer.
La recherche a compris plusieurs études et expériences en laboratoire dont l'objectif était de préciser le rôle éventuel de certaines bactéries présentes dans l'intestin sur la réponse des patients à l'immunothérapie, sachant que les cancers sont résistants à ces traitements chez environ 2 tiers des patients. Il s'agissait également de vérifier si un déséquilibre gastro-intestinal ou l'utilisation d'antibiotiques pouvaient affecter la réponse au traitement.
Chez la souris : la recherche a d'abord testé l'efficacité de 2 types d'immunothérapie la souris modèle de sarcome ou de mélanome, certaines souris ayant reçu des antibiotiques. Les chercheurs ont regardé si les souris traitées avec des antibiotiques pouvaient avoir une meilleure réponse à l'immunothérapie si elles recevaient une greffe de selles de certains participants de l'étude répondant bien à l'immunothérapie.
- Les souris modèles de mélanome ou de sarcome ayant reçu des antibiotiques ont tendance à avoir de moins bons résultats de traitement notamment en termes de survie ;
- la transplantation fécale de patients répondant à l'immunothérapie à des souris modèles de cancer semble réduire la progression du cancer ;
Chez l'Homme : les chercheurs ont examiné 249 patients présentant une forme avancée du cancer du poumon non à petites cellules, de cancer du rein ou de cancer de la vessie ou des uretères (carcinome urothélial), en prenant en compte la prise d'antibiotiques chez certains patients, soit 2 mois avant soit 1 mois après le début de l'immunothérapie. Le microbiote intestinal de 100 de ces patients a également été analysé par séquençage de l'ADN. Ces analyses montrent que :
- les bactéries intestinales diffèrent entre les patients qui répondent bien à l'immunothérapie vs ceux qui répondent mal ;
- les patients ayant reçu des antibiotiques ont tendance à avoir de moins bons résultats de traitement en termes de survie globale et de survie sans progression ;
- les participants à réponse positive présente plus d'une certaine bactérie appelée Akkermansia muciniphilia ;
Si le processus par lequel nos bactéries intestinales affectent la réponse aux traitements d'immunothérapie reste mal compris, la modification du microbiote intestinal, par probiotiques ou transplantation fécale qui pourrait la stimuler apparaît comme une voie thérapeutique complémentaire prometteuse pour optimiser les résultats de traitement. D'autres recherches devront encore préciser quelles bactéries intestinales influencent directement ces réponses au traitement.